Titre : Le Journal
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1906-10-08
Contributeur : Xau, Fernand (1852-1899). Directeur de publication
Contributeur : Letellier, Henri (1867-1960). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34473289x
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 08 octobre 1906 08 octobre 1906
Description : 1906/10/08 (A15,N5121). 1906/10/08 (A15,N5121).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG87 Collection numérique : BIPFPIG87
Description : Collection numérique : BIPFPIG13 Collection numérique : BIPFPIG13
Description : Collection numérique : BIPFPIG69 Collection numérique : BIPFPIG69
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7627221f
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-220
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/11/2014
QUINZIEME ANNEE., — N° 5121
HUIT PAGES ;.;- Le Numéro quotidien (parrs et lMparfemcnts) CDTO CENTIMES
LUNDJ-TDCTOBRE 1906 -
FERNAJVD XAU, Fondateur
œDAGTIQN ET AJOSONISTRATION t Î00, RUE RICHELIEU, PARIS F..ERNANJ) XAU, FOflliatar
Prix des Abonnements
un au Six mois Trois mol»
Serra "SEINE-ET-OISE. 20. » 10 50 6.5(1.
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LES ÉVÉNEMENTS DE RUSSIE
ENTRETIEN AVEC M. STOLYPINE
PRÉSIDENT DU CONSEIL DES MINISTRES
W. STOLYPINE, président du Conseil des ministres de Russie
(PAR LETTRE DE NOTRE ENVOYE SPECIAL)
Saint-Péetrebourg, 1 octobre.
L'officier de semeç me fit un signe.
Un huissier poussa une porte. Devant
moi flamboyèrent soudaines, les splen..
deurs d'un salon du palais impérial.
Dans la majesté de ce décor, tout fait
de pourpre et de vermeil, parmi ces ors
trop vifs et ces opulences trop rutilantes,
et où l'on se fût attendu à voir errer quel-
que paladin antique, quelque prince
charmant, quelque jeune tsar capricieux
et magnifique, un homme noir était as-
sis. Et il captiva tellement mon atten-
tkHl, • cet.bonwïï*.Tînir, vêtu .1,.. noir, quei
le ne saurais décrire maintenant, avec
là moindre précision, rien de ce qui l'en-
tourait; je me souviens seulement d'avoir.
longuement conversé avec lui, parmi des
choses éblouissantes, des meubles bril-
lante, des moulures, des astragales do-
y$es, où s'avivait la pâle lumière de l'au-
tomme. I/hcntlmé noir me parut tout
d'abord glacial et rigide; je voulus lui
trouver fair ©ombre, desséché et funè-
bre d'un inquisiteur espagnol. C'était
;M. Stolypine.
Il me fit un geste avenant ; il m'adres-
sa, en français, quelques paroles cour-
toises, ni apprêtées ni guindées, et mes
imaginations romantiques s'évanoui-
rent. J'avais rêvé. Je n'avais pas devant
jTioi le personnage ténébreux et vrai-
ment extraordinaire que le journaliste
espère toujours rencontrer. Je me trou-
vais en présence d'un homme comme
yous et comme moi, un homme aux rai-
sonnements très positifs et sans rien qui
pût, à aucun instant, paraître diaboli-
que. Le plus haut des fonctionnaires
fusses, oui, sans doute, mais un fonc-
jiîonnaire sans morgue, sans pose théâ-
trale, et en cela bien semblable à la plu-
part des Russes éminents que j'ai con-
nus, M. Stolypine irii parut simple d'al-
Llures, bon enfant et dénué d'aucune
moi^Tàç. Pour trouver des politiciens
roguei. des parvenus hautains et des cé-
lébrités planant dans leur empyrée, ce
est pas en Russie qu'il faut venir.
f La conversation qui s'engageait entre
mous, je ne savais comment la dégager
Lde ces préliminaires confus et tout faits
tie remplissages par quoi prennent 1
jBontact des interlocuteurs qui n'ont
jamais eu de relations personnelles.
