Titre : L'Avenir du Tarn : journal de l'Union républicaine ["puis" journal de la République réformatrice]...
Auteur : Union républicaine (France). Auteur du texte
Auteur : République réformatrice. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Castres)
Date d'édition : 1898-01-19
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32708776z
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 19 janvier 1898 19 janvier 1898
Description : 1898/01/19 (A19,FASC5602). 1898/01/19 (A19,FASC5602).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG81 Collection numérique : BIPFPIG81
Description : Collection numérique : BIPFPIG81 Collection numérique : BIPFPIG81
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t535198723
Source : Archives départementales du Tarn, PER 203
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 20/08/2023
Oix-Xeirvi^me année. — L\° 5602
Le i\° 5 cent.
Mercredi 19 Janvier 1898
i
I
II .
JOURNAL DE LA RÉPUBLIQUE RÉFORMATRICE
PARAISSANT TOUS LES JOURS LE LUNDI EXCEPTÉ
TROIS MOIS
)NÎ< 3 M r s
Tarn et départ, limitrop
I es autres départements.
Les abonnements partent du 1
six MOIS
un an
4 fr.
6 —
3 fr. 16 fr.
11 — 22 —
«r et du 15 de chaque mois.
Rédaction et Administration
BUREAUX: PLACE PÉLISSON 12, A CASTRES
Imprimerie Vve VERDEIL.
INSERTIONS
Annonces légales.
Réclames .
Annonces .
la ligne. 20 cent.
» 50 »
» 40 «
A Paris, les annonces sont reçues dans toutes les Agences de
publicité, — à Castres, au bureau du journal. .
Les insertions et les abonnements sont payables davance.
Castre, le & S Janvier I S»S
Une Vieille olonie
De toutes nos colonie, il n'y en a pas
une qui ail autant partagé les vic.issitu
des politiques de la mère pairie que
l'île de la Réunion. Chaque année sur
git d>j la mêlée des discussions parle¬
mentaires comme un sphinx vivant. Que
de fois ne l'a-t on pas accusée de
uoûier ch^r au Trésor métropolilain?
Encore aujourd'hui, il faui liquider
les comptes de son chemin de fer, et la
domauialité de ses rivages soulève les
controverses dès jurisconsultes. Mais
n'y a t il pas quelque velléité d'ingrati¬
tude dans ces récriminations plus ou
moins fondées t
L'île a heureusement des défenseurs
éloquents; mais ce qui répond non
moins victorieusement pour elle, c'est
son passé, c'est l'ancienneté et la fer
mêlé du lien qui l'unit à la France,
c'est son incomparable beauté, c'est la
richesse inépuisable de ses terres et de
ses eaux.
Je crois bien que les Français de
Pronis a été le premier colon de la
Réunion. Il en envoyait à 1646, au
nom de la Compagnie des Indes quel¬
ques compatriotes révoltés qui firent
souche.
Il y avait à peine un siècle et demi
que les Portugais l'avaient découverte
lui donnant le nom de leur capitaine :
Mascarenhas . mais la délaissaient; elle
ne renfermaient ni un homme ni un
quadrupède . Flacourt, sept ans après
en prenait possession pour la France.
Elle s'appella alors l'île Bourbon et elle
fut connue universellement sous ce
vocable.
Ce qui fut fait par la politique des
rois de France pour créer le noyau de
celte population accuse une prévoyance
et une ténacité qui ne se démentirent
jamais On y expédia des ouvriers de
FEUILLETON DE L'AVENIR DU TARN
— 11 —
Paul
PAR
HVIalialin
—»o3OJ—
V V ...
. .PREMIERE PARTIE
LA RECHERCHE DE L'INCONNU
II
Les deux revues
Celte peinture, étrangère à l'Académie des
Beaux-Arts, avait la prétention de représenter
Adam et Eve dans le paradis. Au bas on
lisait :
:».U9i;!ût>b j4«J î
Aux premiers sans culottes
Le cabaret avait one allée sur la rue. Le
muscadin se glissa dans ce boyau, sortit une
clef de sou gousset, ouvrit une porle et péné¬
tra dans un cabinet sombre, séparé de la
choix et on les y établit. On leur adres¬
sa des jeunes filles, des orphelines
pour les marier.
