À propos de l’auteurCharles-Eloi Vial
Fille de Sophie Gay (1776-1855), elle-même brillante femme de lettres et salonnière réputée du Premier Empire, Delphine de Girardin grandit au milieu des écrivains, des artistes et des membres de la haute société aristocratique. Son prénom fut choisi par sa mère en l'honneur de Germaine de Staël, dont elle avait défendu le roman Delphine en 1802. Elle fait partie des premiers cercles romantiques, autour de Nodier ou Vigny. Jeune poète, elle publie deux recueils sous la Restauration avant de voyager en compagnie de sa mère en Italie, où elle se fait connaître comme une véritable femme de lettres à l’Académie romaine du Tibre, y gagnant le surnom de « la Dixième muse ». Elle est aussi une des figures en vue du Faubourg Saint-Germain, où vit la vieille aristocratie parisienne, celle qui soutient les Bourbons et semble parfois regretter la société d’Ancien Régime. Malgré la chute de Charles X en 1830, Delphine de Girardin conserve sa place au sein du Tout-Paris, tout en paraissant désapprouver le nouveau régime.
En 1831, elle épouse le journaliste Émile de Girardin, fils illégitime d'un général des armées napoléoniennes. Fondateur et directeur de plusieurs journaux à fort tirage, il est vite devenu une personnalité incontournable du Paris de la Monarchie de Juillet. Il révolutionne le monde de l’édition en fondant, en 1836, le journal La Presse, dont le prix excessivement bas est compensé par la présence de publicités. De 1836 à 1839, Delphine de Girardin publie ainsi, sous le pseudonyme de « vicomte de Launay », des chroniques pleines de verbe sur la vie mondaine de la capitale, qui parurent en 1843 sous forme de recueil. Elle y affirme sans ambages son opposition à la monarchie « bourgeoise » de Louis-Philippe et sa nostalgie de la dynastie légitime – le ton volontairement décalé du noble légitimiste confronté au spectacle d’une cour composée principalement de parvenus lui permettant de faire mieux ressortir les travers du régime et de ses partisans. Sa chronique est aussi une description minutieuse de la vie de la haute société de l’époque : la saison des bals, les premiers voyages au bord de mer, l’automne passé dans des châteaux à la campagne
Elle continue par ailleurs à écrire des poésies et des pièces de théâtre, tout en tenant un salon incontournable, où se croisent des grands noms de la littérature comme Balzac, Musset, Hugo, Lamartine, Dumas, Gautier, George Sand, des musiciens comme Liszt, et des figures de la bonne société comme la duchesse d'Abrantès. Elle écrit une nouvelle fantastique, La Canne de M. Balzac, un roman, Le Marquis de Pontanges, des contes comme L’Île des marmitons. Ses comédies comme La Joie fait peur ou Le chapeau d’un horloger connaissent un fort succès au début du Second Empire. Atteinte d’un cancer de l’estomac, elle meurt en 1855.