Age d'or de la sinologie (XXe siècle)

Les Mo-So : ethnographie des Mo-So, leurs religions, leur langue et leur écriture

Edouard Chavannes (1865-1918)

Edouard Chavannes (1865-1918), normalien, agrégé de philosophie et diplômé de l’Ecole des langues orientales en chinois, choisit de travailler sur l’histoire de la Chine, discipline peu étudiée alors, sur les conseils d’Henri Cordier, orientaliste célèbre. Il séjourne dans ce pays (en 1889-93 et 1907-08) et entreprend de traduire les Mémoires historiques de Sima Qian, dont il finira 47 chapitres sur 130.

Pour lui, l’étude des sources n’est qu’un prélude à l’étude historique. Il entreprend une série de relevés archéologiques sur des bas-reliefs et monuments chinois, complétés par des photos et des estampages, et publie les deux volumes de Mission archéologique dans la Chine septentrionale consacrés à la sculpture à l’époque des Han et à la sculpture bouddhique. Il est membre de la Société asiatique dès 1888 et publie fréquemment dans le Journal. Il est titulaire en 1893 de la chaire de langue et littérature chinoises et tartares mandchoues au Collège de France et membre de l’Institut en 1903. A partir de 1904, il est co-directeur, avec Henri Cordier qui l’a créé en 1890, de T’oung pao, première revue savante internationale de sinologie. Son travail minutieux et varié (bouddhisme chinois, histoire, littérature populaire, etc.) a inspiré des sinologues comme Paul Pelliot, Henri Maspero, le fils de l’égyptologue ou Victor Segalen, qui a été son élève. Il meurt à 53 ans.

"Bibliotheca Sinica"

Henri Cordier (1849-1925)

Henri Cordier (1849-1925) est un historien, un bibliographe et un orientaliste français, spécialiste de la Chine et des relations de l’Occident avec l’Asie.

Il vit en Chine de 1869 à 1876, puis, de retour à Paris, est chargé en 1881 du cours d’histoire, de géographie et de législation des Etats d’Extrême-Orient à l’Ecole des langues orientales,

poste occupé 10 ans auparavant par Guillaume Pauthier. Le cours devient une chaire en 1888 dont il est nommé titulaire jusqu’à sa mort.

Il crée en 1890 la revue T’oung Pao, qu’il dirige avec Edouard Chavannes, puis avec Paul Pelliot. En 1908, il devient membre libre de L’Académie des inscriptions et belles-lettres. Il est vice-président de la Société asiatique de 1918 à 1925.

En plus de son enseignement, il a exercé une activité scientifique intense, ne cessant d’écrire et de publier pendant 55 ans, se spécialisant dans les études bibliographiques des œuvres relatives à l’Extrême-Orient et dans celles des grands voyageurs en Asie. Il est l’auteur d’une œuvre majeure, la Bibliotheca Sinica (1878-95, 1904-07, 1924), qui est la liste de tous les ouvrages écrits en langues européennes, des origines jusqu’à 1924, sur la Chine, l’Asie centrale, la Mandchourie, la Mongolie, le Tibet et la Corée. Suivent une Bibliotheca Japonica (1912) et une Bibliotheca Indosinica (1912-1915).

atalogue des livres chinois de la Bibliothèque nationale

Maurice Courant (1865-1935)

Maurice Courant (1865-1935) a appris le chinois et le japonais à l’Ecole des langues orientales, en même temps qu’Edouard Chavannes, avec qui il restera lié. Il est d’abord interprète au ministère des Affaires étrangères (1888-96) en Chine, en Corée -où il rassemble les matériaux de sa future Bibliographie coréenne, tableau littéraire de la Corée, publiée en 3 volumes en 1894-1897- et au Japon.

Il rentre en France en 1896 pour se consacrer à la recherche. En attendant un poste, il accepte en 1897 l’offre de la Bibliothèque nationale de publier un nouveau catalogue de ses fonds extrême-orientaux, chinois principalement, qui s’étaient beaucoup enrichis depuis le catalogue de Stanislas Julien de 1853. Ce travail lui prendra 15 ans. Ne trouvant pas de poste à Paris, il part en 1900 pour Lyon où il est nommé maître de conférences à l’université et où il enseigne le chinois. Il y restera toute sa carrière. Il publie de nombreux articles, reflets de ses cours sur la civilisation de l’Extrême-Orient, ainsi que des ouvrages érudits, comme sa grammaire chinoise (La langue chinoise parlée : grammaire du Kwan Hwa septentrional, 1914) ou une vaste histoire des rapports de l’Europe avec l’Extrême-Orient dont ne paraît que le premier tome (La Sibérie, colonie russe jusqu'à la construction du Transsibérien, 1920). En 1913, il est le premier titulaire de la chaire de chinois qui vient d’être créée. Il est membre fondateur de l’Institut franco-chinois de Lyon en 1921, qui a largement contribué à renforcer les relations avec la Chine, déjà anciennes grâce à l’industrie de la soie. Une paralysie de la main droite, due à un accident en 1910, a tari très tôt sa veine d’écrivain-chercheur. Il n’a pas pu achever le catalogue des livres chinois que lui demandait la BN en 1933.