C'est avec ce sang frauçais que se
fondèrent les premières familles.
Mais celle société naissante ou trans
plantée n'aurait peut être pas duré si
un élément nouveau n'élait venu la
féconder, l'a'tacher au sol. l'enrichir,
et cet élément fut le café. Dès qu'il y
fut introduit d'Arabie en 1718, la fortu
ne avec lui se leva sur ce sol désert.
C'est qu'en effet la nature n'attendait
que l'arrivée de l'homme pour s'épa
nouir dans toutes ces merveilles. Pour -
vue d'eaux abondantes, — elle ne
compte pas moins de 107 rivières qui
descendent au rivage, — rafraîchie par
les brises de la mer des Indes, elle
défie les ardeurs des tropiques, et la
température normale dont elle jouit ne
dépasse pas vingt cinq degrés centi¬
grades. Sous ce ciel dont la douceur
égale la purelé, la vie se passe comme
un rêve . Un effort léger suffit pour
tirer de la terre tout ce qu'on lui de¬
mande. Le sucre le dispute au café.
Quand le gouverneur Poivre y importa
les épices des îles Molusques elles y
fleurirent comme par enchantement.
La France était fière des produits
toujours plus précieux et plus renom¬
més de cette île de prédilection. Quand
Madagascar se dérobait à son étreinte,
l'île Bourbon lui demeurait acquise.
Il fallut les guerres du premier Em
pire, les interminables luttes maritimes
avec l'Angleterre, pour la faire de nos
mains en 1810. Mais sa puissante
vitalité la défendit contre les outrages
de ces spoliateurs passagers. L'Europe
nous la rendait par le traité de Paris du
30 mai 1814. Naturellement elle s'est
dénommée l'île Bonaparte pendant au
moins dix ans, subissant le contre coup
de nos catastrophes nationales, et elle
redevenait l'ile Bourbon pour recouvrer
en 1848 le litre que la Révolution lui
avait donné et qu'elle n'a plus quit¬
té.
Ce fut une période grave aiguë pour
salle des buveurs par une cloison doot les vi¬
tres avaieol été soigneusement barbouillés de
blanc d'espagge.
Un ample carrick et une demi-douzaine de
collets était jetés sur un escabeau.
— A ma toilette, murmura le musca¬
din.
Il endossa bq un tour de main cette capara-
ce, qui recouvrit absolument ses habits d'in¬
croyable, et tira de dessous son gilet un mas¬
que de velours noir qu'il appliqua sur sou
visage. Il se penchi ensuite et mit l'œil à uu
trou pratiqué dans le rideau économique de la
cloison.
Dans la salle au milieu de la buée des pipes
une douzaine d'hommes, apparlenant à ia pi¬
re espèce des batteurs du pavé, buvaient et
regardaient jouer. Le cabaretier allait et ve¬
nait de table eu table; c'était le citoyen Cade-
nette, un drôle, long, maigre, jaune de temt
et de cheveux, la figure plate, le regard insi¬
gnifiant, moitié normand, moitié auvergnat, et
cachant tout un formidable arsenal de coqui-
neries parisiennes sous une épaisse couche
d'innnooence.
Le ci devant marquis frappa trois légers
coups contre la vitre. A| ce signal, màl-
tre Gadeuette sortit précipitamment par la por
le de la rue, prit l'allée et entra dans le ca¬
binet.
— Et nos gars ? demanda le musca¬
din.
— Ils sont là.
— Des bons î
— Des Parisiens. Ça n'a pes de mine,
l'ancienne Mascareigne, que l'émanci-
palion des esclaves. Les grands do¬
maines, toutes les propriétés de l'île se
virent menacés de perdre la mai-
d'oeuvre qui les exploitait.