Llè sentais la nécessité de parler tout
ij'abord de l'attentat de l'île des Apo-
thicaires et de ses conséquences la-,
Xnentables. Mais je compris très vite
jque ce sujet douloureux c'était préc-
isément celui que M. Stolypine ne vou-
lait pas que j'abordasse. Dans sa, fierté
ide rude lutteur, il lui déplaisait sans
coûte de dire des mots qu'il n'eût peut-
Jétre point pu prononcer sans émotion.
résolu à se montrer impassible et inac-
cessible à nos faiblesses, il se plut à ne
Une parler jamais qu'en homme d'Etat.
jtOccupé uniquement de la chose publi-
que, je le vis s'obstiner à ne point mêler
aux soucis du gouvernement les dou-
leurs qu'il peut éprouver quand il rede-
Ment père.
Impassible ? M. Stolypine l'est-il vrai-
ment ? Qui sait ? Est-ce par hasard que,
pendant toute la durée de notre entre-
tien, il est resté obstinément assis, le
dos tourné aux fenêtres ? Entre les deux
jappes de clarté qu'elles répandaient ré-
gnait une zone assombrie. Moi, il m'a-
vait fait prendre place face à la lumière,
et amsi je n'apercevais son visage que
idans une pénombre confuse. Il m'eût
été difficile d'en observer l'expression,
les creux et les replis. Simple hasard ?
Je n'en crois rien. Je no crois pas au
hasard, quand le hasard dépend d'un
homme comme M. Stolypine. Il est cal-
me, oui, sans doute, extraordinairement
calme. Son avant-bras droit et sa main
droite posés à plat sur un bureau n'ont
point un mouvement nerveux, point un
frémissement. Et comme il a passé le
bras gaucho par-dessus le dossier de son
fauteuil, de manière que ce dossier s'en-
fonce, semblable à une béquille, sous
son aisselle, sa main, au bout d'un long
bras pendant, touche presque le par-
quet. Et, cette main-là, qu'il croit invisi-
je m'aaer&ûis sm% cha~ejas~j
elle a des trépidations rapides et con-
vulsives comme les battements d'aile
d'un oiseau qui va mourir.
- Une maladie mortelle ? Non, dit M.
Stolypine. Non, ce n'est pas une mala-
die mortelle ! La Russie ne mourra pas
de cette crise redoutable. La. situation
actuelle considérée dans son ensemble ?
Une maladie chronique, mais qui n'em-
pire pas !. Et, puisqu'elle n'empire pas,
elle est guérissable. Une révolution ?
Ndn, ce n'est plus une révolution. Ah l
l'an dernier à la même époque, oui, on
pouvait sans lR.vi*isëmbîance. parler do
révolution. Tous les fondements de l'au-
torité, tous les principes sur lesquels
reposait l'ordre ancien avaient été en
même temps détruits sans que rien eût
encore été institué pour les remplacer.
Dans les campagnes, à la faveur de ce
désarroi une effrayante jacquerie sévjs-
saik Oui, dans ce temps-la, on pouvait
redouter des catastrophes irréparables.
Aujourd'hui, employer ces grands mots
d'anarchie, de jacquerie, de révolution,
c'est, semble-t-il, exagérer l'état des cho-
ses.
— L'opposition, dis-je, vous reproche
surtout maintenant d'avoir institué les
cours martiales avec leurs juigemente
sommaires et leurs exécutions immédia-
tes.On s'effraie vraiment de ce que peut,
parfois, devenir la justice, exerdëe dans
de semblables conditions ?
— Que voulez-vous ! le gouvernement
n'est pas un but, c'est un moyen. Quel
est le but ? Le but, c'est l'ordre. Un gou-
vernement qui renonce à défendre l'or-
dre n'a qu'à s'en aller. La justice normar
le n'a pas été instituée en vue des pério-
des révolutionnaires : elle est faite pour
punir les forfaits ordinaires, les crimes
de droit commun. Il faut aux situations
exceptionnelles des remèdes exception-
nels. Dans l'état actuel des choses, la
création des cours martiales est non seu-
lement compréhensible, elle est obliga-
toire. Dans n'importe quel pays, tout
gouvernement qui n'eût point voulu l'ef-
fondrement de la société eût agi comme
nous.
— Encore, dis-je, ne conviendrait-il
pas que tous les actes de violence, tous
les coups de force fussent punis avec la
même sévérité ? En France même, des
journaux reprochent à vos cours mar-
tiales d'être implacables envers les ré-
volutionnaires, mais singulièrement in-
dulgentes pour les membres des bandes
réactionnaires. Le meurtre est toujours
le meurtre. Les assassins du député Her-
zenstein ne sont-ils pas aussi coupables
que la femme sous les coups de laquelle
tomba le général Minn.
