En cette fin de 18ème siècle et au début du 19ème, l’
ascension du
Pic du Midi , bien
cartographiée devient très prisée par de nombreuses personnalités scientifiques (naturalistes,
botanistes, jardiniers, médecins, ingénieurs) ou par de grands personnages de l’époque.
L’ascension par le col du Tourmalet est relativement aisée même si elle
demande une journée d’efforts. Chacun en revient
enthousiasmé par la
beauté des paysages et la pureté de l’air au sommet. Cet engouement est principalement initié par le
botaniste et géologue français
Louis Ramond de Carbonnières qui sert de
guide au cours de
trente-cinq excursions en quinze ans. En 1792, il relate sa vision du
Pic du Midi de Bagnères (sic) dans
Voyage et observations faites dans les Pyrénées […]. On lui doit aussi une des rares
cartes de la région.
Cependant, malgré ce plébiscite, aucune construction d’un observatoire n’est envisagée. Il faut attendre le milieu des années 1860 pour que ce projet renaisse, sous l’impulsion de
la Société Ramond, première société montagnarde créée en France et
fondée par des pyrénéistes : l’alpiniste et
cartographe irlandais
Charles Packe, le pasteur et géologue français
Emilien Frossard, le comte anglo-français
Henri Russell-Killough et le photographe anglais
Farnham Maxwell-Lyte.
Cette
société, dont l’idée émerge en 1864 autour d’une table de restaurant à
Bagnères de Bigorre est
reconnue officiellement en 1865 par le Ministère de l’intérieur. Elle rassemble de
nombreux membres venant de tout horizon professionnel et amoureux des Pyrénées, comme le géographe
Elysée Reclus, le journaliste et homme de lettre
Adolphe Joanne ou bien encore le docteur
Costallat qui joue un rôle essentiel dans l’
élaboration du projet de l’observatoire. La société reçoit aussi l’appui d’autres personnalités comme Sir John Hershell, fils de l’astronome William Hershell, constructeur d’un des premiers grands
télescopes de l’histoire.
A partir de 1870, les deux principaux acteurs de la mise en œuvre du projet sont le général en retraite
Charles du Bois Champion de Nansouty et l’ingénieur
Célestin-Xavier Vaussenat.
A partir de 1872, De Nansouty et Vaussenat sont chargés de présenter le projet aux français et d’effectuer les démarches administratives, politiques et financières afin de mettre en place une souscription publique et réunir le financement de la construction. Les deux hommes n’hésitent pas à engager leur propre fortune et reçoivent aussi l’aide de mécènes, comme le banquier et député Bischoffscheim, qui investissent dans la construction et les instruments scientifiques.
En attendant l’observatoire plus confortable, De Nansouty, un premier collaborateur, M.
Baylac, et un cuisinier vivront dans la
station Plantade dans des
conditions de vie minimales et précaires, surtout en hiver. Ils doivent parfois
redescendre dans la vallée, au péril de leurs vies, comme lors de l’hiver 1874, sous
l’effet d’une tempête qui détruit la porte, les volets et fenêtres de leur habitation.
Vaille que vaille, les travaux scientifiques continuent et prouvent leur utilité au niveau local, mais aussi régional : le 21 juin 1875, les
observations nivologiques et météorologiques du général De Nansouty sur la masse de neige et sa consistance et sur le sens des vents permettent d’
anticiper la grande inondation du bassin de la Garonne et de
l’Adour, rivière qui naît près du Pic du Midi. C’est Baylac qui porte l’alerte à pieds, bravant la tempête dans une nouvelle descente périlleuse ; dès lors une station télégraphique est envisagée et
installée en 1877 pour communiquer plus rapidement avec la vallée.
La construction de l’observatoire sera longue et très difficile. En effet, les porteurs ne peuvent effectuer la montée que de juillet à mi-octobre, afin d’éviter
la neige accumulée au sommet et dangereuse du fait des avalanches. Ce sont des
efforts humains et techniques considérables effectués sur un parcours très pentu avec 1 700 mètres de dénivelé. De plus le chargement est très lourd, ce qui rend l’ascension très lente et allonge donc le temps de la construction.
