Fêtes et plaisirs: un XVIIIe siècle des mœurs
Le XVIIIe siècle a laissé l'image d'un siècle des plaisirs. Les plaisirs de la chair, bien entendu, que les libertins cultivent dans leurs alcôves. Mais aussi ceux de l'esprit, auxquels s'adonnent les salonniers toujours en quête du mot pour rire.
Le XVIIIe siècle cultive la politesse et la civilité avec passion. Elles distinguent l'honnête homme de la brute et le rendent digne du plus grand des plaisirs : celui de le fréquenter et de converser avec lui. Cet idéal de distinction et de civilisation des mœurs, issu de la culture des élites, traverse les Lumières toutes entières.
Les grandes fêtes sont le symbole de l'hédonisme des Lumières. Qu'il s'agisse de cérémoniaux d'Etat, comme les sacres et couronnements, de réjouissances plus mondaines voire de célébrations populaires, elles ont contribué à donner au XVIIIe siècle l'image d'un siècle des plaisirs. Elles sont médiatisés par des images, des articles, des poèmes et des récits illustrés qui les ancrent dans la durée et en diffusent la mémoire.
À bien des égards, le XVIIIe siècle apparaît comme celui de l’avènement d'une première société de consommation. La production en nombre dans les ateliers et les manufactures rend accessibles de nombreux produits, tandis qu'une élévation du niveau de vie général de la population agrandit leur clientèle potentielle. Dans le même temps, l'essor de la mode et des premières formes de publicité renouvellent le rapport aux objets.
Au XVIIe siècle, on appelle « libertins » les libres-penseurs, qui s'éloignent du magistère intellectuel de l'Église. Au XVIIIe siècle, ce sens persiste mais se double d'un nouveau. À côté du libertinage d'esprit, apanage de quelques intellectuels, se répand un libertinage de mœurs. Ces libertins d'un genre nouveau prennent leurs distances avec les cadres de la morale dominante de l'Église et de la société.
Avec l'essor du Grand tour, le XVIIIe siècle voit naître un nouveau genre de voyageur : le touriste. La bonne société se prend de passion pour les séjours à l'étranger, à la campagne ou pour aller prendre les eaux. C'est l'occasion de voir le monde, de parfaire sa culture, de rencontrer les élites locales. Parmi les destinations favorites, l'Italie se taille la part du lion, toujours auréolée qu'elle est de son prestige historique et artistique. Pour autant, les voyages d'étude et de découverte sont loin de disparaître et connaissent même un nouveau succès.
Le 4 juillet 1776, la Déclaration d'indépendance américaine affirme le droit des hommes à la « poursuite du bonheur ». Dans ce geste, s'exprime en réalité une révolution intellectuelle qui a travaillé tout le siècle. Traditionnellement, le but affirmé de la vie terrestre était la quête de la salvation éternelle et de la félicité céleste. Le bonheur des révolutionnaires américains est au contraire bien terrestre: il est fait de joies privées, de succès économiques et d'une certaine forme de liberté politique. Avec cette nouvelle conception, c'est un premier individualisme et une première sécularisation de la société qui triomphent.