- Les cours martiales ne connaissent
que des cas de flagrant délit, dit M. Sto-
lypine ; elles jugent les émeutiers pris
les armes à la main. Etablir le flagrant
délit peut être plus difficile dans cer-
tains cas que dans d'autres. Mais, d'une
manière générale, je déclare que tous
les crimes seront réprimés également,
sans que les auteurs d'une certaine caté-
gorie d'attentats puissent espérer trou-
ver dans le nom d'un parti quelconque
une protection qui les mette à l'abri du
châtiment.
Il y eut, dans le salon, un silence. Au
dehors, des fanfares retentissaient; des
fifres sifflaient; midi sonnait; sur l'im-
mense place du palais, la garde mon-
tante venait, avec l'ordinaire parade,
remplacer la garde descendante. On en-
tendait les fantassins marquer le pas sur
les pavés sonores. Des fenêtres du pa-
lais, j'apercevais ces lieux où, le 22 jan-
vier les feux v roulants de l'Infanterie
avaient creusé dans les profondeurs de
la foule russe de grands trous sanglants.
Au milieu de la place, au sommet du mo-
nolithe de porphyre rose érigé à la mé-
moire d'Alexandre Ier un ange de bronze
élevait sa croix miséricordieuse vers un
ciel chargé de brumes et d'où tombaient
toutes les mélancolies d'un automne
septentrional.
- Il est tout de même triste de songer,
aventurai-je, que. les journalistes russes
soient traqués, persécutés, emprison
~SegaMo~
Autres, les plus heureux, se voient à tout
moment menacés d'apprendre que leur
feuille a été supprimée.
— Conséquence de l'état dé siège !
Mais qui a rendu l'état de siège néces-
saire ? Les journaux ne peuvent "hve
supprimes par mesure administrative
que dans les villes soumises à l'état de
siège. Partout ailleurs, la loi ordinaire
æst respectée. Or, notre loi sur la presse
est l'une des plus libérales de l'Europe.
Les infractions à cette loi ne sont jugées
que par les -tribunaux, et c'est seulement
par ordre de ces tribunaux que les délia.
quarts peuvent être emprisonnés. Ain-
si, tenez, dans nos provinces centrales.,
là où l'état de siège n'existe pas, le ton
-de la presse est excessivement agressif.
Les attaques personnelles contre tel ou
¡¡tel membre du gouvernement ou de l'ad-
ministration sont d'une virulente ironie.
Ces pamphlets font une grande impres-
sion parmi les classes ignorantes, qui
tiennent pour article de foi tout mot. im,.
primé. Néanmoins, ils circulent libre-
ment, conformément à la loi. Ah ! je
voudrais bien qu'on se rendît compte,
en France et ailleurs, de ce qu'est cette
littérature révolutionnaire qu'on propa-
ge partout. Voyez tout cela, étudiez tout
cela ; si vous êtes de bonne foi, vous se-
rez édifié. Mais même actuellement, et
dans les endroits soumis à l'état de siè-
ge, nous n'interdisons que les journaux
révolutionnaires, ceux qui excitent le
peuple à la violence ou ceux qui mettent
en cause la personne du souverain. Les
journaux qui se bornent à nous faire une
opposition d'idées sont parfaitement li-
bres. On peut même me vilipender per-
sonnellement ; cela m'esit égal ; dans des
cas de ce genre-là, je préfère qu'il n'y ait
point de vindicte. Ainsi, tenez, je reçois
du fond du Turkestan un petit journal
dans lequel je suis traité de « Klecta-
koff ! » (héros burlesque d'un des romans
de Gogol, et correspondant plus ou
jTOiins au Tartan n de Daudet). On peut
me gronder (sic) tant qu'on voudra,
qu'est-ce que cela peut faire ! Le grand
malheur, c'est qu'on ne se borne pas à
discuter, à argumenter, voire même à
insulter des personines, non ; on prê-
che l'insurrection. Y a-Ml un seul gou-
vernement en Europe qui laisserait prê-
cher l'insurrection ?
