Le prix Albert-Londres de 1933 à 1950
La BnF accueille ce mois-ci la 83e édition du prix Albert-Londres, qui distingue chaque année trois jeunes reporters dans les catégories Presse écrite, Audiovisuel et Livre. En écho à cet événement, revenons sur l’origine de ce prix créé en 1933 et sur ses premiers lauréats.
Le prix Albert-Londres porte le nom d’un grand reporter de l’entre-deux-guerres qui a marqué la profession par ses reportages engagés. Le 17 mai 1932, tous les journaux annoncent le naufrage du Georges Philippar (La Liberté) près de la côte italienne des Somalis. Albert Londres fait partie des passagers. Son décès est confirmé quelques jours plus tard (La Liberté, 28 mai 1932).
L’année suivante, des proches du journaliste en accord avec sa famille décident, « pour maintenir vivant son souvenir » de « distribuer tous les ans un prix de cinq mille francs à un reporter professionnel jeune dont le talent et le caractère méritent d’être encouragés » (Comoedia, 30 octobre 1933). Le premier est attribué le 1er novembre, anniversaire de la naissance d’Albert Londres. Certains y voient une manœuvre destinée à « griller » le prix Gringoire (Comoedia, 26 octobre 1933)… Par la suite, il sera remis le 16 mai, date anniversaire de la catastrophe.
D’Émile Condroyer à Jacques Zimmermann
Émile Condroyer, Claude Blanchard et Stéphane Faugier
Le premier prix est décerné à Émile Condroyer (Le Petit Journal, 2 novembre 1933) pour ses reportages en mer, notamment en Islande, « L’Ermite de l’Atlantique : Islande, île morte », en Norvège et en Hollande « Des Fjords aux tulipes ».
En mai 1934, c’est au tour de Stéphane Faugier, rédacteur au journal Le Matin, d’être récompensé pour ses deux reportages « L’île des lézards géants » et « Chez les derniers moines russes ».
Le Monastère de Valamo in « Chez les derniers moines russes »
En 1935, Claude Blanchard reçoit le prix dans un restaurant de Montmartre (L’Indépendant des Pyrénées, 16 mai 1935). Un de ses reportages a été édité sous le titre « Du Kremlin au Vatican ».
Claude Blanchard, lauréat du prix, A. Londres : [photographie de presse] / Agence Meurisse
« Pour Le Quotidien, pour Le Petit Journal puis pour Le Petit Parisien, il visite l’Europe, l’Amérique, l’Abyssinie, prend part à la guerre du Yémen… » (Comoedia, 16 mai 1935). Il en ramène de nombreux articles, « Pour mieux comprendre les États-Unis », « La première journée à Addis-Abeba des fêtes du couronnement », ainsi qu’une expérience de scaphandrier « Une promenade au fond de la mer ». Il arpente également les quartiers de Paris, cette « étrange mosaïque humaine », « La rue Mouffetard », « Chez les truands de Saint Merri » et la province : Le Havre, Nantes, la crise de la soierie lyonnaise.
Jacques Zimmermann (L’Echo d’Alger, 6 février 1941)
Les lauréats des années suivantes sont Jean Botrot, rédacteur au Journal (La Dépêche de Brest, 17 mai 1936), Max Massot, auteur de « Au pays de l’or et du diamant », alors en reportage en Espagne (Le Grand Echo du Nord de la France, 20 mai 1937), et Jean-Gérard Fleury en 1938 (L’Ouest-Eclair, 17 mai), journaliste à Paris-Soir et passionné d’aviation. « Et quand nous aurons dit qu’il a volé avec Mermoz et effectué ses premiers vols de nuit avec Saint-Exupéry (Casa-Dakar), nous aurons résumé la carrière d’écrivain-volant de Jean-Gérard Fleury » (Le Journal, 17 mai 1938). En 1939, le prix est décerné à l’Alsacien Jacques Zimmermann (Le Figaro, 17 mai 1939) dont le dernier reportage « Les Tcherkesses du colonel Collet » est paru dans Paris Soir entre le 8 et le 13 avril 1939.
L’après-guerre
Le prix n’est pas attribué pendant la guerre. Sa reprise est annoncée le 31 mai 1945 dans le journal Ce soir pour l’année suivante. C’est Marcel Picard, auteur de J’étais un correspondant de guerre, qui l’obtient (L’Aurore, 1er novembre 1946).
Le 17 mai 1947, L’Aurore annonce « Dominique Pado prix Albert Londres ex-aequo avec André Blanchet », le premier pour ses reportages en Pologne et en Russie soviétiques dans L’Aurore, notamment « Zones interdites » en 1945 et « Russie de Staline » en 1947 ; le second pour ses reportages en Indochine, « Au pays des ballilas jaunes » dans Le Monde. Cette décision suscite l’ironie du Grelot (20 mai 1947),
C’est d’un air mi-figue mi-raisin que notre a(mi) Do(mi)nique Pado, lauréat de la moitié du prix Albert Londres a fait, sa moitié de chèque sous le bras, son entrée solennelle au Café des Deux-Magots.
En 1948, le prix est attribué à Pierre Voisin, journaliste au Figaro (Combat, 22 mai 1948) et auteur de «Ceux des chars » (Les Lettres et les arts, 12 août 1941) puis à Serge Bromberger, également journaliste au Figaro, le 16 mai 1949 (L’Aurore, 17 mai 1949).
Elle, 5 juin 1950
L’année 1950 voit enfin la première femme, Alix d’Unienville, (La Dépêche tunisienne, 18 mai 1950) récompensée pour son journal d’une hôtesse de l’air En vol . La Revue aéronautique de France (mars-avril 1950) en a publié des extraits. Ce reportage est paru dans le magazine Elle à partir du 14 novembre 1949.
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