Spinoza en français
Des traductions françaises de certains textes de Spinoza (1632-1677) ont circulé de manière clandestine ou manuscrite dès le XVIIe siècle. Cependant, ce n’est qu’au XXe siècle que les œuvres complètes seront accessibles au lecteur francophone.
Les Opera Posthuma de Spinoza (1632-1677) furent publiées en 1677 à Amsterdam, peu de temps après la mort du philosophe, par le libraire-imprimeur Jan Rieuwertsz (1616?-1687). Elles comprennent l’Ethica, le Tractatus politicus, le Tractatus de intellectus emendatione, le Compendium grammatices linguae Hebraeae et soixante-quinze lettres. Les Renati Des Cartes Principiorum philosophiae pars I et II (1663) et le Tractatus theologico-politicus (1670) avaient déjà été
publiés du vivant de Spinoza.
Au XVIIe et XVIIIe siècles des traductions clandestines ou manuscrites du Tractatus théologico-politique et de l’Ethique circulent dans certains milieux mais ce n’est qu’au début du XIXe siècle que commence en France l’édition des textes de Spinoza.
Le premier jalon est posé en 1830 par l’avocat et historien Jules Gustave Prat (1823-1895) qui publie une traduction de l’Ethique.
C’est cependant le travail d’Emile Saisset (1814-1863) qui constitue le premier moment important dans l’histoire des traductions françaises de Spinoza. Elève de Victor Cousin (1792-1867), il fut professeur de philosophie à l’École normale supérieure de 1842 à 1857, puis professeur d’histoire de la philosophie à la faculté des lettres de Paris jusqu’à sa mort. Il fait paraitre une première édition des œuvres de Spinoza en 1842 puis une édition revue et augmentée en 1861, en trois volumes : I. Introduction critique, II. Vie de Spinoza, par Colerus. Notice bibliographique. Traité théologico-politique. Traité politique, III. Ethique. Traité de la réforme de l'entendement. Lettres :
En 1907, François-Marie Colonna d'Istria (1864-1925), professeur de philosophie au lycée Louis-le-Grand puis à l’Ecole normale supérieur de Fontenay-aux-Roses, édite pour la première fois la traduction de Henri de Boulainvilliers (1658-1722) de l’Ethique :
Le second grand moment des traductions de Spinoza est le travail de Charles Appuhn (1862-1942). Sa première édition des œuvres du philosophe d’Amsterdam parait chez Garnier Frères entre 1907 et 1929. C’est l’édition de référence durant une grande partie du XXesiècle et elle sera republiée en collection de poche jusqu’en 1992 dans la collection GF chez Flammarion, en quatre volumes : Œuvres I. Traité politique. Lettres ; Œuvres II.Traité théologico-politique ; Œuvres III. Ethique ; Œuvres IV. Traité politique. Lettres. Professeur de philosophie et traducteur, Charles Appuhn fit partie des premiers membres de la Société des Amis de Spinoza fondée en 1925 avec, entre autres, Henri Bergson (1859-1941), Emile Bréhier (1876-1952), Léon Brunschvicg (1869-1944) et Lucien Lévy-Bruhl (1857-1939).
Aujourd’hui, l’édition critique de référence est celle publiée aux Presses universitaires de France depuis 1999 sous la direction de Pierre-François Moreau.
Pour aller plus loin
Janet, Paul, « Spinoza en France », Revue philosophique de la France et de l’étranger, vol. 13, n°1, 1889, p. 109.
Duclert, Vincent, « La pensée de Spinoza et la naissance de l'intellectuel démocratique dans la France du tournant du siècle », Archives Juives, vol. 36, n° 2, 2003, p. 20-42.
Moreau, Pierre-François, « Traduire Spinoza : l’exemple d’Emile Saisset », dans André Tosel, Pierre-François Moreau et Jean Salem (dir.), Spinoza au XIXe siècle : actes des journées d'études organisées à la Sorbonne, 9 et 16 mars, 23 et 30 novembre 1997, Paris, Publications de la Sorbonne, 2007, p. 221-230.
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