— Mais enfin, dis-je, si le pays était,
pacifié, le gouvernement adopterait-il
une ligne de conduite franchement libé-
rale ?
—r La tactique de l'opposition, c'est de
vouloir faire croire à tous que le gou-
vernement est obstinément opposé aux
réformes et désire revenir à l'époque de
l'absolutisme bureaucratique. Mais per-
sonne ne se laissera prendre à ces allé.
gâtions. Le ministère actuel restera
fidèle à son i)lan de réformes progres-
sives ; plan qu'il a développé dans sa réy.
cente déclaration : Réioraies graduelles
d'une part, et, d'autre part, répression de
la propagande et des actes anarchistes,
voilà les deux opérations que nous
comptons mener à bien, simultanément.
Ce faisant, nous n'obtiendrons pas seu-
lement l'approbation de politiciens émi-
nents comme M. GOutchkoff, mais celle
d'une grande partie d& la société qui as-
pire- à l'ordre, à la sécurité, à l'apaise-
ment et qui veut que le gouvernement
soit fort, précisément parce que des ré-
formes durables ne peuvent être effec-
tuées que par un gouvernement fort.
— On reproche au cabinet de tarder
beaucoup à faire connaître la date des
élections. Je dois ajouter qu'à l'étranger
on partage un peu cette manière de
voir. Si le gouvernement est sincère
dans son désir de former une nouvelle
Chambre, qu'il en avise d'une manière
précise, le corps électoral !
— Nous avons dit que la Douma se-
rait convoquée le 20 février ; elle le sera.
Les partis peuvent, si bon leur semble,
préparer dès maintenant leur propa-
gande. Quant à la date des élections, elle
dépendra des circonstances qui sont,
dans diverses provinces, différentes les
unes des autres. Le gouvernement,
croyez-le bien, n'a pas de plus cher dé-
sir que de mener à bien un travail pro-
ductif, une œuvre de réformes fécondes,
en bonne harmonie avec la Douma.
LUDOVIC NAUDEAU.
(A suivre.)
ECHOS .1
L
e Président de la République, venu, hier,
à Paris, en automobile, est allé saluer la
reine Marguerite d'Italie.
M.
Gouyec, fils du maire de Carnoët, près
Morlaix, vient de partir au régiment
laissapt dans sa bourgade quatre enfants dont
il est le père. Marié à une veuve qui lui a
apporté comme supplément de dot un enfant,
celle-ci, depuis trois ans qu'ils sont ensemble,
lui a encore donné deux fois un enfant et
une fois deux jumeaux, ce qui fait que le
conscrit Gouyec, à son arrivée sous les d» a-
peaux, est père de quatre enfants bien à lui,
beau-père d'un cinquième. Il y a, certes, peu
de conscrits en France qui aient une si nom-
breuse famille.
c
'est par une température idéale, et sous
un ciel d'une orientale pureté, que s'est
déroulée, avec un éclat sans précédent, la sai-
son de Biarritz. Depuis trois mois, les hôtels,
les pensions, les villas sont occupés par une
foule élégante où l'on, rencontre, à côté des
personnalités les plus marquantes de tous
nos mondes, l'élite de l'aristocratie et de la
noblesse espagnoles. Une grande partie de
cette clientèle de choix se compose des fidèles
de l'Etablissement Thermal, des justiciables
de la cure saline, de tous ceux qui viennent
demander à l'eau minérale de Briscous le
sommeil, l'énergie cérébrale, les forces phy-
siques, l'appétit, la gaieté; en un mot, la
santé. Dès le mois de juillet, on faisait queue
aux guichets des Thermes Salins, et il faut
croire que les cures s'y sont accomplies avec
succès, car on n'en voit plus sortir maintenant
que des visages aimables et heureux. De tels
résultats ne sont point faits pour étonner,
d'ailleurs, car les eaux de Briscous, bien qu'el-
les soient fort jeunes encore de réputation,
font chaque année un pas de plus dans la
voie d'une renommée universelle, et il arri-
vera fatalement que tous ceux qui recherchent
la santé par le sel, tous les justiciables du
^itemeat ^oOTé-wdigu^i^earnt j?as 4
leur accorder une préférence que tout justifie.
