Jugements et critiques
Victor Hugo
« Walter Scott a su puiser aux sources de la nature et de la vérité un genre inconnu, qui est nouveau parce qu'il se fait aussi ancien qu'il le veut. Walter Scott allie à la minutieuse exactitude des chroniques la majestueuse grandeur de l'histoire et l'intérêt pressant du roman; génie puissant et curieux qui devine le passé ; pinceau vrai qui trace un portrait fidèle d'après une ombre confuse, et nous force à reconnaître même ce que nous n'avons pas vu ; esprit flexible et solide qui s'empreint du cachet particulier de chaque siècle et de chaque pays, comme une cire molle, et conserve cette empreinte pour la postérité comme un bronze indélébile. »
(Sur Walter Scott, janvier 1823)
Stendhal
« Quel est l'ouvrage littéraire qui aie plus réussi en France depuis dix ans ? Les romans de Walter Scott ! Qu'est-ce que les romans de Walter Scott ? De la tragédie romantique, entremêlée de longues descriptions. »
(Racine et Shakspeare, 1823)
Augustin Thierry
« L'histoire de France ne manque point au talent des poètes et des romanciers ; mais il lui manque un homme de génie comme Walter Scott, qui la comprenne et qui sache la rendre. »
(Dix ans d'études historiques, 1835)
Chateaubriand
« L'illustre peintre de l'Écosse me semble avoir créé un genre faux ; il a, selon moi, perverti le roman et l'histoire : le romancier s'est mis à faire des romans historiques, et l'historien des histoires romanesques. […] Mais un des grands mérites de Walter Scott à mes yeux, c'est de pouvoir être mis entre les mains de tout le monde : il faut de plus grands efforts de talent pour intéresser en restant dans l'ordre, que pour plaire en passant toute mesure. »
(Essai sur la littérature anglaise, 1836)
Balzac
« Walter Scott élevait donc à la valeur philosophique de l’histoire le roman, cette littérature qui, de siècle en siècle, incruste d’immortels diamants la couronne poétique des pays où se cultivent les lettres. Il y mettait l’esprit des anciens temps, il y réunissait à la fois le drame, le dialogue, le portrait, le paysage, la description ; il y faisait entrer le merveilleux et le vrai, ces éléments de l’épopée, il y faisait coudoyer la poésie par la familiarité des plus humbles langages »
(Avant-propos de juillet 1842 dans La Pléiade, Comédie humaine, t.1, p.10)
Alfred de Vigny
« Je pensais que les romans historiques de Walter Scott étaient trop faciles à faire, en ce que l'action était placée dans des personnages inventés que l'on fait agir comme l'on veut, tandis qu'il passe de loin en loin à l'horizon une grande figure historique dont la présence accroît l'importance du livre et lui donne une date. »
(« Sur Cinq Mars », Journal d’un poète, 1867)
Sainte-Beuve
« De nos jours le génie de Walter Scott n'a-t-il pas suscité tout aussitôt le génie fraternel d'un Fenimore Cooper ? »
(Nouveaux lundis, t. 10, 1868)
Taine
« C'est chez Walter Scott que nous avons appris l'histoire. Et cependant est-ce de l'histoire ? Toutes ses peintures d'un passé lointain sont fausses. Les costumes, les paysages, les dehors sont seuls exacts ; actions, discours, sentiments, tout le reste est civilisé, embelli, arrangé à la moderne »
(Histoire de la littérature anglaise, t. 4, 1878)
Gustave Flaubert
« Bouvard n'en continua pas moins Walter Scott, mais finit par s'ennuyer de la répétition des mêmes effets. L'héroïne, ordinairement, vit à la campagne avec son père, et l'amoureux, un enfant volé, est rétabli dans ses droits et triomphe de ses rivaux. Il y a toujours un mendiant philosophe, un châtelain bourru, des jeunes filles pures, des valets facétieux et d'interminables dialogues, une pruderie bête, manque complet de profondeur. »
(Bouvard et Pecuchet, 1881)
Émile Zola
« Il est curieux de voir [Balzac] se passionner ainsi pour l'écrivain bourgeois, qui a traité l'histoire en romance. Walter Scott n'est qu'un arrangeur habile, et rien n'est moins vivant que son œuvre. »
(Les Romanciers naturalistes, 1881)
Barbey d’Aurevilly
« Walter Scott, l' immense conteur d' un temps où Shakespeare, s'il revenait au monde , prendrait la forme du roman, bien plus en harmonie avec toutes les exigences d' une pensée très civilisée, Walter Scott est fils de Shakespeare , et cela achève la gloire de Shakespeare. »
(XIXe siècle. Les œuvres et les hommes. Série 2, Littérature étrangère, 1890)