Trésors de Chine et de Haute Asie : centième anniversaire de Paul Pelliot

Paul Pelliot (1878-1945)

Paul Pelliot (1878-1945), diplômé de chinois de l’Ecole des langues orientales, a été formé par Edouard Chavannes et Henri Cordier. Philologue, linguiste, archéologue et historien, il s’est intéressé à de nombreuses disciplines : histoire de l’Asie, de l’art, des religions… Il maîtrisait 13 langues. Il est membre de la Société asiatique à 19 ans, en 1897.

Premier pensionnaire en 1899 de la Mission archéologique d’Indochine, future Ecole française d’Extrême-Orient, il effectue plusieurs missions en Chine et en Asie centrale. C’est en 1908 qu’il atteint Dunhuang, sur la route de la soie dans le Turkestan chinois, et qu’il accède à la grotte bibliothèque découverte en 1900 par le moine taoïste Wang Yuanlu. Il achète une partie des manuscrits qu'elle contient. Sa connaissance des textes classiques chinois, sa maîtrise des langues (tibétain, sanscrit, sogdien, koutchéen, ouïgour…) lui ont permis de sélectionner les plus intéressants : 5000 manuscrits et peintures aujourd’hui conservés au musée Guimet et la BnF (ces manuscrits sont en ligne dans le cadre du Projet international de Dunhuang et accessibles via Gallica). De retour à Paris en 1909, il devient sous-directeur de l’EFEO jusqu’à sa nomination, en 1911, au Collège de France à la chaire de Langues, histoire et archéologie de l'Asie centrale créée pour lui. Il commence alors à écrire dans T’oung pao, la revue de sinologie, et la dirige en 1920 avec Henri Cordier après le décès d’Edouard Chavannes. Il est élu à l’Institut en 1921. Il fonde avec Marcel Granet l'Institut des hautes études chinoises (IHEC) en 1927. Il est conservateur du musée d’Ennery à partir de 1930 et président de la Société asiatique de 1935 à sa mort. Il a laissé des travaux de bibliographie chinoise d’une grande érudition. Un tiers de son œuvre est consacré au bouddhisme. En cela, il est le successeur de Chavannes. Il est incontournable pour tout ce qui touche à l’Asie centrale et à la Chine.

Ce corpus présente un large ensemble de documents numérisés qui témoignent des relations entre la Chine et la France depuis le Moyen Age jusqu’à l’entre-deux-guerres. La France s’est intéressée très tôt aux études chinoises et la Bibliothèque nationale a accompagné leur développement dès les premiers voyages des jésuites, au XVIIe siècle. Des noms illustres comme ceux de Nicolas Trigault, Joachim Bouvet, Jean-Baptiste Du Halde, Jean-Pierre Abel-Rémusat, Stanislas Julien, Edouard Chavannes ou Paul Pelliot sont devenus des références incontournables et expliquent que la BnF possède l’une des collections sinologiques les plus riches au monde.

Le terme « sinologie » (汉学), qui recouvre les études relatives à la Chine, est entendu au sens large et ne se limite pas aux quatre domaines classiques : religion et spiritualité (textes canoniques) (jing-经), histoire (Shi-史), philosophie (Zi-子), littérature (Ji-集). On y inclut la science et la médecine, les récits de voyage, les textes destinés à la diffusion du christianisme en Chine ainsi que des ouvrages de linguistique, notamment les premières publications importantes sur la langue chinoise.

Sinica est un corpus original en ce qu’il donne à découvrir un pays et sa civilisation à travers le regard d’un autre. Cet intérêt est très ancien et dure toujours. Ainsi, l’Histoire de l'expédition chrétienne au royaume de la Chine, du père Trigault, qui relate le voyage de Matteo Ricci, date de 1617 ; une des premières grammaires chinoises, Elementa linguae tartaricae, de 1682. Ce sont pour la majorité des ouvrages de la Bibliothèque nationale de France, écrits en latin ou en français, ou traduits en français, ou bilingues français-chinois. Ils sont libres de droits, c'est-à-dire tombés dans le domaine public 70 ans après la mort de l'auteur. Ce corpus contient aussi des documents iconographiques -images, cartes, photographies- appartenant à différents départements de la BnF.

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