Elles ont, en effet, sur leurs congénères, outre
une supériorité de minéralisation que l'ana-
lyse démontre avec toute la brutalité de ses
chiffres, l'immense avantage d'être employées
dans une station oir tout concourt à seconder
leur puissance curative : un climat des plus
tempérés et agréable en toutes saisons, l'ait
marin dont l'inhalation permanente assure
dans le traitement une heureuse continuité,
les avantages indispensables d'un confortable
sans reproches, et enfin ce cadre merveilleux
dont la souriante harmonie attendrit les yeux
les plus blasés, relève les coeurs les plus dé
s espérés et guérit l'âme avec le corps.
L
ongchamps fut, hier, ébloui par l'éclat tles
« Tout-Reflets » Léon, et le chapelier si
parisien de la rue Daunou gagna une fois de
plus, aux applaudissements discrets de nos
sportsmen, le grand prix du chic et de l'élé-
gance.
E
nfin, on y revient. Il s'agit clé la finesse
des tours de taille dont toutes les coquet-
tes souhaitaient ardemment le retour. Cest
chose faite. Toutes les élégantes avaient, hier,
au Grand Prix d'Automne, la taille fine et
arrondie de leurs rêves, grâce aux nouveaux
corsets cambrés de la reine du corset, Mme
Guillot. Il appartenait à l'aimable artiste de
rendre aux femmes la finesse de leur tour
de taille; elle l'a fait avec son joli talent ha-
bituel, et toutes les femmes en sont ravies.
p
our installer : serres, jardins d'hiver, jar-
dinières, etc., voir les meubles en rotin
souple très riches en bambou naturel, les siè-
ges confortables et originaux créés par Per-
npt-Vibert, 33, rue du 4-Septembre. (Maison
des Bambous. Société anonyme.)
L
avantage d acheter directement dans les
pays d'origine, et aux meilleures condi-
tions, les pelleteries brutes : zibeline, chin-
chilla, loutre, hermine, etc., constituait jus-
qu'à présent le privilège et la. raison d'être
du fourreur.
Pour être à même de vendre aux mêmes
conditions, le couturier-fourreur achète aujour-
d'hui aux mêmes sources. Ceci explique la
grande vogue du rayon de fourrures chez
Béchoff-David, où, pour le prix de la valeur
intrinsèque des peaux, l'on obtient des vête-
ments d'un chic suprême, spécialement tra-
vaillés et essayés par les mêmes faiseurs que
ceux qui exécutent les admirables manteaux
de drap souple ayant fait la grande réputa-
tion de la maison.
G
rande sensation, hier, à Longchamps, au
Prix d'Automne, causée par l'innovation
de Lewis, fixant audacieusement à droite les
plumes et Jes panaches de ses chapeaux
Louis XVI. et Directoire sans barrette; la
beauté charmeresse de ses jolies clientes en
parut comme redoublée.
JOINVILLE.
SORCIERE ET VAMPIRE
En Algérie, une femme déterrait des cada.
vres d'enfants et se servait de leurs
os pour confectionner des philtres
ALGER, 7 octobre. (Par dépêche de notre
correspondant particulier.) — La justice
procède, en ce momeartt. à une.-enquête scr.
rée, sur une irès grave affaire? qUi vient de
se produire dans le village de-ChelLala, au,
Sud du département d'Alger:
Ces jours derniers, deux jeunes enfants,,
respectivement âgés de huit et de cinq ans,
mouraient, à quelques jours d'intervalle, à
Chellala, et, peu après, leurs cadavres
étaient exhumés et disparaissaient.
On crut tout d'abord qu'ils avaient été dé-
terrés par les bêtes fauves. Mais bientôt, le
juge de paix suivant certaines traces,acquit
La conviction que ces tombes avaient été
profanées par des misérables. Des gens qui
s'étaient tus jusque-là parlèrent.
On, apprit alors que les petits caaavres
avaient été enlevés par des sorcières ara-
bes et juives, qui recherchaient les os des
morts, particulièrement ceux des enfants,
pour les broyer et les faire entrer dans la
composition de certains mets, destinés à
être présentés à ceux ou celles à qui une
personne voulait jeter un sort.
Une de ces sorcières, sur qui pèsent de
très graves présomptions, a été arrêtée.
