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Le Tour de France de Gallica, étape 7 : Nuits-Saint-Georges

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7 juillet 2017

A l’occasion du passage du Tour dans la ville de Nuits-Saint-Georges, Gallica se penche sur l’histoire du vignoble bourguignon, au travers notamment de sa délimitation géographique et de ses appellations.

M. Peyre, Carte du Vignoble Bourguignon, 1934

On définit aujourd’hui le vignoble bourguignon comme s’étendant sur trois départements : l’Yonne, ou Basse Bourgogne, la Côte d’Or, formée par la Côte de Nuits et la Côte de Beaune, et la Saône et Loire, regroupant la Haute Bourgogne et le Beaujolais. La géologie de la région, formée d’une juxtaposition d’affleurements variés, permet l’existence de nombreux terroirs, avec chacun leurs spécificités.

Les premières traces de la production vinicole de la région remontent à l’Antiquité : des vignes gallo-romaines étaient ainsi présentes à Gevrey-Chambertin dès le premier siècle avant notre ère. A partir du haut Moyen-Age, les abbayes créent d’importants domaines, d’abord pour leur propre consommation puis plus tard pour commercialisation. C’est l’époque de la plantation des « clos », parcelles de vigne entourées de murs : le Clos de Vougeot est ainsi fondé vers 1111 par les frères de Cîteaux. L’abbaye de Cluny étend ses vignes au sud de la région, autour de Macon et de Chalon. La commercialisation des vins se fait par la voie fluviale Saône-Rhône, notamment pour alimenter la cour pontificale lors de la papauté d’Avignon (1309-1418).

En 1395, Philippe le Hardi interdit par décret de cultiver le gamay dans son duché de Bourgogne, car le cépage est jugé de moindre qualité, au profit du pinot noir : il s’agit là d’une des premières réglementations alimentaires au monde. Seul le vignoble du Beaujolais, appartenant alors à la baronnie de Beaujeu, sera épargné, et continuera jusqu’à aujourd’hui à produire des vins issus du gamay.  L’appellation « vins de Bourgogne » est réglementée par un édit du roi Charles VI en 1416 : elle ne devra être réservée qu’aux vins cultivés entre Sens et Mâcon. Il s’agit alors de les distinguer des « vins françois » du val de Loire. Toutefois, la volonté de définir précisément les différents terroirs et les crus de Bourgogne ne surgit qu’au XVIIIe siècle, au moment où la noblesse et la grande bourgeoisie commencent à investir dans la région. Le premier livre consacré au vignoble, la « Dissertation sur la situation de la Bourgogne » est publié en 1728 par Claude Arnoux : il distingue « vins de primeur » (Volney, Pommard, Beaune), « vins de garde » (Nuits, Vougeot, Chambertin) et « vins blancs » (Puligny, Monrachet, Mulsant…). Arnoux exclut de sa description les vins d’Auxerre et de Chablis, qu’il juge « trop éloignés » pour faire partie de la Bourgogne.

Claude Arnoux, Dissertation sur la situation de la Bourgogne, sur les vins qu'elle produit..., 1728

Après la fragmentation des grands domaines nobles ou religieux à la Révolution, la législation napoléonienne accentue la parcellisation des vignes : chaque propriété doit être divisée entre tous ses héritiers. Cette situation renforce le pouvoir des maisons de négoce commercialisant les vins, en position dominante face aux nombreux petits producteurs. La création d’une ligne de chemin de fer entre Paris et Dijon en 1851 renforce le dynamisme de la région, en permettant aux vins de rejoindre plus rapidement la capitale. La même année, les hospices de Beaune organisent leur première fameuse vente aux enchères.  En 1861, une classification des vins de Bourgogne est réalisée pour le compte du Comité d’agriculture de cette même ville : ce « Plan statistique des vignobles » répartit les « climats ou lieux-dits » de chaque commune de l’arrondissement de Beaune en trois niveaux de qualité.  La carte l’accompagnant s’étend pour sa part de Santenay à Dijon.

Plan statistique des vignobles produisant les grands vins de Bourgogne, 1861

La Bourgogne n’est pas épargnée par le phylloxera à la fin du XIXe siècle, et de nombreuses vignes doivent être arrachées et remplacées. Pour compenser ces pertes, la fraude apparait, et l’on voit des vignerons et des négociants couper les vins bourguignons avec des vins d’autres régions. Pour défendre la qualité et la spécificité des productions de Bourgogne, les viticulteurs s’organisent en fondant les premières caves coopératives, à la suite de "la Chablisienne" en 1923, ou en refusant de passer par les maisons de négoce pour vendre leurs vins. Des confréries se créent, comme celle des Chevaliers du Tastevin, fondée en 1934 à Nuits-Saint-Georges afin de défendre et valoriser les vins, et plus largement les traditions, de la région. Une route des grands crus de Bourgogne est aménagée entre Dijon et Chassagne-Montrachet.

En 1935, face à la crise du secteur viticole français, l’Institut national des appellations d'origine est créé : il doit enregistrer des produits bénéficiant de « caractéristiques particulières héritées de facteurs naturels et humains », garantissant ainsi leurs noms, mais aussi leurs qualités et  leurs liens avec des terroirs délimités. Le nuiton Henri Gouges, proche du baron Le Roy au sein de l’INAO, fait rapidement reconnaitre plusieurs appellations (AOC) de Bourgogne : Morey Saint-Denis, commune de Côte d’Or proche de Nuits-Saint-Georges, devient ainsi la première appellation contrôlée du vignoble en 1936.

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