L'estampe du XVe au XXe siècle
Cette page vous donne accès à plusieurs milliers de gravures conservées à la BnF et numérisées dans Gallica, du XVe au XXe siècle..
L’invention de l’estampe à l’aube du XVe siècle constitue un phénomène essentiel pour l’histoire de l’art en Occident, permettant enfin de diffuser des images multipliables à l’identique, cinquante ans avant l’invention de l’imprimerie par Gutenberg. Une partie de ces estampes incunables gravées sur bois et au burin, venant d’Europe du Nord, est aujourd’hui accessible sur Gallica. En quelques décennies ce nouvel art se perfectionne et voit l’émergence des premiers grands maîtres de l’estampe dès la fin du XVe siècle : Martin Schongauer en Allemagne et son élève Albrecht Dürer, génie inégalé. Au début du XVIe siècle la production commence à s’organiser, apparaissent les premiers graveurs d’interprétation au service des grands peintres, à l’image de Marcantonio Raimondi pour Raphaël. Les usages de l’estampe se diversifient, telles ces gravures sur bois collées dans des couvercles de coffrets, et le marché se sectorise : ainsi à Paris dans la seconde moitié du XVIe siècle se concentre rue Montorgueil une production de grandes gravures sur bois semi populaires.
Au cours du XVIIe siècle, l’estampe est partout. Alors que ce médium attire quelques-uns des plus grands créateurs de l’époque (Rembrandt, Callot, Bellange, Nanteuil…), les pratiques artistiques sont loin d’être le seul usage des images imprimées. La gravure permet de diffuser les idées, religieuses, politiques ou scientifiques ; elle fournit des modèles aux artistes et artisans ; elle embellit les livres et orne les boutiques. Aussi aboutit-on à une maîtrise technique sans pareil de la part des principaux maîtres, qui inventent de nouvelles méthodes pour graver en taille-douce : l’eau-forte et la manière noire ouvrent de nouvelles possibilités et s’allient au burin. Paris devient un centre de première importance en Europe, dont la production est largement copiée.
Nourri d'un besoin toujours plus important d'images, le XVIIIe siècle fait figure d'âge d'or de la gravure française. Art de société et art à la mode, pratiquée par les artistes comme par les amateurs, la gravure s'attire les faveurs des collectionneurs en ce qu'elle permet de constituer, à moindres frais, une collection d'art où se trouvent reproduits les grands tableaux et dessins de l'époque. Si, dans la première moitié du XVIIIe siècle, les peintres se voient confier des commandes d'illustrations, notamment pour les grands textes littéraires de Molière ou de La Fontaine, c'est au tour des illustrateurs de livre, profession récente, de produire à partir des années 1750 des images à caractère scientifique et technique destinées à accompagner les ouvrages encyclopédiques tels que l'Encyclopédie ou l'Histoire naturelle de Buffon. Cet essor de la gravure s'accompagne du renouveau et d'une multiplication des techniques. Au burin et à l'eau-forte traditionnels viennent s'ajouter des procédés d'imitation des techniques originales : gravure en couleur au repérage ou à la poupée, gravure en manière de crayon ou de lavis... Cette virtuosité et cette variété servent naturellement une diffusion de plus en plus large des images, qui culmine sous la Révolution française dont la gravure véhicule à grande échelle l'idéologie et les symboles.
Le XIXe siècle est le siècle de l’image. La production d’estampes connaît une explosion sans précédent. La mise au point de deux techniques nouvelles (la lithographie, puis la gravure sur bois de bout) va contribuer à augmenter considérablement le nombre d’images imprimées et le nombre de tirages diffusés. Grâce à ce renouveau des techniques, l’estampe élargit son public en même temps qu’elle séduit les artistes pour qui elle devient un mode d’expression à part entière. L’histoire de l’estampe originale du XIXe siècle épouse trois mouvements successifs : le premier voit la lithographie l’emporter sur le burin, signant ainsi le triomphe du Romantisme sur l’Académisme, le deuxième redécouvre, dans les années 1860, l’eau-forte originale et les vertus d’une écriture libre en noir et blanc et, enfin, les dernières décennies du siècle consacrent le peintre-graveur dont les créations sont progressivement gagnées par la couleur.
