Titre : L'Avenir du Tarn : journal de l'Union républicaine ["puis" journal de la République réformatrice]...
Auteur : Union républicaine (France). Auteur du texte
Auteur : République réformatrice. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Castres)
Date d'édition : 1898-01-13
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32708776z
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 13 janvier 1898 13 janvier 1898
Description : 1898/01/13 (A19,FASC5397). 1898/01/13 (A19,FASC5397).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG81 Collection numérique : BIPFPIG81
Description : Collection numérique : BIPFPIG81 Collection numérique : BIPFPIG81
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t535244711
Source : Archives départementales du Tarn, PER 203
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 27/08/2023
Dix-àVuviAtïie année.
5597
Le i\:° 5 cent.
Jeudi i 5 Janvier i 898
JOURNAL DE LA REPUBLIQUE RÉFORMATRICE
PARAISSANT TOUS LES JOURS LE LUNDI EXCEPTÉ
TROIS MOIS
vl 5 >T l' S :
Tarn et départ, limitrop. 4 fr.
I es autres départements. 6 —
Les abonnements partent du 1er et du 15 de chaque mois.
six MOIS
3 fr.
11 —
UN AN
16 fr.
22 —
Rédaction et Administration
BUREAUX: PLACE PÉLISSON 12, A CASTRES
Imprimerie Ve VERDEIL.
INSERTIONS
Annonces légales.
Réclames .
Annonces .
la ligne. 20 cent.
» 50 »
» 40 «
A Paris, les annonces sont reçues dans toutes les Agences de
publicité, — à Castres, au bureau du journal.
Les insertions et les abonnements sont payables davance.
Castre* le 18 Janvier 1398
Candidature Officielle
11 parait que nous allons jouir, aux
prochaines élections générales, des
bienfaits de la candidature officielle.
Cela nous manquait.
Nous n'avons d'ailleurs pas lieu de
nous eu étonner, car nous avons déjà
eu le plaisir, dans toutes les élections
partielles, depuis que M. Méline pré¬
side à nos destinées, le plaisir de voir
les républicains, dits de gouvernement,
les ralliés et même les monarchistes,
s'unir de la façon la plus édifiante,
contre les vrais républicains, à la voix
des préfets et des évêques et sous la
haute inspiration de M. Barthou.
Toute la différence eutrela candida¬
ture officielle, telle qu'elle se pratique
aujourd'hui et la même candidature,
telle qu'elle était en usage sous les
régimes monarchistes qui ont précédé,
est certainement en faveur de ces der¬
niers.
Ils y mettaient une franchise que l'on
pouvait sans doute trouver odieuse,
mais qui l'était assurément beaucoup
moins que l'hypocrisie actuelle.
A part que maintenant l'on n'avoue
pas, le procédé est du reste toujours le
même. — simple modification de celui
qu'imagina Napoléon Ier et qu'il mit
en œuvre avec une maestria incompa¬
rable.
Après le 18 brumaire, le premier
consul consentit, un peu malgré lui, à
conserver les formes parlementaires.
Mais il se borna à conserver les formes,
quand au fond, on n'ignore pas qu'il
réunit et concentra en ses mains tous
les pouvoirs.
C'est au point que les membres du
Corps législatif étaient nommés par lui
sur une liste préparée par les notables
de chaque département, lesquels étaient
eux-mêmes soigneusement triés sur le
volet par les préfets consulaires ou
impériaux.
Celle précaution n'empêcha pas les
législateurs ainsi élus (?) de proclamer,
en 1814 et en 1815, la déchéance de
leur unique électeur.
Avec la Restauration et le rétablisse¬
ment du régime parlementaire, le pro¬
cédé fut moins brutal ; c'est alors que
commence réellement la pression offi¬
cielle sur les électeurs, pression qui se
continue de la même façon sous Louis-
Philippe.
Le cens réduisait alors considérable¬
ment le corps électoral ; il était d'au¬
tant plus facile d'agir sur lui par l'octroi
de faveurs et de privilèges de toute
sorte.
i Les fonctions, les bureaux de tabac,
les avancements administratifs, tout
était mis en œuvre et généralement avec
succès, pour maintenir dans la bonne
• voie les électeurs censitaires,
j D'autre part, les incompatibilités
entre le mandat législatif et les emplois
i publics étaient si peu nombreuses que,
' vers la fin du régime de Juillet, plus de
la moitié des députés étaient fonclion-
: naires.