Ce n'est pas que le régime appliqué
aux noirs fut inclément . Us étaient
traités avec la plus fraternelle humanité
Mais enthousiasmés et jetés hors d'eux
mêmes par cet affranchissement inat¬
tendu, ils abandonnèrent soudain tou¬
tes les plantations. Le pays aurait
succombé daus cette crise terrible si la
vieille énergie française n'était allée
quérir d^s travailleurs dans les Indes.
l'a construite sans marchander . Elle a
été inaugurée en 1882. Partant de
Saint Pierre, elle aboutit à l'autre ex¬
trémité, à St. Benoit, en passant par
Saint-Denis. Elle a 126 kilomètres de
longueur. Mais les résultats r/ont pas
encore été à la hauteur des sacrifices
consentis.
Le caractère accidenté du sol a pro •
voqué un dépassement des devis pri¬
mitifs . On croyait ne dépenser que 38
millions, on en a dépensé plus de 64,
dont 51,400,000 francs représentent la
part de l'Etat. Ce prélèvement a paru
lourd. Le service des obligations coûte
On se remit à l'œuvre avec une ardeur | 2 millions 1[2 par année, et c'est là ce
d'autant plus grande, et la Réunion j qui constitne la charge principale de la
doubla en quelques années l'étendue métropole.
de ses cultures dont le revenu, en 1856 j Mais chaque année aussi, la situation
était monté de 12 millions à 23 mil- j s'am îliore. En 1895, les recettes ont
lions de francs. j couvert le, dépendes. 11 y o même eu
Je donne ce chiffre afin de montrer un bénéfice de 40,954 francs sur les
de quel élan sont capables ces insulai- ! frais d'exploitation, alors que l'année
res qui ont an plus haut degré la notion ; précédente, le déficit s'était élevé à
de l'autonomie locale, qui aiment pas- j 400797 francs.
sio nément leur terre, et qui la prônent j L'augmentation est sensible. Elle
avec une fierté jalouse. ! permet légitimement d'espérer qu'un
Sur celte superficie de 260,000 hec¬
tares seulement, avec leurs 267 kilomè¬
tres de côtes, devant 1 es fougères ma¬
gnifiques de leurs montagnes et de
leurs vallées s'abaissant vers la mer, les
Bourbonnais goûtent à la fcis le bon¬
heur de vivre et la liberté. Tout leur
est à souhait . Ils sont à 1,770 lieues
de Marseille et à 180 lieues à l'est de
celte île superbe de Madagascar au¬
jourd'hui définitivement gardée par
notre drapeau, si éblouissante qu'on
serait tenté d'y oublier la grande pa¬
trie.
Longtemps, cependant, les moyens
de circulation lui ont manqué. Aucune
route ne l'enveloppait ; maintenant le
littoral est desservi par une large
avenir prochain procurera au chemin
de fer les moyens de payer intégrale¬
ment les obligataires. Aussi cherche t
on à faire valoir toutes les branches de
trafic qui peuvent être légalement et
raisonnablement utilisées.
Il s'est rencontré des détracteurs de
l'esprit bourbonnais pour le taxer d'é-
goïsme . Il voudrait, d'après eux, que
la métropole s'imposât à perpétuité l'en
tretien de son railway. C'est en semant
ces injustes accusations que l'on blesse
en leurs fibres les plus délicates nos
frères d'outre mer qui ne demandent
qu'à contribuer au soulagement et à la
grandeur de la patrie.
On oublie que pendant de longues
années, la Réunion n'a reçu aucune
chaussée de 232 kilomètres qui en fait subvention de la métropole et que avec
le tour. | ses seuls impôts, elle a fait face à ses
La République a porté à son faite ; dépenses intérieures, tandis que toutes
l'outillage économique de la Réunion ' les autres subsistaient sur le budget
en la dotant d'un chemin de fer . Celte national.
Ce fait indéniable, les 169,000 habi-
»■!
Persoooe ne bougea.
— A la bonne heure ! Vous êtes des
braves.
Puis avec une brusquerie impérieuse :
— Attention ! continua le muscadin, maître
Gadenette vous comptera à chacuo quatre écus
de six livres, vous habillera décemmeot et
vous donnera un passeport. Vous voyagerez
séparémeat, sans avo:r l'air de vous^connaîlre
deux à pied, deux par le coche d'eau et deux
en diligence. Rendez-vous général, mercredi
à midi, sur le pont du Montereau, autour du
marchand de chansons.
voie était indispensable. La métropole
IIISIIMIIBIMIIMI — jjJUlM_ l£ ,,J|
mais c'est loat nerfs, el ça ne boude pas à
l'ouvrage.
