Moines explorateurs et archéologues au Levant
Partenaire de Gallica et de Bibliothèques d’Orient, l’École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem (EBAF) remonte le fil de son histoire pour nous faire découvrir le travail accompli par les frères dominicains depuis la fin du 19e siècle.
Les œuvres de fiction nous ont légué une image du moine contemplatif retiré du monde pour se consacrer à l’étude et à la prière. Les membres de l’École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem, s’ils pratiquaient bien ces deux disciplines, étaient également des chercheurs qui parcouraient le Proche-Orient en train, en bateau, à pied et à dos de chameau. Si l'École est connue notamment pour l'édition de la Bible de Jérusalem et les fouilles de Qumran, c'est un travail beaucoup plus large qui a été accompli par les pères dominicains.
"J’avais tant aimé le livre et maintenant je contemplais le pays !" tels furent les mots du père Marie-Joseph Lagrange à son arrivée à Jérusalem. Il est le fondateur en 1890 de ce qui est alors l’École Pratique d’Études Bibliques, installée dans le couvent St Etienne de Jérusalem, implanté quelques années auparavant sur les restes d’une ancienne basilique byzantine du 5e siècle, d’ailleurs fouillée à l’occasion des travaux. Dès ses débuts, le programme de l’école comporte des excursions régulières dans tout le Proche-Orient, de la Syrie à l’Egypte en passant par la Transjordanie, suivant un programme topographique toujours d’actualité. C’est à cet effet que des séries de cartes détaillées de l’ensemble de la région sont achetées, la collection étant soigneusement complétée et mise à jour au fil des années.
Ces expéditions sont l’occasion de cours d’histoire, d’archéologie, d’épigraphie, de botanique, de géologie, et d’expérimentation d’outils nés de techniques modernes, tels que le bateau à moteur et la photographie.
L’École organise ainsi en 1908 la fameuse circumnavigation de la Mer Morte, première de son genre. Pendant onze jours, les dominicains et les étudiants explorent ses rivages à bord d’un bateau à moteur, abordant des estuaires inaccessibles par voie terrestre. Cet épisode sera l’occasion d’articles dans la Revue Biblique, publiée par l’École, ainsi que de la publication du livre Une croisière autour de la Mer Morte par le père Félix-Marie Abel (Gabalda, 1911).
Introduite dès la création de l’École par le père Lagrange, la photographie sur plaques de verre devient vite un outil incontournable, notamment à des fins de publication. Ces photographies sont parfois les seuls témoins restants de sites ou de matériel archéologiques disparus. Toute une partie de la collection reflète aussi les recherches ethnologiques menées par le père Jaussen sur les tribus bédouines, qui ont abouti à la publication d’une étude sur les Coutumes des arabes au pays de Moab en 1908.
Le déclenchement de la Première Guerre mondiale en 1914 interrompt les activités de l’École. Une partie des dominicains sont expulsés vers l’Europe par les Turcs, qui s’installent dans le couvent, tandis que d’autres se retrouvent mobilisés dans les armées européennes, où leur connaissance de la région et de ses langues en font de précieux auxiliaires. Mais ils ne renoncent pas pour autant à l’archéologie : le père Dhorme, brancardier-infirmier mobilisé sur le front turc, profite même de l’ouverture des tranchées pour organiser des fouilles dans la nécropole grecque d’Éléonte de Thrace. Il publiera d’ailleurs un compte-rendu de ces fouilles avant même la fin de la guerre.
En 1920, l’École rouvre ses portes sous le nom d’École Biblique et Archéologique Française, après son rattachement à l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres. Le gouvernement français lui confie alors la mission de développer sa politique archéologique au Proche-Orient.
Les cartes, imprimées et manuscrites, et les photos, au même titre que l’importante bibliothèque de l’École, ont été les instruments de travail des dominicains et témoignent de l’histoire de la région, ancienne comme plus récente. Enfin, la photothèque continue d’enrichir ses collections grâce à des dons mais aussi par une politique de coopération avec d’autres institutions de Jérusalem.
Issu de la collection Patrimoines partagés, le site Bibliothèques d’Orient est une présentation de ressources choisies dans Gallica qui propose côte à côte des documents des collections de la Bibliothèque nationale de France, et d’institutions de recherche au Moyen-Orient.
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