I Et cependant telle est la force inhé-
; rente au principe électif, que l'opposi¬
tion de 1830 fut assez forte pour jeter
i à bas le trône de Charles X, et que la
majorité de 1848 fut trop faible pour
empêcher la chute de la branche
cadette.
FEUILLETON DE VAVENIR DU'TARN
— 6 —
LlilS
PAR
]PauLl iVIalialin
—»o3o«—
PROLOGUE
V
La passerelte
Encore de fameux cadets les citoyens mai¬
res de Saiot-Pierre de Bourrou et de MoDtiguy
lis De m'oul pas seulement offert un cbanleau
de pain et une chopine de piquette. De sorte
que si l'extérieur est trempé comme uue sou-
,pe, l'ibtérieor est sec comme une pierre, à
fusil et vide comme les coffres de la Répu
blique.
Puis s'ioterrompant brusquement ;
— Ah çà I interrogea Beaupoil, je t'y a'
*
* *
La seconde République qui avait
proclamé le suffrage universel se garda
bien de le tenir en lisières ; mais
comme l'Empire se rattrapa 1
Sous le prétexte hautement avoué
que l'empereur était la plus exacte
représentation de la démocratie, il
s'arrogea le droit de diriger le suffrage
universel, de lui indiquer ses choix et,
au besoin, de les lui imposer.
laissé, toi, hier citoyen meunier, au marché
de Moret ; est-ce qu'il s'y serait passé quelque
chose d'extraordinaire après mon départ.
— Je ue crois pas. Je n'ai rien vu. On a
riéD enteudu dire.
Le brigadier reprit le fils de son discours,
sans avoir l'ait de preodre garde a la détresse
de son interlocuteur :
— Pours lors, je me suis dit en sortant de
Nemours :
Le joli Meuuier est ud gai luroo, uu franc
buveur, un gaillard qui sait vivre ; il ne re¬
fusera pas uu verre de picheuet à uu brave
garçon qui ne l'a jamais molesté et qui a enco¬
re cinq lieues à trimer pour réintégrer le ca¬
sernement. Là-dessus, j'ai coupé au milieu des
champs, pour ne pas rebrousser à travers la
ville ; J'ai attaché AlmaDZor — c'est mon Bu-
céphale — à uu saule sur le bord de la rivière
j'ai eofiié la passerelle, j'ai poussé la porte-
fenêtre et me voilà... A propos faudrait pour¬
tant voir à la faire réparer la passerelle : elle
branle comme une dent de vieille femme, et
j'ai failli tomber avec elle dans le Loing tout à
l'heure. C'est moi qui n'aurais pas été
coûtent de mettre de l'eau dans mon viu avant
de le boire.
Beaupoil parlait d'un ton si naturel et
si jovial que la contenance et la voix de
François se raffermissaient de plus en plus.
— Soyez le bienvenu brigadier fit-il,
Puis à la jeuue fille.
— Fais-oous de la clarté, Jeaonette, et don-
ne-Dous uue bouteille.
La Liégeart obéit.
La candidature officielle fut considé¬
rée comme un droit et un devoir du
gouvernement. Celui ci désignait les
candidats qu'il proposait à l'obéissance
des populations ; les préfets les recom¬
mandaient ouvertement au moyen des
affiches blanches, réservées à l'admi¬
nistration, et tous les fonctionnaires de
l'Etat, des déparlements et des com¬
munes, chefs de service et surnumérai¬
res, maires et gardes champêtres,
curés et instituteurs devaient marcher
et marchaient comme un seul homme.
Tout ce déploiement de force, aidé
d'une inséparable corruption, aboutit
néanmoins, à mesure que s'émancipait
le suffrage universel, à une diminution
progressive des députés officiels, si
bien que l'Empire, à la veille d'être
débordé par l'opposition, dut recourir
au plébisciste qui hâta son effondre¬
ment.
Malheureusement la France en paya
les frais.
¥
★ ★
Or, voilà ce que l'on tente de recom¬
mencer en ce moment, quand vingt-
six ans de République ont habitué les
électeurs à la liberté et à l'indépendance
du suffrage.
Les préfets, appelés à Paris, reçoivent
des instructions secrètes qu'ils trans¬
mettent à leurs subordonnés ; tous les
moyens sont mis en œuvre pour exer¬
cer sur les électeurs la pression des
influences, des promesses ou de la
peur.