Le département des Estampes et de la photographie de la BnF rassemble environ 3000 estampes et 1000 livres illustrés, des bois gravés, des dessins et des peintures, où les plus grands noms sont représentés : Moronobu, Harunobu, Utamaro, Shunshô, Toyokuni, Hiroshige et bien sûr Hokusai, dont un volume de la Manga fait son entrée dans les collections dès le milieu du XIXe siècle. Ces ensembles exceptionnels, en grande partie numérisés, sont accessibles via le portail France-Japon. Cette rubrique reprend les pages spécifiquement dédiées à l'estampe.
Né en Orient, le jeu de cartes connaît, grâce à l’invention de la gravure sur bois, une diffusion rapide en Europe. Au cours des époques, il se diversifie, suivant les modes et les techniques d’impression : jeu de coucou, de tarot, cartes divinatoires, jeu de sept familles, jeux conçus par des artistes…Cette sélection présente près de 3000 ensembles conservés au département des Estampes et de la photographie, provenant du monde entier ( France, Italie, Europe du Nord mais aussi âs nas de Perse, ganifa de Mongolie, hanafuda du Japon…) , du XIVe au XXe siècle.
Mené avec le souci de référencer le riche fonds des graveurs français, l’inventaire du fonds français (IFF) est entrepris à partir de 1932. L’enjeu consiste à décrire, pièce par pièce et par ordre alphabétique de graveur, l’ensemble des gravures françaises produites depuis le XVIe siècle jusqu’au XIXe et conservées au département des Estampes. Complet pour le XVIe siècle, il ne concerne encore pour les XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles que les graveurs de A à L ou M. À l'exception des plus récents et de quelques lacunes, tous les volumes sont numérisés et accessibles dans Gallica.
Les notices de l’IFF XVIIIe siècle ont été converties informatiquement et ont été versées dans le catalogue général de la BnF en 2016.
« C’est un bonheur pour [les peintres], qu’on ait trouvé dans le quinzième siècle un Art capable de donner à leurs chefs-d’œuvre, la même immortalité que l’Art de l’Imprimerie assure à la Jérusalem délivrés du Tasse, & aux Tragédies de Corneille. L’Art de la gravure dont j’entends parler ici, peut faire passer dans tous les pays de la terre, & transmettre aux siècles à venir ce qu’il y a de plus précieux & de plus divin dans les ouvrages des peintres excellents ; leur donner des Elèves dans des lieux où il n’y a point de leurs tableaux, & mettre la postérité la plus reculée en état, & de rendre justice à leur mérite, & d’étudier encore d’après eux, quand bien même tous les ouvrages de leurs mains auraient été anéantis. Le nombre des Estampes qui se tirent de la même planche, & la manière dont on les garde, les feront survivre à la plupart des Tableaux qu’elles représentent ». C’est en ces termes que Pierre-Jean Mariette vante les mérites de l’estampe dans l’introduction au Cabinet Crozat, insistant sur la fonction de reproduction et les capacités de démultiplication, par la gravure, de l’image sous toutes ses formes.
Le terme de gravure désigne l’ensemble des procédés qui, par l’incision ou l’épargne obtenues par des moyens mécaniques ou chimiques, permettent l’inscription d’un motif sur une matrice – cette dernière, une fois encrée, devient support d’impression et offre la possibilité de tirages multiples : l’estampe. On distingue généralement plusieurs principes de gravure, depuis la gravure de reproduction jusqu’à la gravure originale, en passant par la gravure d’interprétation, et les collections du département des Estampes et de la photographie permettent d’envisager chacune de ces fonctions à travers les siècles.
La sélection qui est proposée dans ces pages, très partielle au regard de l’immensité des oeuvres conservées, correspond à l’ensemble des œuvres d’artistes numérisés. Elle n’en est pas moins représentative, puisqu’elle témoigne de différentes écoles et courants artistiques ; offre un panel des très nombreuses techniques employées, depuis la xylographie jusqu’à la lithographie ; donne accès à des œuvres d’artistes incontournables du XVe siècle au XXe. Elle est augmentée au fur et à mesure de l’arrivée dans Gallica de nouveaux corpus et œuvres gravés.