Pistes pédagogiques
Le XVIIIe siècle est une période de réflexion intense autour du pouvoir politique : définitions et limites, légitimité, principes de gouvernement... Sur ce sujet qu'il considère comme déterminant, Montesquieu propose déjà des pistes dans les Lettres persanes en 1721 : dans la lettre CIV, le "pouvoir sans bornes" demandé par un prince ne peut qu'être illégitime puisqu'il outrepasse le pouvoir de l'homme sur lui-même et s'oppose à la "liberté naturelle" de chacun. Montesquieu développe ensuite ces théories en 1748 dans l'Esprit des lois, ouvrage monumental sur lequel il a travaillé pendant trente ans, qui conceptualise des axes majeurs de cette réflexion politique. Il analyse en particulier trois formes de gouvernement, le despotisme, la monarchie et la démocratie. Il souligne dans ["Du principe de la démocratie"] l'importance de la vertu, indispensable selon lui pour la réussite d'un État populaire. Il accorde également une place essentielle à l'éducation dans le texte ["De l'éducation dans le gouvernement républicain"], priorité qui sera aussi développée par Condorcet dans le [Rapport et projet de décret relatifs à l'organisation générale de l'instruction publique], présenté en 1792. Dans l'extrait ["De la constitution d'Angleterre"], Montesquieu insiste sur la nécessité de séparation du pouvoir exécutif, législatif et judiciaire, garante de la démocratie.
Voltaire et Rousseau s'impliqueront également dans leurs écrits, notamment dans le [Contrat social] (1762) pour Rousseau, le Traité sur la tolérance (1763) et le [Dictionnaire philosophique] (1764) pour Voltaire. Ces écrits précurseurs, qui révèlent et alimentent des interrogations fondamentales sur la place de l'homme, annoncent la Révolution française de 1789. Le débat d'idées se poursuit dans les tribunes – Condorcet prend parti contre l'esclavage, milite pour le rôle des femmes dans la vie publique et défend le principe de l'éducation pour tous – et s'invite dans l'action : [Robespierre] et [Danton], acteurs majeurs de la Révolution, s'imposeront aussi comme orateurs dans leurs discours à la Convention.
La [Déclaration des droits de l'homme et du citoyen], proclamée en 1789, est inscrite dans la Constitution du 24 juin 1793. Elle légitime l'égalité, la liberté, la sûreté et la propriété ; elle justifie l'existence d'un gouvernement "pour garantir à l'homme la puissance de ses droits naturels et imprescriptibles". La souveraineté y est associée à la nation, la liberté d'expression et de communication y est garantie, la loi est présentée comme un rempart contre les abus.
La réalité est cependant bien différente : les femmes sont exclues de la vie publique et peinent à trouver leur place, cela amènera Olympe de Gouges à rédiger une [Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne] en 1791, affirmant notamment que "la femme a le droit de monter sur l'échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la Tribune". Par ailleurs, si l'article 18 de la [Déclaration des droits de l'homme et du citoyen inscrite dans la Constitution du 24 juin 1793] établit que l'homme "ne peut se vendre, ni être vendu ; sa personne n'est pas une propriété aliénable", les colonies sont écartées de l'application de la déclaration des droits de l'homme et l'esclavage se poursuit, régenté par le Code noir (1685 puis 1724) : la Convention du 4 février 1794 décrète l'abolition de l'esclavage sans prévoir cependant sa mise en œuvre.
Au fil du XVIIIe siècle, la notion de pouvoir est ainsi mise en question et les arguments sont nombreux pour contester la domination politique, religieuse ou sociale. La Révolution rompra un équilibre de plus en plus précaire en initiant une contestation radicale et absolue de la royauté jusqu’à son anéantissement physique. La réflexion présente dans Candide sur toutes les formes de pouvoirs trouve un point d’aboutissement dans le chapitre XXVI : vanité et fragilité du pouvoir, manque de légitimité de ceux qui y accèdent, inconstance du statut se trouvent illustrés dans le récit des six rois déchus.