Les candidats agréables sont recrutés
de toute part, et partout est évidente la
complicité des faux républicains qui
nous gouvernent, de la haute finance
et de toutes les réactions.
On n osera peut-être pas, et qui sait ?
recourir à l'affiche blanche ; mais à
part ce privilège impérial on déploiera
toutes les ressources qui ont si peu
servi au hommes du 16 mai.
Et je crois bien qu'on arrivera au
— Maintenant, va le coucher, mignonne.
Et, taudis que Beaupoil faisait sécher ses
bottes devant le foyer, le meuuier se pencha
à l'oreille de la paysanne.
— Tiens-toi prête, nous décampons aussitôt
que ce vilain oiseau aura pris sa volée.
Jeanne lui répondit par un clignement
d'yeux d'iutelligeDce, et monta lestement l'es¬
calier qui conduisait à sa chambre, après avoir
plaoé sur la table une chandelle allumée, des
verres et un flacon.
— A la bonne heure I s'écria en se relevant
Beaupoil, qui s'était uu instant vers le feu
comme pour se chauffer les mains à la bonne
heure ! Vive la lumière I j'aime [à voir avec
qui je bois.
— Et moi aussi, ajouta le meunier.
Les deux hommes se regardèrent. Le gen¬
darme souriait à la bouteille. Le paysan avait
fait des efforts surhumains pour paraître calme
et il y était parvenu.
— Tiens reprit le premier, tu vas en voyage
mon hôte.
— Pourquoi cela ?
— Dame I puisque tu fais ton sac.
Le brigadier désignait la valise.
— C'est vrai, je vais demain à Montargis
acheter une meule.
Ce disant, Breton déboucha la bouteille et
remplit les verres.
— Goûtez ■ moi ça, mon camarade, c'est
du chenu, du vieux "de derrière les fagots.
Beaupoil ne bougea pas.
— Eh bien ! demanda le meunier qui ve-
même résultat. La République n'est
plus une mineure.
(Vêtit Méridional), G. COLLINE.
L'AFFAIRE ESTË1U1AZV
L'affaire Esterhazy se poursuit de¬
vant le Conseil de guerre.
L'audition des témoins [terminée. Le
commandant Hervieu. commissaire du
gouvernement commence son réquisi¬
toire.
Le réquisitoire du commissaire du
gouvernement a été très bref.
A 6 heures, M* Tézenas a pris la
parole pour présenter la défense du
commandant Esterhazy.
La Sentence
« Au nom du peuple français, ce
jourd'hui, 11 janvier 1898, le premier
conseil de guerre du gouvernement
militaire de Paris, délibérant à huis
clos.
«Le président a posé la question
suivante :
« Le nommé Marie-Charles Ferdi¬
nand Walsin-Esterhazy est il coapable
d'avoir provoqué des machinations ou
entretenu des intelligences avec une
puissance étrangère ou avec ses agents
pour les engager â entreprendre la
guerre avec la France ou pour .lui en
procurer les moyens, crime prévu et
puni par les articles É et 76 du code
pénal et 189 et 267 et 30% du code de
justice militaire, l'article 7 de la loi du
8 octobre 1830, l'article 5 de la Cons¬
titution du 4 novembre 1848, l'article
1 de la loi du 8 juillet 1850.
« Les voix recueillies séparément et
en commençant par le grade inférieur,
le président ayant émis son opinion le
dernier.
« Le conseil de guerre déclare, â
l'unanimité , que Walsin-Esterhazy
n'est pas coupable.
□ait de choquer son verre contre celui da
son convive ; eh bien 1 vous ne iriuquez pas ?
Une inquiétude soupçonneuse pesa sur sa
physionomie.
— Je ue saurais boire sans manger, répartit
tranquillement son interlocuteur. Y a-t-il
moyeu d'euvoyer uqo bouché en avaot-
garde.
— Qu'à cela ue tienne : voilà la miche.
— Merci passe-moi donc un couteau à pré¬
sent. Je ne puis pas me tailler uue mouillette
avec mon sabre.
Puis comme François Breton se dirigeait
vers le buffet.
— Eh I compère ce D'est pas la peine de
déranger loû argenterie ! lu dois avoir ton eu-
tache sur toi ?
Le meunier fit un mouvemeut pour se fouil¬
ler. SoudaiQ sa figure se contracta violem¬
ment.
— Tu ne trouves pas ton couteau ? interro¬
gea Beaupoil:
— Je ue sais pas. Je l'ai perdu. Je l'aurai
laissé tomber.