— Fais-les avancer à l'ordre.
A sod tour maître Gadenette cogna contre
les carrejux de la cloison six petits coups ré¬
gulièrement espacés. Dms la salle, six bu¬
veurs se levèrent l'un après l'autre, sans affec¬
tation, et se coulèrent du cabaret dans le bo¬
yau et du boyau dans le cabinet, où ils
se rangèrent silencieusement contre la mu¬
raille.
— Voilà, fit Gadeuelle en les désignant au
muscadin, voilà Pantinois, Casse museau, Ca¬
det-Ficelle, la Clef-des-Coffres, et le Grand-
Hurleur, en tous six jolis garçoQS saos
scrupules et sans le sou. C'est pauvre,
mais pas honnête, et çà ne demande qu'à
travailler.
Le ci-devant marquis promena un regard
de satisfaction sur cette effroyable col¬
lection de loques, de pipes, de triques e|de
sacripacts.
— C'est bien, dit-il. Je vous embauche
lous.
Il y eut un grognement de joie dans l'au¬
ditoire.
— Vous savez ce dont il s'agit
Le sextuor en haillons fit un signe af-
firmatif.
— Que ceux qui ont ont peur du raisiné
(sang), des coups de fusil et des coups de sa¬
bre, des gendarme-, du pré (bagne) et de
Chariot (le bourreau), me montrent la se¬
melle de leurs souliers et aillent voir à la pré¬
fecture si j'y suis.
II I
Le vidamé Gobe-Mouche
Sous le Consulat, Paris ne comptait guère
plus de cinq cent oeot mille habitants, et la
rue Saint-Louis-en-l'Ile ne se distinguait point
par une animation exceptionnelle. Elle des¬
servait un quartier somnslent ej presque dé¬
sert ; elle ne venait d'aucun contre, elle ne
menait à aucune artère. On eût dit la voie
principale d'uo chef-liea de canton situé à
cent lieues de la oapitale. La terreur l'avait
dépeuplée,— la noblesse de robe qui y avait
ses hô'els, ayant passé à l'étranger ou péri
dans les prisons et sur les échafauds.
Vers 1797, c'esLà-dire trois avant les diffé¬
rentes scènes auxquelles nous vet.ons de fai. e
Le i\° 5 cent.
Mercredi 19 Janvier 1898
i
I
II .
JOURNAL DE LA RÉPUBLIQUE RÉFORMATRICE
PARAISSANT TOUS LES JOURS LE LUNDI EXCEPTÉ
TROIS MOIS
)NÎ< 3 M r s
Tarn et départ, limitrop
I es autres départements.
Les abonnements partent du 1
six MOIS
un an
4 fr.
6 —
3 fr. 16 fr.
11 — 22 —
«r et du 15 de chaque mois.
Rédaction et Administration
BUREAUX: PLACE PÉLISSON 12, A CASTRES
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la ligne. 20 cent.
» 50 »
» 40 «
A Paris, les annonces sont reçues dans toutes les Agences de
publicité, — à Castres, au bureau du journal. .
Les insertions et les abonnements sont payables davance.
Castre, le & S Janvier I S»S
Une Vieille olonie
De toutes nos colonie, il n'y en a pas
une qui ail autant partagé les vic.issitu
des politiques de la mère pairie que
l'île de la Réunion. Chaque année sur
git d>j la mêlée des discussions parle¬
mentaires comme un sphinx vivant. Que
de fois ne l'a-t on pas accusée de
uoûier ch^r au Trésor métropolilain?
Encore aujourd'hui, il faui liquider
les comptes de son chemin de fer, et la
domauialité de ses rivages soulève les
controverses dès jurisconsultes. Mais
n'y a t il pas quelque velléité d'ingrati¬
tude dans ces récriminations plus ou
moins fondées t
L'île a heureusement des défenseurs
éloquents; mais ce qui répond non
moins victorieusement pour elle, c'est
son passé, c'est l'ancienneté et la fer
mêlé du lien qui l'unit à la France,
c'est son incomparable beauté, c'est la
richesse inépuisable de ses terres et de
ses eaux.