Carnet d'un Sauvage
Lorsque furent créées les palmes acadé-
miques, la plus grande pensée du règne,
on ne songea pas à les canaliser, autrement
dit, à fixer leur répartition. La distribution
fut laissée au bon plaisir du distributeur.
Depuis, le distributeur, débordé par les de-
mandes (on en compte de vingt à trente
mille par semestre), crut devoir se régle-
menter lui-même, ce qui est toujours amu-
sant, et il décida qu'il serait donné tant de
palmes par département, selon le chiffre de
la population.
C'est pourquoi, aujourd'hui, il est répon-
du à un solliciteur :
— Pardon ! Votre département n'a droit
qu'à dix-sept hommes distingués.
- Mais, monsieur, deux parfaits igno-
rants ont fait partie de la dernière promo-
tion.
— C'est qu'ils appartenaient à un dépar-
tement qui n'avait pas son contingent, et
on a pris ce qu'on a trouvé.
Voilà sage administration. C'est un sys-
tème analogue que nous voyons appliqué
dans les divers cahiers des charges des
théâtres subventionnés, et particulièrement
dans celui de l'Opéra, où je lis que la di-
rection est obligée de représenter chaque
année huit actes nouveaux de compositeurs
français.
Ne me dites pas qu'il pourrait se trouver
qu'en telle année il se présentât une quan-
tité considérable de belles œuvres, et qu'en
telle autre il ne se présentât rien du tout.
Ceci est contraire au bon ordre des affaires.
La qualité importe peu. Il faut huit actes,
arrive qu'arrive. Je pense, qu'on a dû cal-
culer cela également selon le chiffre de
la population ; et, si M. Piot réussit aans
son entreprise, et que le nombre des nais.
sances s'élève, j'espère que nous aurons
droit à un acte de plus.
On parle de nommer une commission
spéciale, qui établira la quantité d'hommes
de génie et de talent que pourra se permet-
tre la France, relativement à son étendue.
On jpourra en ajouter un dans les années
bissextiles.
Henry Maret.
EN TROISIEME PAGE : GRANDES ET
PETITES PERSONNES, par CHABLES-HENRY
~=~RSO~ ,
lté plus grand Cuirassé da monde
Le Dreaânought •' vient de commencer ses essais, qui emp1.-,¡n-
tent un très grand intérêt aux innovations essentielles
introduites sur ce navire. -
LE « DREADNOUGHT »
A gauche, une vue d'arrière faisant ressortir la largeur du cuirassé; à droite. Une vm
de face montrant d'une manière saisissante la hauteur du franc-bord.
Le fameux Dreadnought vient D0 com-
mencer ses essais à Portsmouth.
Les expériences vont se poursuivre
dans le mystère qui a entouré toutes
les phases de la construction de ce
navire-type. L'amirauté anglaise en attend
les résultats pour fixer les caractéristiques
des trois cuirassés du programme de 1906.
Rien n'a été négligé pour gagner du temps.
Le Dreadnought a été construit avec une ra-
pidité qui fait honneur aux chantiers britan-
niques, mais grâce à des moyens dont i em-
ploi ne saurait se généraliser. L'achèvement
d'un cuirassé de 19,000 tonnes -en douze mois
est un tour dé force, même en Angleterre.
Mais l'essentiel était de faire vite, pour fixer
la valeur de certaines innovations qui ont
été très discutées.
Le Dreadnought déplace 19,700 tonnes. Il
coûtera la jolie somme de 41 millions, sans
son artillerie, qui reviendra à elle seule à
près de 3 millions. C'est pour rien. En Fran-
ce, un bateau semblable coûterait plus de
50 millions. Trois caractéristiques tout à fèIJt
nouvelles donnent à ce navire un intérêt
particulier.
Tout d'abord, c'est le premier oà'iment
sur lequel on -ait -organisé, en Àngutenre,
un système de défense contre ies effets des
torpilles. Nous disons en Angleterre, car la
France a fait des essais du nône gt'.nre sur
le Henri-IV et la Russie sur le Cesarevitch..
Les Anglais font grand mystère du procédé
adopté. Il est évidemment basé sur une,dou-
ble coque renforcée avec un compartimen-
tage développé.
L'emploi exclusif de machines à turbine^
est la seconde innovation importante.
