Collectionneur d’art, journaliste à la plume redoutée en raison de son ironie mordante et de ses goûts bien arrêtés, Octave Mirbeau fut un critique d’art influent. Il contribua largement à promouvoir d’une manière générale le mouvement impressionniste ; il fut un grand défenseur de Camille Pissarro et de Paul Cézanne et contribua à faire connaître Van Gogh, Félix Vallotton et Camille Claudel. Il défendit également Auguste Renoir, en qui il vit « le peintre de la femme », apte à capter sa « musicalité intérieure » et son « mystère captivant ». Ses défenses prennent parfois l’allure de plaidoyer, comme lorsqu’il défendit le sculpteur Aristide Maillol, suite à la décision de la Ligue des Droits de l’Homme de choisir Constantin Meunier pour ériger un monument en hommage à Emile Zola.
Exécrant en revanche les préraphaélites et surtout les académistes décorés, en particulier Ernest Meissonier, Alexandre Cabanel et William Bouguereau, qu’il jugeait à la fois médiocres techniquement et serviles à l’égard des décorations et récompenses que pouvait leur octroyer l’Etat, il fut à leur égard une plume redoutable.
Très proche de Claude Monet, dont il admirait les œuvres et avec qui il entretenait une correspondance (et la passion du jardinage !), il lui consacre bon nombre d’articles dans la presse qui contribueront largement à assurer la renommée de l’artiste. C’est cependant à Auguste Rodin, son second grand coup de cœur artistique, qu’il réserve le plus grand nombre d’articles, conscient de son talent malgré leurs divergences d’opinion et de personnalité. Celui-ci, reconnaissant, lui offrira onze de ses œuvres, en bronze ou en plâtre ainsi qu’une série de dessins pour illustrer 200 exemplaires de luxe du Jardin des supplices, publiés chez Ambroise Vollard en 1902.
Ces articles dédiés à l’art, écrits surtout entre 1877 et 1914, se retrouvent dans les trois journaux à gros tirage que sont L’Echo de Paris, Le Matin et Le Journal (de 1892 à 1902), mais aussi dans Le Gaulois, L’ Humanité et L’Ordre de paris. Entretenant des relations complexes avec la presse, Mirbeau réussit cependant à utiliser sa plume pour servir ses « combats esthétiques ». Sa production journalistique est très importante, tout comme le nombre de pseudonymes utilisés pour signer ses articles. C’est pour le compte d’Emile Hervet (qui signe R.V), qu’il rédige par exemple les Salons de 1874, 1875 et 1876 dans L’Ordre de Paris. Publié de façon posthume chez Flammarion, Des artistes (Série 1 et Série 2), rassemble soixante-quinze de ses articles parus dans la presse entre 1885 et 1910 :
[Comprend : I. 1885-1896. Peintres et sculpteurs : Delacroix, Claude Monet, Paul Gauguin, J.-F. Raffaelli (premier chapitre et second chapitre), Camille Pissarro, Auguste Rodin (premier, deuxième et troisième chapitre), etc. ; II. Peintres et sculpteurs : 1897-1912. Musiciens : 1884-1902. Claude Monet, Camille Pissaro ["sic"], Vincent Van Gogh, Auguste Rodin, César Franck, Gounod, Franz Servais, L'Opéra, L'Opérette]
Le très complet Dictionnaire Octave Mirbeau, sous la direction de Yannick Lemarié et Pierre Michel, Paris : l'Âge d'homme, existe en version papier et en version en ligne.