Je crois bien que les Français de
Pronis a été le premier colon de la
Réunion. Il en envoyait à 1646, au
nom de la Compagnie des Indes quel¬
ques compatriotes révoltés qui firent
souche.
Il y avait à peine un siècle et demi
que les Portugais l'avaient découverte
lui donnant le nom de leur capitaine :
Mascarenhas . mais la délaissaient; elle
ne renfermaient ni un homme ni un
quadrupède . Flacourt, sept ans après
en prenait possession pour la France.
Elle s'appella alors l'île Bourbon et elle
fut connue universellement sous ce
vocable.
Ce qui fut fait par la politique des
rois de France pour créer le noyau de
celte population accuse une prévoyance
et une ténacité qui ne se démentirent
jamais On y expédia des ouvriers de
FEUILLETON DE L'AVENIR DU TARN
— 11 —
Paul
PAR
HVIalialin
—»o3OJ—
V V ...
. .PREMIERE PARTIE
LA RECHERCHE DE L'INCONNU
II
Les deux revues
Celte peinture, étrangère à l'Académie des
Beaux-Arts, avait la prétention de représenter
Adam et Eve dans le paradis. Au bas on
lisait :
:».U9i;!ût>b j4«J î
Aux premiers sans culottes
Le cabaret avait one allée sur la rue. Le
muscadin se glissa dans ce boyau, sortit une
clef de sou gousset, ouvrit une porle et péné¬
tra dans un cabinet sombre, séparé de la
choix et on les y établit. On leur adres¬
sa des jeunes filles, des orphelines
pour les marier.
C'est avec ce sang frauçais que se
fondèrent les premières familles.
Mais celle société naissante ou trans
plantée n'aurait peut être pas duré si
un élément nouveau n'élait venu la
féconder, l'a'tacher au sol. l'enrichir,
et cet élément fut le café. Dès qu'il y
fut introduit d'Arabie en 1718, la fortu
ne avec lui se leva sur ce sol désert.
C'est qu'en effet la nature n'attendait
que l'arrivée de l'homme pour s'épa
nouir dans toutes ces merveilles. Pour -
vue d'eaux abondantes, — elle ne
compte pas moins de 107 rivières qui
descendent au rivage, — rafraîchie par
les brises de la mer des Indes, elle
défie les ardeurs des tropiques, et la
température normale dont elle jouit ne
dépasse pas vingt cinq degrés centi¬
grades. Sous ce ciel dont la douceur
égale la purelé, la vie se passe comme
un rêve . Un effort léger suffit pour
tirer de la terre tout ce qu'on lui de¬
mande. Le sucre le dispute au café.
Quand le gouverneur Poivre y importa
les épices des îles Molusques elles y
fleurirent comme par enchantement.
La France était fière des produits
toujours plus précieux et plus renom¬
més de cette île de prédilection. Quand
Madagascar se dérobait à son étreinte,
l'île Bourbon lui demeurait acquise.
Il fallut les guerres du premier Em
pire, les interminables luttes maritimes
avec l'Angleterre, pour la faire de nos
mains en 1810. Mais sa puissante
vitalité la défendit contre les outrages
de ces spoliateurs passagers. L'Europe
nous la rendait par le traité de Paris du
30 mai 1814. Naturellement elle s'est
dénommée l'île Bonaparte pendant au
moins dix ans, subissant le contre coup
de nos catastrophes nationales, et elle
redevenait l'ile Bourbon pour recouvrer
en 1848 le litre que la Révolution lui
avait donné et qu'elle n'a plus quit¬
té.
Ce fut une période grave aiguë pour
salle des buveurs par une cloison doot les vi¬
tres avaieol été soigneusement barbouillés de
blanc d'espagge.
Un ample carrick et une demi-douzaine de
collets était jetés sur un escabeau.
— A ma toilette, murmura le musca¬
din.
