Œuvre inclassable, ce récit-poème-chant de Maldoror, héros romantique, révolté et criminel, a fasciné des générations d’écrivains et de lecteurs du 20e siècle. Publié en 1869, à la veille de la chute du Second Empire et de la mort prématurée de son auteur, le texte paraît d’emblée si provoquant et si choquant que l’imprimeur bruxellois, qui en assure le premier tirage, refuse de le mettre en vente. Il faut attendre ensuite vingt ans pour qu’une nouvelle édition voie le jour à Paris et que des auteurs importants (Rémy de Gourmont, Alfred Jarry) en fassent un livre de prédilection. Après la Première Guerre mondiale, les surréalistes (Breton, Soupault, Éluard, Dali) consacrent son importance en saluant en Lautréamont un de leurs très grands prédécesseurs. En même temps, d’autres écrivains et philosophes (Larbaud, Bachelard, Blanchot) lui témoignent un intérêt passionné. Le rythme effréné du récit, la féroce noirceur de son univers, l’étrangeté et la vivacité de ses évocations lui ont assuré progressivement une place à part dans l’histoire littéraire française. Pour Maurice Blanchot : « La lecture de Maldoror est un vertige. »