Postérité du Roman de la Rose
Vers 1400, Evrard de Conty, dans le Livres des Echecs amoureux, transpose dans un commentaire didactique les étapes de la conquête amoureuse en une partie allégorique d’échecs, dont l’enjeu est le cœur d’une jeune femme.
Deux témoins conservés au département des Manuscrits ont été numérisés : Français 143, Français 9197.
Après avoir lu le Roman de la Rose, le moine cistercien Guillaume de Digulleville compose une œuvre allégorique vers 1330-1331 (première rédaction), le Pèlerinage de vie humaine. Reprenant les codes du Roman de la Rose, il invite son lecteur à entreprendre une quête initiatique, spirituelle plutôt qu’amoureuse : le Pèlerinage de vie humaine est le récit allégorique et didactique de la vie du chrétien.
Six témoins conservés au département des Manuscrits ont été numérisés : Français 602, Français 823, Français 1577, Français 1645, Français 1650, Français 9196.
René d’Anjou livre en 1457 un songe allégorique narrant les aventures du chevalier Cuer et de sa dame, Mercy : le Livre du cuer d’amours espris. Le Cœur d’amour épris fait la synthèse entre la littérature arthurienne et la poésie allégorique dont procède le Roman de la Rose, en apparentant la quête de l’aimée à celle du Graal. Quête du baiser, emprisonnement de la belle, menace de Danger et des « mesdisans », les points de contact entre le Roman de la Rose et le Cuer s’imposent comme des évidences, à ceci près que le malheureux chevalier, séparé de sa belle, finit ses jours à « l’hôpital » des amants malheureux.
Un témoin conservé au département des Manuscrits a été numérisé : Français 24399.
Le Dit du Verger, pièce narrative en vers de Guillaume de Machaut, est un songe allégorique calqué sur la partie du Roman attribuée à Guillaume de Lorris. En proie aux souffrances d’un amour non réciproque, le narrateur pénètre dans un verger merveilleux, au printemps.
Un témoin conservé au département des Manuscrits a été numérisé : Français 1587.
Le héros du Chevalier errant du marquis Thomas de Saluces part chasser par un beau matin de mai. Il croise Connaissance, qui l’engage à aller découvrir le monde. Cette rencontre inaugurale déclenche le processus narratif et ouvre le récit de l’éducation du jeune homme. Contrairement à l’Amant du Roman de la Rose, le chevalier, après avoir fréquenté la cour d’Amour puis celle de Fortune, revient dans le giron de Connaissance et choisit la voie de la sagesse.
Un témoin conservé au département des Manuscrits a été numérisé : Français 12559.
Dans la plus pure tradition de la poésie courtoise, Thibaut de Champagne, roi de Navarre, chante le service d’amour à sa dame. Poème allégorique en forme de salut d’amour, le Roman de la poire, que l’on date du milieu du XIIIe siècle, s’inspire du Roman de la Rose de Guillaume de Lorris.
Deux témoins conservés au département des Manuscrits ont été numérisés : Français 2186, Français 12786.
Au XVe siècle, Martin Le Franc rédige une réponse poétique, allégorique et argumentée au Roman de la Rose, en offrant Le Champion des Dames au plus grand seigneur de l’époque, le duc Philippe de Bourgogne. Avec le Champion des Dames, Martin Le Franc dément les arguments misogynes du Roman de la Rose. Le héros, Franc Vouloir, y défend l’honneur féminin contre cinq experts dépêchés par son ennemi, Malebouche. Au terme du débat contradictoire opposant Franc Vouloir aux suppôts de Malebouche, une statue de Vérité s’anime. Elle déclare Franc Vouloir, le champion des dames, victorieux, et anéantit les contempteurs de l’honneur féminin.
Deux témoins conservés au département des Manuscrits ont été numérisés : Français 841, Français 12476.
Le Roman de la Rose est une composition savante qui s'abreuve à de nombreuses sources et devient, à son tour, un réservoir de motifs pour d'autres auteurs. Au Moyen Âge, nombreuses sont les productions savantes qui se citent et s'enchevêtrent. La production littéraire du XIVe siècle a été fortement irriguée par le Roman de la Rose. Son influence est d’ailleurs restée vivace jusqu’à la fin du Moyen Âge. Si l’on écarte les lieux communs littéraires, auxquels Guillaume de Lorris et Jean de Meun ont eux-mêmes puisé, il reste que de nombreux auteurs ont des dettes envers le Roman de la Rose. <\br>Celui-ci a été un modèle pour les poètes savants du XIVe siècle, une référence pour les récits d’éducation amoureuse, une source d’inspiration pour des écrits de la plus pure tradition didactique, un repoussoir pour les défenseurs de l’honneur féminin. Au XVe siècle encore, le Roman de la Rose, qui a ses zélateurs et ses détracteurs, justifie la forme du roman allégorique pour évoquer l'amour, ses joies, ses écueils et ses souffrances. Les lettrés savent se contenter d'une citation partielle ou d'une simple allusion, tant est normé le recours aux auctores (auteurs reconnus comme des autorités scientifiques et morales) et grande l'intimité entretenue avec eux. L'histoire de la réception du Roman de la Rose doit se lire au travers de deux types de sources : les traces laissées par les lecteurs et les citations faites par les auteurs ultérieurs.