Le Vésuve : deux millénaires d’éruptions
Le Vésuve est, avec l’Etna le plus célèbre volcan d’Italie. Son éruption, en 79 de notre ère, enfouit les villes de Pompéi et d’Herculanum, redécouvertes quinze siècles plus tard dans un état de conservation étonnant comme le montre l’actuelle exposition du Grand Palais. Le Vésuve a connu de nombreuses autres éruptions à l’époque moderne au point de devenir un thème de souvenir touristique.
Situé en Campanie, le Vésuve domine la ville et la baie de Naples du haut de ses 1281 m. Le climat méditerranéen y est doux. Les coulées de lave sont à l’origine de la fertilité des sols vantée par Virgile (70-19 av. J.-C.) dans Les Géorgiques. Dès le 3ème siècle avant J.-C., ses pentes sont couvertes de vignes. Lucrèce (97-55 av. J.-C.) dans De la nature des choses (livre VI) parle des fumées émanant des sources de la région de Cumes. En effet, le Vésuve est la partie la plus visible d’une active région volcanique, conséquence de la rencontre entre les plaques tectoniques africaine et eurasienne.
Friedrich Justin Bertuch, Porte-feuille des enfans. Volume 4, 1802
Un vaste arc volcanique campanien comprend le Vésuve mais aussi les champs Phlégréens, Ischia et des volcans sous-marins. Les champs Phlégréens regroupent une quarantaine de cratères dont le plus connu est la Solfatare dont les boues bouillonnantes dégagent des fumerolles soufrées qui lui ont donné son nom. L’activité volcanique se manifeste dans des petits séismes et dans des mouvements de descente et de remontée du sol, phénomène appelé bradyséisme qui a submergé à certaines époques le temple de Sérapis à Pouzzoles. Les Campaniens ont même la surprise, en 1538, d’assister à la naissance d’un nouveau volcan, le Monte Nuovo.
Les derniers jours de Pompéi
Le Vésuve a connu de longues périodes d’inactivité. En 79 de notre ère, le volcan est endormi depuis plusieurs siècles, faisant oublier aux habitants sa nature même de volcan. Un tremblement de terre en 62 a endommagé Herculanum et Pompéi, suivi de petits séismes les années suivantes. Les habitants ne s’inquiètent donc pas quand la terre tremble quelques jours avant l’éruption de 79. Cette dernière dure deux jours et nous est connue par le récit de Pline Le Jeune, dont l’oncle Pline l’Ancien, naturaliste, s’avance trop près du volcan pour l’observer et meurt sur la plage, suffoqué par l’effet de la fumée.
Joseph Thierry, [Herculanum] : esquisse de décor de l’acte IV, tableau 2, 1859
Le volcan éjecte gaz, cendres et lapilli qui montent en colonne dans le ciel avant de s’étendre horizontalement en altitude, prenant l’aspect d’un pin parasol baptisé panache plinien en l’honneur de Pline. Ces matières volcaniques commencent à tomber sur Pompéi mais laissent à la majorité de la population le temps de s’échapper : seuls deux mille personnes périssent sur les vingt mille habitants de la ville. Des nuées ardentes s’abattent ensuite la ville. Herculanum, quant à elle, est recouverte par des coulées de boue. L’éruption est traditionnellement placée les 24 et 25 août, mais des recherches récentes ont proposé de la situer à l’automne.
Trois siècles d’éruptions : 1631-1944
Eruzione del 1839 : [vue nocturne du Vésuve en éruption], 1839-1880
Un nouveau cycle éruptif commence en 1631, ponctué par une cinquantaine d’éruptions jusqu’en 1944, la dernière en date. Leur nature varie : certaines éruptions se caractérisent par des coulées de lave, d’autres par des explosions éjectant des nuages de cendres, des lapilli et des blocs de toute taille. Ces événements remodèlent le profil du volcan : le sommet du cône volcanique a été soufflé par l’éruption de 79, donnant naissance à une grande falaise au nord, le mont Somma, dépassé en altitude par le cône actuel. De multiples cônes adventices se forment. Les agglomérations au pied du Vésuve subissent des dommages comme Torre del Greco en partie recouverte par les coulées de lave.
Le Vésuve devient un sujet d’étude et Ferdinand II le dote en 1841 du premier observatoire volcanologique au monde. A la fin du siècle précédent, William Hamilton, ambassadeur britannique à Naples, publie les Campi Phlegraei où il décrit les différentes éruptions mais aussi les matériaux volcaniques retrouvés sur place. A la fin du XIXe siècle, Louis Figuier, vulgarisateur scientifique, évoque le Vésuve dans Scènes et tableaux de la nature (1879) ou dans La terre et les mers, ou description physique du globe (1864), ainsi que dans les revues qu’il a créées comme L’année scientifique et industrielle (1856-1913) ou La Science illustrée : journal hebdomadaire (1887-1905). Cette notoriété transforme le volcan en objet d’excursion à pied ou en funiculaire.
Le Petit journal. Supplément du dimanche, 22 avril 1906
L’étude du Vésuve permet de mieux comprendre l’éruption de 79, remise en lumière par la découverte fortuite du site de Pompéi à la fin du XVIe siècle lors de la construction du canal de Sarno. Mais les recherches archéologiques à Pompéi ne commencent vraiment qu’en 1748 à l’initiative de Charles roi de Naples et de Sicile (1716-1788). L’étude du site suscite de nombreuses publications scientifiques, particulièrement en minéralogie et volcanologie. On découvre ainsi l’empreinte laissée par les corps humains et animaux recouverts par les produits de l’éruption. En coulant du plâtre dans ces cavités, on obtient des moulages d’habitants et même de chiens saisis dans les derniers instants de leur vie.
Le Vésuve domine le paysage et l’histoire de la Campanie depuis l’Antiquité. Ses colères ont fait périr des milliers d’habitants mais n’ont pas ravagé la grande ville voisine, Naples, qui se protège en organisant des processions des reliques de saint Janvier, un des saints patrons de la cité. Les éruptions ont fait naître un genre pictural au 18ème siècle : des gouaches représentant le volcan crachant des matières incandescentes au cœur de la nuit. Dans la Naples baroque, même les forces telluriques entrent en scène pour assurer le spectacle d’une des premières destinations touristiques de l’époque.
Pour aller plus loin
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