Le brigadier allongea l'index
— C'est ma foi, vrai. N'est-ce pas celui
que j'aperçois là-bas, dans les cendres, près
de l'âlre ?
Uu soupir de soulagement rauque, comme
un hoquet de soufflet de forge, souleva la poi-
trme du paysan. Il se baissa avec une sorte
de rage et ramassa le couteau. Mais il le con¬
serva entre ses doigts crispés et le couvant du
regard :
i
5597
Le i\:° 5 cent.
Jeudi i 5 Janvier i 898
JOURNAL DE LA REPUBLIQUE RÉFORMATRICE
PARAISSANT TOUS LES JOURS LE LUNDI EXCEPTÉ
TROIS MOIS
vl 5 >T l' S :
Tarn et départ, limitrop. 4 fr.
I es autres départements. 6 —
Les abonnements partent du 1er et du 15 de chaque mois.
six MOIS
3 fr.
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UN AN
16 fr.
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publicité, — à Castres, au bureau du journal.
Les insertions et les abonnements sont payables davance.
Castre* le 18 Janvier 1398
Candidature Officielle
11 parait que nous allons jouir, aux
prochaines élections générales, des
bienfaits de la candidature officielle.
Cela nous manquait.
Nous n'avons d'ailleurs pas lieu de
nous eu étonner, car nous avons déjà
eu le plaisir, dans toutes les élections
partielles, depuis que M. Méline pré¬
side à nos destinées, le plaisir de voir
les républicains, dits de gouvernement,
les ralliés et même les monarchistes,
s'unir de la façon la plus édifiante,
contre les vrais républicains, à la voix
des préfets et des évêques et sous la
haute inspiration de M. Barthou.
Toute la différence eutrela candida¬
ture officielle, telle qu'elle se pratique
aujourd'hui et la même candidature,
telle qu'elle était en usage sous les
régimes monarchistes qui ont précédé,
est certainement en faveur de ces der¬
niers.
Ils y mettaient une franchise que l'on
pouvait sans doute trouver odieuse,
mais qui l'était assurément beaucoup
moins que l'hypocrisie actuelle.
A part que maintenant l'on n'avoue
pas, le procédé est du reste toujours le
même. — simple modification de celui
qu'imagina Napoléon Ier et qu'il mit
en œuvre avec une maestria incompa¬
rable.
Après le 18 brumaire, le premier
consul consentit, un peu malgré lui, à
conserver les formes parlementaires.
Mais il se borna à conserver les formes,
quand au fond, on n'ignore pas qu'il
réunit et concentra en ses mains tous
les pouvoirs.
C'est au point que les membres du
Corps législatif étaient nommés par lui
sur une liste préparée par les notables
de chaque département, lesquels étaient
eux-mêmes soigneusement triés sur le
volet par les préfets consulaires ou
impériaux.
Celle précaution n'empêcha pas les
législateurs ainsi élus (?) de proclamer,
en 1814 et en 1815, la déchéance de
leur unique électeur.
Avec la Restauration et le rétablisse¬
ment du régime parlementaire, le pro¬
cédé fut moins brutal ; c'est alors que
commence réellement la pression offi¬
cielle sur les électeurs, pression qui se
continue de la même façon sous Louis-
Philippe.
Le cens réduisait alors considérable¬
ment le corps électoral ; il était d'au¬
tant plus facile d'agir sur lui par l'octroi
de faveurs et de privilèges de toute
sorte.
i Les fonctions, les bureaux de tabac,
les avancements administratifs, tout
était mis en œuvre et généralement avec
succès, pour maintenir dans la bonne
• voie les électeurs censitaires,
j D'autre part, les incompatibilités
entre le mandat législatif et les emplois
i publics étaient si peu nombreuses que,
' vers la fin du régime de Juillet, plus de
la moitié des députés étaient fonclion-
: naires.
I Et cependant telle est la force inhé-
; rente au principe électif, que l'opposi¬
tion de 1830 fut assez forte pour jeter
i à bas le trône de Charles X, et que la
majorité de 1848 fut trop faible pour
empêcher la chute de la branche
cadette.