Il endossa bq un tour de main cette capara-
ce, qui recouvrit absolument ses habits d'in¬
croyable, et tira de dessous son gilet un mas¬
que de velours noir qu'il appliqua sur sou
visage. Il se penchi ensuite et mit l'œil à uu
trou pratiqué dans le rideau économique de la
cloison.
Dans la salle au milieu de la buée des pipes
une douzaine d'hommes, apparlenant à ia pi¬
re espèce des batteurs du pavé, buvaient et
regardaient jouer. Le cabaretier allait et ve¬
nait de table eu table; c'était le citoyen Cade-
nette, un drôle, long, maigre, jaune de temt
et de cheveux, la figure plate, le regard insi¬
gnifiant, moitié normand, moitié auvergnat, et
cachant tout un formidable arsenal de coqui-
neries parisiennes sous une épaisse couche
d'innnooence.
Le ci devant marquis frappa trois légers
coups contre la vitre. A| ce signal, màl-
tre Gadeuette sortit précipitamment par la por
le de la rue, prit l'allée et entra dans le ca¬
binet.
— Et nos gars ? demanda le musca¬
din.
— Ils sont là.
— Des bons î
— Des Parisiens. Ça n'a pes de mine,
l'ancienne Mascareigne, que l'émanci-
palion des esclaves. Les grands do¬
maines, toutes les propriétés de l'île se
virent menacés de perdre la mai-
d'oeuvre qui les exploitait.
Ce n'est pas que le régime appliqué
aux noirs fut inclément . Us étaient
traités avec la plus fraternelle humanité
Mais enthousiasmés et jetés hors d'eux
mêmes par cet affranchissement inat¬
tendu, ils abandonnèrent soudain tou¬
tes les plantations. Le pays aurait
succombé daus cette crise terrible si la
vieille énergie française n'était allée
quérir d^s travailleurs dans les Indes.
l'a construite sans marchander . Elle a
été inaugurée en 1882. Partant de
Saint Pierre, elle aboutit à l'autre ex¬
trémité, à St. Benoit, en passant par
Saint-Denis. Elle a 126 kilomètres de
longueur. Mais les résultats r/ont pas
encore été à la hauteur des sacrifices
consentis.
Le caractère accidenté du sol a pro •
voqué un dépassement des devis pri¬
mitifs . On croyait ne dépenser que 38
millions, on en a dépensé plus de 64,
dont 51,400,000 francs représentent la
part de l'Etat. Ce prélèvement a paru
lourd. Le service des obligations coûte
On se remit à l'œuvre avec une ardeur | 2 millions 1[2 par année, et c'est là ce
d'autant plus grande, et la Réunion j qui constitne la charge principale de la
doubla en quelques années l'étendue métropole.
de ses cultures dont le revenu, en 1856 j Mais chaque année aussi, la situation
était monté de 12 millions à 23 mil- j s'am îliore. En 1895, les recettes ont
lions de francs. j couvert le, dépendes. 11 y o même eu
Je donne ce chiffre afin de montrer un bénéfice de 40,954 francs sur les
de quel élan sont capables ces insulai- ! frais d'exploitation, alors que l'année
res qui ont an plus haut degré la notion ; précédente, le déficit s'était élevé à
de l'autonomie locale, qui aiment pas- j 400797 francs.
sio nément leur terre, et qui la prônent j L'augmentation est sensible. Elle
avec une fierté jalouse. ! permet légitimement d'espérer qu'un
Sur celte superficie de 260,000 hec¬
tares seulement, avec leurs 267 kilomè¬
tres de côtes, devant 1 es fougères ma¬
gnifiques de leurs montagnes et de
leurs vallées s'abaissant vers la mer, les
Bourbonnais goûtent à la fcis le bon¬
heur de vivre et la liberté. Tout leur
est à souhait . Ils sont à 1,770 lieues
de Marseille et à 180 lieues à l'est de
celte île superbe de Madagascar au¬
jourd'hui définitivement gardée par
notre drapeau, si éblouissante qu'on
serait tenté d'y oublier la grande pa¬
trie.