La marine anglaise tient en grande faveur
ces nouveaux organes de propulsion d'im
vention britannique. Cependant, elle ne Ief
avait encore expérimentés que sur fies des.
troyers ou des éclaireurs dont le iléplarc,
ment n'est guère supérieur à 3,000 tonnes.
La tentative actuelle est audacieuse. Les pre«
miers résultats paraissent d'ailleurs favofBt
blés.-Le nouveau cuirassé a atteint paraij,"
il, dans les essais préliminaires, une, vite^q
de 21,5 nœuds, dépassant sensiblement tes
prévisions.
L'armement du Dreadnought est rifuior
vation qui a été la plus discutée. Le nou.
veau cuirassé ne porte que dix gros cawona
de 305 millimètres et une nombreuse balte.
rie^d'artillerie légère, contre les torpilleurs.
La suppression complète de l'artillerie
moyenne a soulevé de vives critiques de la
part de personnalités dbrit l'autorité e,,*, in-
contestable. M. White, le fameux ingénie m
naval, le père de la flotte anglaise mo/jernes
le capitaine Mahan, le célèbre critiquel naval
américain, ont blâmé l'emploi eiclug/if de la
grosse artillerie en prenant texte des le-
vons de la bataille de Tsoushima.. Ils ont
trouvé des contradicteurs non mc/ins aulo-
risés*.
Ajoutons, pour conclure, que Fétat-majot
et l'amiral seront logés 3» l'avant, sur le
Dreadnought, et non plus à l'arrière, coin.
me l'exigeait un usage séculaire. Enfin, lé
franc-bord du nouveau navire est très élevé
afin d'augmenter le champ de tir de l'ar/.
tillerïes — Sl-B. 1
L'AGITATION CHEZ LES BOULANGERS
Paris aura du pain frais aujourd'hui
On a Il doublé hier un peu partout
Grâce aux mesures d'ordre prises par M. Lèpine, les ménagèret.
ont pu faire d'amples provisions, et aucun incident
grave ne s'est produit.
Ainsi qu'il était facile de le prévoir, dès
l'aube, les boulangeries parisiennes ont été
envahies par une foule de ménagères redou-
tant d'être privées de pain aujourd'hui, tou-
tes les boutiques, on le sait, devant être fer-
mées.
Et, & qui rendait l'animation plus pitto-
resque encore, c'était l'arrivée successive
des gardiens de la paix et des municipaux
chargés par M. Lépme de protéger les com-
merçants, le cas échéant.
Voici de braves mères de famille suivies
de deux ou trois enfants ; tout ce petit monde
est empressé, babille, piaille.
— Rassurez-vous, dit* la boulangère. Il y
aura du pain aujourd'hui et demain.
En quelques instants, les étagères so»t dé-
garnies ; il reste bien des petits pains.M.fles
croissants, mais ce n'est pas suffisant,
Des clientes en retard se présentent vers
dix heures et se demandent si elles vont être
réduites au jeûne ou aux pommes de terre ;
les patrons les rassurent à nouveau.
On avait dit et répété que les ouvriers ne
« doubleraient » pas ; cependant, dans la plu-
part des maisons de la périphérie, on a cuit
jusqu'à midi. Certains ont même fait la der-
nière fournée beaucoup plus tard.
Une ménagère, rue des Pyrénées, qui re-
vient avec deux pains « polka » sur les bras,
apprend que la Doulangerie communiste de
la rue Boyer et quelques patrons du quar-
tier qui n'ont pas accepté 1 affiche jaune an-
nonçant la fermeture du lundi fourniront du
pain comme à l'ordinaire.
-.:.. Si j'avais su, dit-elle, cela m'eût évité
bien de l'embarras ; demain ce pain sera ras-
sis, j'aurai beau le mettre dans une ser-
viette 1 Et puis, ce n'est pas agréable.
» Ma résolution est prise : dimanche pro-
chain, je ne m'affolerai pas, je laisserai venir
les événements. »
Cette opinion est générale. Ceux qui ont ac-
cumulé lee miches ou les boules dans les
boîtes à pain regretteront leur empresse-
ment
Certains patrons des dix-neuvieme et ving-
tième arrondissements — ils sont rares —
ayant épuisé leur stock à midi, ont tout sim-
plement fermé leurs boutiques.
