Le japonisme dans la gravure

Cette page présente les œuvres numérisés de quelques graveurs français particulièrement influencés par l’ukiyo-e.

Prosper-Alphonse Isaac est issu d’une famille bourgeoise de Calais investie dans une manufacture de dentelle. Installé à Paris à partir de 1870, il suit les cours du peintre Jean-Paul Laurens. Il restera toute sa vie attaché à sa région natale, dont les paysages apparaissent à plusieurs reprises dans son œuvre. Bien que ses débuts dans la carrière de peintre soient prometteurs, la découverte des milieux japonisants parisiens lui ouvre une autre voie.

George Auriol, artiste aux multiples talents, rencontre Henri Rivière au début des années 1880. Ce dernier devient un ami très proche, lui enseigne la gravure sur bois à la manière japonaise et la lithographie. Plusieurs projets vont voir la collaboration des deux artistes, dont les 36 vues de la Tour Eiffel. L’influence du japonisme et du style Art nouveau est très visible dans les dessins et les gravures d'Auriol : lignes souples, et sujets végétaux, teintes subtiles caractérisent ses oeuvres. Voir : Monique Moulène, George Auriol (1863-1938), la lettre et l'estampe.

La carrière artistique de Jules Chadel, originaire de Clermont-Ferrand, débute par la sculpture sur pierre. Il rejoint la capitale à l’âge de 21 ans : les cours du soir qu’il suit à l’Ecole des arts décoratifs lui donnent le goût du dessin appliqué à l’objet. Il entre en 1898 comme dessinateur-décorateur chez le joailler Leturq, puis sept ans plus tard chez Henri Vever. Il passera vingt ans chez le célèbre joaillier amateur d’art japonais, découvrant ainsi l’une des plus belles collections parisiennes d’estampes et d’objets japonais.

Née en Pennsylvanie, Mary Cassatt manifeste très tôt le désir d'embrasser une carrière artistique. Cette vocation la pousse à voyager en Europe puis à s'installer à Paris, où elle se lie aux impressionnistes par l'intermédiaire d'Edgar Degas. A partir de 1879, elle s'intéresse à la gravure, médium dans lequel elle excellera. La découverte de l'estampe japonaise en 1890 est à l'origine d'une série de dix gravures en couleurs à l'aquatinte, qu'elle retouche ensuite à la pointe sèche, suscitant l'admiration de ses contemporains.

Fondée par le marchand d’art oriental Samuel Bing en 1892, la Société des Amis de l’art japonais a largement contribué au développement du japonisme. Elle a réuni pendant près de quarante ans des amateurs d’art japonais à raison d’un dîner mensuel. Parmi les membres figurent des collectionneurs comme Raymond Koechlin, Hayashi Tadamasa, Henri Vever ou encore Alexis Rouart, des critiques d’art comme Roger Marx, des conservateurs comme Gaston Migeon, chargé des objets d’art du Musée du Louvre, et enfin des artistes tels Henri Rivière, Prosper-Alphonse Isaac, Charles Houdard ou Félix Régamey.

Sous le Second Empire, les affiches publicitaires, jusqu'alors typographiques et en noir, adoptent la couleur et le grand format. Les tons vifs et les sujets des estampes japonaises de la deuxième moitié du XIXe siècle répandent leur palette sur ces supports : affiches pour des boutiques de curiosités, pour des expositions d’art japonais, affiches de spectacles de rue, publicités pour des produits de beauté ...(voir Affiches et affichistes dans Gallica)

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En 1872, lorsque le critique d’art Philippe Burty utilise pour la première fois le terme "japonisme", l’influence de l’esthétique japonaise touche déjà tous les arts. Mais un médium est, plus que tout autre, au cœur du japonisme : l’estampe. Sa prééminence tient à son double rôle : à la fois modèle, agent de transmission de l'esthétique japonaise, et mode d'expression. C’est en effet par les gravures des maîtres japonais de l’ukiyo-e, parmi lesquels Hokusai et Hiroshige, que l’art japonais s’est répandu dans les ateliers et c’est auprès des graveurs français qu’il a trouvé un écho immédiat.

Deux générations d’artistes s’empareront chacune à leur manière des sujets et des nouveautés stylistiques que leur offrent les estampes japonaises. L’une et l’autre ont été associées à un mouvement de renouveau dans l’histoire de l’estampe. Celle de Félix Bracquemond, japonisant de la première heure, à laquelle appartiennent Edouard Manet, Edgar Degas et James Mc Neill Whistler, a participé à la redécouverte de l’eau-forte originale.

La génération d’Henri Rivière et du groupe des Nabis a vu triompher l’estampe en couleurs et le retour de la gravure sur bois originale ; certains graveurs sont allés jusqu’à s’approprier les techniques de gravure et d’impression japonaises. Henri Rivière (1864-1951) et son ami George Auriol (1863-1938) ont ouvert la voie, suivis par Prosper-Alphonse Isaac (1858-1924) et Jules Chadel (1870-1941).

À l’exception des modèles gravés par Félix Bracquemond (1833-1914) pour le décor du service de table en faïence de la maison Rousseau (1866), la sélection faite au sein des collections du département des Estampes et de la photographie privilégie les corpus entiers d’artistes japonistes plutôt qu’un échantillonnage de pièces japonisantes extraites de l’œuvre d’artistes influencés ponctuellement par ce courant.

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