Longtemps, cependant, les moyens
de circulation lui ont manqué. Aucune
route ne l'enveloppait ; maintenant le
littoral est desservi par une large
avenir prochain procurera au chemin
de fer les moyens de payer intégrale¬
ment les obligataires. Aussi cherche t
on à faire valoir toutes les branches de
trafic qui peuvent être légalement et
raisonnablement utilisées.
Il s'est rencontré des détracteurs de
l'esprit bourbonnais pour le taxer d'é-
goïsme . Il voudrait, d'après eux, que
la métropole s'imposât à perpétuité l'en
tretien de son railway. C'est en semant
ces injustes accusations que l'on blesse
en leurs fibres les plus délicates nos
frères d'outre mer qui ne demandent
qu'à contribuer au soulagement et à la
grandeur de la patrie.
On oublie que pendant de longues
années, la Réunion n'a reçu aucune
chaussée de 232 kilomètres qui en fait subvention de la métropole et que avec
le tour. | ses seuls impôts, elle a fait face à ses
La République a porté à son faite ; dépenses intérieures, tandis que toutes
l'outillage économique de la Réunion ' les autres subsistaient sur le budget
en la dotant d'un chemin de fer . Celte national.
Ce fait indéniable, les 169,000 habi-
»■!
Persoooe ne bougea.
— A la bonne heure ! Vous êtes des
braves.
Puis avec une brusquerie impérieuse :
— Attention ! continua le muscadin, maître
Gadenette vous comptera à chacuo quatre écus
de six livres, vous habillera décemmeot et
vous donnera un passeport. Vous voyagerez
séparémeat, sans avo:r l'air de vous^connaîlre
deux à pied, deux par le coche d'eau et deux
en diligence. Rendez-vous général, mercredi
à midi, sur le pont du Montereau, autour du
marchand de chansons.
voie était indispensable. La métropole
IIISIIMIIBIMIIMI — jjJUlM_ l£ ,,J|
mais c'est loat nerfs, el ça ne boude pas à
l'ouvrage.
— Fais-les avancer à l'ordre.
A sod tour maître Gadenette cogna contre
les carrejux de la cloison six petits coups ré¬
gulièrement espacés. Dms la salle, six bu¬
veurs se levèrent l'un après l'autre, sans affec¬
tation, et se coulèrent du cabaret dans le bo¬
yau et du boyau dans le cabinet, où ils
se rangèrent silencieusement contre la mu¬
raille.
— Voilà, fit Gadeuelle en les désignant au
muscadin, voilà Pantinois, Casse museau, Ca¬
det-Ficelle, la Clef-des-Coffres, et le Grand-
Hurleur, en tous six jolis garçoQS saos
scrupules et sans le sou. C'est pauvre,
mais pas honnête, et çà ne demande qu'à
travailler.
Le ci-devant marquis promena un regard
de satisfaction sur cette effroyable col¬
lection de loques, de pipes, de triques e|de
sacripacts.
— C'est bien, dit-il. Je vous embauche
lous.
Il y eut un grognement de joie dans l'au¬
ditoire.
— Vous savez ce dont il s'agit
Le sextuor en haillons fit un signe af-
firmatif.
— Que ceux qui ont ont peur du raisiné
(sang), des coups de fusil et des coups de sa¬
bre, des gendarme-, du pré (bagne) et de
Chariot (le bourreau), me montrent la se¬
melle de leurs souliers et aillent voir à la pré¬
fecture si j'y suis.
II I
Le vidamé Gobe-Mouche
Sous le Consulat, Paris ne comptait guère
plus de cinq cent oeot mille habitants, et la
rue Saint-Louis-en-l'Ile ne se distinguait point
par une animation exceptionnelle. Elle des¬
servait un quartier somnslent ej presque dé¬
sert ; elle ne venait d'aucun contre, elle ne
menait à aucune artère. On eût dit la voie
principale d'uo chef-liea de canton situé à
cent lieues de la oapitale. La terreur l'avait
dépeuplée,— la noblesse de robe qui y avait
ses hô'els, ayant passé à l'étranger ou péri
dans les prisons et sur les échafauds.
Vers 1797, c'esLà-dire trois avant les diffé¬
rentes scènes auxquelles nous vet.ons de fai. e
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