FEUILLETON DE VAVENIR DU'TARN
— 6 —
LlilS
PAR
]PauLl iVIalialin
—»o3o«—
PROLOGUE
V
La passerelte
Encore de fameux cadets les citoyens mai¬
res de Saiot-Pierre de Bourrou et de MoDtiguy
lis De m'oul pas seulement offert un cbanleau
de pain et une chopine de piquette. De sorte
que si l'extérieur est trempé comme uue sou-
,pe, l'ibtérieor est sec comme une pierre, à
fusil et vide comme les coffres de la Répu
blique.
Puis s'ioterrompant brusquement ;
— Ah çà I interrogea Beaupoil, je t'y a'
*
* *
La seconde République qui avait
proclamé le suffrage universel se garda
bien de le tenir en lisières ; mais
comme l'Empire se rattrapa 1
Sous le prétexte hautement avoué
que l'empereur était la plus exacte
représentation de la démocratie, il
s'arrogea le droit de diriger le suffrage
universel, de lui indiquer ses choix et,
au besoin, de les lui imposer.
laissé, toi, hier citoyen meunier, au marché
de Moret ; est-ce qu'il s'y serait passé quelque
chose d'extraordinaire après mon départ.
— Je ue crois pas. Je n'ai rien vu. On a
riéD enteudu dire.
Le brigadier reprit le fils de son discours,
sans avoir l'ait de preodre garde a la détresse
de son interlocuteur :
— Pours lors, je me suis dit en sortant de
Nemours :
Le joli Meuuier est ud gai luroo, uu franc
buveur, un gaillard qui sait vivre ; il ne re¬
fusera pas uu verre de picheuet à uu brave
garçon qui ne l'a jamais molesté et qui a enco¬
re cinq lieues à trimer pour réintégrer le ca¬
sernement. Là-dessus, j'ai coupé au milieu des
champs, pour ne pas rebrousser à travers la
ville ; J'ai attaché AlmaDZor — c'est mon Bu-
céphale — à uu saule sur le bord de la rivière
j'ai eofiié la passerelle, j'ai poussé la porte-
fenêtre et me voilà... A propos faudrait pour¬
tant voir à la faire réparer la passerelle : elle
branle comme une dent de vieille femme, et
j'ai failli tomber avec elle dans le Loing tout à
l'heure. C'est moi qui n'aurais pas été
coûtent de mettre de l'eau dans mon viu avant
de le boire.
Beaupoil parlait d'un ton si naturel et
si jovial que la contenance et la voix de
François se raffermissaient de plus en plus.
— Soyez le bienvenu brigadier fit-il,
Puis à la jeuue fille.
— Fais-oous de la clarté, Jeaonette, et don-
ne-Dous uue bouteille.
La Liégeart obéit.
La candidature officielle fut considé¬
rée comme un droit et un devoir du
gouvernement. Celui ci désignait les
candidats qu'il proposait à l'obéissance
des populations ; les préfets les recom¬
mandaient ouvertement au moyen des
affiches blanches, réservées à l'admi¬
nistration, et tous les fonctionnaires de
l'Etat, des déparlements et des com¬
munes, chefs de service et surnumérai¬
res, maires et gardes champêtres,
curés et instituteurs devaient marcher
et marchaient comme un seul homme.
Tout ce déploiement de force, aidé
d'une inséparable corruption, aboutit
néanmoins, à mesure que s'émancipait
le suffrage universel, à une diminution
progressive des députés officiels, si
bien que l'Empire, à la veille d'être
débordé par l'opposition, dut recourir
au plébisciste qui hâta son effondre¬
ment.
Malheureusement la France en paya
les frais.
¥
★ ★
Or, voilà ce que l'on tente de recom¬
mencer en ce moment, quand vingt-
six ans de République ont habitué les
électeurs à la liberté et à l'indépendance
du suffrage.
Les préfets, appelés à Paris, reçoivent
des instructions secrètes qu'ils trans¬
mettent à leurs subordonnés ; tous les
moyens sont mis en œuvre pour exer¬
cer sur les électeurs la pression des
influences, des promesses ou de la
peur.
Les candidats agréables sont recrutés
de toute part, et partout est évidente la
complicité des faux républicains qui
nous gouvernent, de la haute finance
et de toutes les réactions.
On n osera peut-être pas, et qui sait ?
recourir à l'affiche blanche ; mais à
part ce privilège impérial on déploiera
toutes les ressources qui ont si peu
servi au hommes du 16 mai.
Et je crois bien qu'on arrivera au
— Maintenant, va le coucher, mignonne.
Et, taudis que Beaupoil faisait sécher ses
bottes devant le foyer, le meuuier se pencha
à l'oreille de la paysanne.