En dépit de ces contraintes, les premiers locaux et la plateforme des instruments sont opérationnels dès l’été 1880. L’installation finale se fait en octobre 1881 après avoir définitivement abandonné la station Plantade. De Nansouty fait installer des paratonnerres Buchin pour assurer la protection électrique contre les nombreux orages. L’observatoire communique à Bagnères de Bigorre des bulletins météorologiques quotidiens qui sont transmis ensuite dans les villages de la vallée. Une première coupole astronomique de 6 mètres et une salle méridienne sur une plate-forme de 8 à 10 mètres de côté sont érigées à proximité des habitations. Tout cela coûte fort cher. Afin de faire perdurer le site, il est nécessaire que l’Etat le rachète en 1882. Un souterrain de 24 mètres est construit en 1885-1886 entre les bâtiments d’habitation et la plateforme afin d’éviter de glisser l’hiver sur la terrasse verglacée qui les séparent. Durant vingt ans, les différentes installations, qui se construisent et se modernisent, permettent à de nombreux scientifiques d’effectuer leurs précieux travaux.
En 1907, l’astronome
Benjamin Baillaud fait installer le premier grand
télescope, un
équatorial double de 50 cm de diamètre, un des plus grands au monde. Il permet en 1909 d’établir que les
canaux de Mars, découverts par Percival Lowell, n’existent pas. Les
instruments de l’observatoire, à la pointe du progrès, vont lui permettre de développer grandement ses recherches
astronomiques, météorologiques ou
sismologiques. Ces recherches permettent des avancées dans des domaines aussi variés que
la météorologie pour l’aviation en montagne ou la
physique du globe. Un
jardin alpin, sous la direction du jardinier-botaniste Joseph Bouget, et une bibliothèque de 1300 volumes, complètent le site.
En 1922,
l’installation de la T.S.F est demandée par le Radio-Club des Hautes-Pyrénées, considérant indispensable la diffusion généralisée et quotidienne du bulletin météorologique au monde agricole et touristique. Côté équipement électrique, des groupes électrogènes constitués de moteurs à pétrole couplés à des
dynamos fournissent
l’éclairage depuis l’hiver 1911-1912. Il faut attendre 1949 pour que des fils électriques soient installés. Quant au
téléphérique permettant d’acheminer les matériels et les personnels durant toute l’année, le début de ses travaux est annoncé en 1942, alors qu’un
funiculaire devait voir le jour dès 1905. Il ne sera inauguré qu’en 1952. En attendant, le
ravitaillement peut se faire par des
mulets en été sur une partie du parcours ou uniquement par
des porteurs en hiver qui mettent huit heures à atteindre l’observatoire. Ce qui n’empêche nullement les
astronomes et savants, cloisonnés dans ces conditions, de continuer leurs
études du ciel, du
rayonnement cosmique et de réaliser de superbes
photographies des planètes, en profitant de la
rare pureté de l’air. Notons aussi que des études sont menées sur l’électricité atmosphérique et sur la
radioactivité dégagée par les sommets montagneux et s’accumulant dans les couches épaisses de neige.
Entre 1959 et 1962, les différentes activités,
astronomie météorologie, télévision et radiodiffusion sont regroupées dans le
centre TDF, construit durant ces trois ans. Ce centre est aussi appelé «bâtiment interministériel» car il est occupé par plusieurs instances officielles : la Navigation aérienne, le Ministère de l’intérieur et la Météorologie nationale. Le Pic du Midi possède aussi un
laboratoire de haute altitude dédié à la botanique et à la
biologie végétale ou à
l’étude des sols, en complément du jardin alpin. Malgré toutes les recherches menées dans ces différents domaines, durant les trente années suivantes,
l’observatoire vieillit et marque le pas de plus en plus, d’un point de vue technique et rentabilité financière. En 1993, l’Etat envisage sa fermeture pour 1998 après plus d’
un siècle d’existence. Afin de
le sauver, la région Midi-Pyrénées et ses acteurs se mobilisent et engagent la
rénovation des installations scientifiques. Le nouveau site s’ouvre en mai 2000. Il est accessible au
public qui doit s’acquitter d’un droit d’entrée, pour assurer ainsi une part du financement du fonctionnement du site. De nouvelles recherches scientifiques voient le jour : la physique de l’environnement, les sciences de la terre et physiologie.
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