— Tiens-toi prête, nous décampons aussitôt
que ce vilain oiseau aura pris sa volée.
Jeanne lui répondit par un clignement
d'yeux d'iutelligeDce, et monta lestement l'es¬
calier qui conduisait à sa chambre, après avoir
plaoé sur la table une chandelle allumée, des
verres et un flacon.
— A la bonne heure I s'écria en se relevant
Beaupoil, qui s'était uu instant vers le feu
comme pour se chauffer les mains à la bonne
heure ! Vive la lumière I j'aime [à voir avec
qui je bois.
— Et moi aussi, ajouta le meunier.
Les deux hommes se regardèrent. Le gen¬
darme souriait à la bouteille. Le paysan avait
fait des efforts surhumains pour paraître calme
et il y était parvenu.
— Tiens reprit le premier, tu vas en voyage
mon hôte.
— Pourquoi cela ?
— Dame I puisque tu fais ton sac.
Le brigadier désignait la valise.
— C'est vrai, je vais demain à Montargis
acheter une meule.
Ce disant, Breton déboucha la bouteille et
remplit les verres.
— Goûtez ■ moi ça, mon camarade, c'est
du chenu, du vieux "de derrière les fagots.
Beaupoil ne bougea pas.
— Eh bien ! demanda le meunier qui ve-
même résultat. La République n'est
plus une mineure.
(Vêtit Méridional), G. COLLINE.
L'AFFAIRE ESTË1U1AZV
L'affaire Esterhazy se poursuit de¬
vant le Conseil de guerre.
L'audition des témoins [terminée. Le
commandant Hervieu. commissaire du
gouvernement commence son réquisi¬
toire.
Le réquisitoire du commissaire du
gouvernement a été très bref.
A 6 heures, M* Tézenas a pris la
parole pour présenter la défense du
commandant Esterhazy.
La Sentence
« Au nom du peuple français, ce
jourd'hui, 11 janvier 1898, le premier
conseil de guerre du gouvernement
militaire de Paris, délibérant à huis
clos.
«Le président a posé la question
suivante :
« Le nommé Marie-Charles Ferdi¬
nand Walsin-Esterhazy est il coapable
d'avoir provoqué des machinations ou
entretenu des intelligences avec une
puissance étrangère ou avec ses agents
pour les engager â entreprendre la
guerre avec la France ou pour .lui en
procurer les moyens, crime prévu et
puni par les articles É et 76 du code
pénal et 189 et 267 et 30% du code de
justice militaire, l'article 7 de la loi du
8 octobre 1830, l'article 5 de la Cons¬
titution du 4 novembre 1848, l'article
1 de la loi du 8 juillet 1850.
« Les voix recueillies séparément et
en commençant par le grade inférieur,
le président ayant émis son opinion le
dernier.
« Le conseil de guerre déclare, â
l'unanimité , que Walsin-Esterhazy
n'est pas coupable.
□ait de choquer son verre contre celui da
son convive ; eh bien 1 vous ne iriuquez pas ?
Une inquiétude soupçonneuse pesa sur sa
physionomie.
— Je ue saurais boire sans manger, répartit
tranquillement son interlocuteur. Y a-t-il
moyeu d'euvoyer uqo bouché en avaot-
garde.
— Qu'à cela ue tienne : voilà la miche.
— Merci passe-moi donc un couteau à pré¬
sent. Je ne puis pas me tailler uue mouillette
avec mon sabre.
Puis comme François Breton se dirigeait
vers le buffet.
— Eh I compère ce D'est pas la peine de
déranger loû argenterie ! lu dois avoir ton eu-
tache sur toi ?
Le meunier fit un mouvemeut pour se fouil¬
ler. SoudaiQ sa figure se contracta violem¬
ment.
— Tu ne trouves pas ton couteau ? interro¬
gea Beaupoil:
— Je ue sais pas. Je l'ai perdu. Je l'aurai
laissé tomber.
Le brigadier allongea l'index
— C'est ma foi, vrai. N'est-ce pas celui
que j'aperçois là-bas, dans les cendres, près
de l'âlre ?
Uu soupir de soulagement rauque, comme
un hoquet de soufflet de forge, souleva la poi-
trme du paysan. Il se baissa avec une sorte
de rage et ramassa le couteau. Mais il le con¬
serva entre ses doigts crispés et le couvant du
regard :
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