Un petit patron du quartier du Père-La-
chaise nous a ainsi défini la situation :
— La loi sur le repos hebdomadaire nous
coûtera cher à tous, mais elle rendra heu-
reux les marchands de vins. Ce matin, trois
débitants qui, d'habitude, prennent chacun
de 15 à 20 kilos de pain, ont triplé leurs
achats aujourd'hui. La raison en est fort
simple : Demain lundi, ils auront soin de
laisser les miches en vue dans leur étalage,
et ceux qui ne se sont pas approvisionnés
et qui ignorent où se trouvent les rares mai-
sons qui consentent au roulement seront bien
forcés de demander au marchand de vins de
leur céder quelques livres de pain. Vous pen-
sez bien que le commerçant n'y consentira
qu'en haussant notablement le prix habituel
de vingt centimes.
» Le malheur des uns fait quelquefois le
bonheur des autres. »
Une agression a été commise, 44, boule-
vard Rochechouart, contre une boulangerie
dont les ouvriers étaient soupçonnés de vou-
loir doubler : un sac de sable a été versé
par le soupirail dans le fournil.
M. Lépine, prévenu de cet incident, a im.
^éfliateme&t pris les mesures nécessaires
pour protéger efficacement la liberté du t
vail. "'1,
D'après le pointage établi au cours de ta
nuit, 1,983 boulangeries sur 2,090 ont « doui
blé » les cuissons.
M. Lépine a visité, entre trois et six heu^
res, les différents postes, pour s'assurer de
l'exécution des mesures prises et rectifier leq
consignes selon les circonstances. -;
Nulle part., l'ordre n'a été troublé ; aucune
agression n'a été commise. ]
Il résulte de l'ensemble des renseigne,
ments recueillis que la majorité des patrons
ont fait tous leurs efforts pour satisfaire leur*
clientèle. -<4
L'un nous dit :
— J'ai trouvé trois hommes qui ont bien
voulu « marcher » et j'ai du pain plus qu'il
ne m'en faut.
Un autre nous explique qu'up ouvrier de
bonne volonté lui a suffi.. j
— J'ai bien mis un peu la main à la pâtqi
ajoute-t-il, mais n'était-ce point de circonsl
tance 1
Un troisième, énigmatique, nous affirmer
avec un fin sourire : ,
— J'ai trouvé une « combinaison n, et vous
voyez que mes rayons ne sont pas vides.
Et, en effet, partout le pain abonde. Tous
les boulangers se sont arrangés pour le plU;
grand bien de la population parisienne..
A LA BOURSE DU TRAVAIL
Pendant ce temps, un meeting des oo
vriers boulangers se tenait à la Bourse de
Travail. Les assistants y étaient moins nonu
breux que les jours précédents.
Après avoir compté, parmi les assistants
ceux qui avaient été congédiés par les p
trous, pour avoir refusé de « doubler », M
Bousquet, secrétaire de la Féuération oui
vrière de l'alimentation, a fait cette décla.
ration :
— Camarades, je vous conseîlle de re»
ter caimes et de n'user d'anoure vi lenc^
pour le moment. Vous allez réclamer, de
vant les prud'hommes, une inuem ité df
cent francs au minimum, pour brusque rem
voi. Nous irons en masse devant le conseil
des prud'hommes. Nous l'impressionnerons
par notre nombre.
» Si justice ne vous est pas rendue, nous
verrons alors si la boulange ne doit pal
descendre dans la rue. J'ai personnellement
une revanche à prendre sur le pair, nat ;
comptez sur moi pour trouver les moyen!
qui pourront vous faire sûr emcut Irioia
pher.
» Encore quelques jours d'énergie. Au
rions-nous tant, combattu, afin d'obtenir
cette loi humanitaire, pour finalement ei
être réduits à un état pire ? »
Quelques orateurs ont proféré de violen
tes menaces contre les « renégats », lei "'i
« fainéants » qui ont « doublé ».
La réunion s'est terminée par le ~?& Si
l'ordre du jour suivant :
« La majorité des m ma rades présents ort
été renvoyés sans hésitation de la part da
patrons pour avoir refusé de douuler^ a
renvoi prouve que les pat ons pe:lven
changer d'ouvriers, et ai- si t -mbe le prin
cipal argument qu'ils four; issaient poqi
combattre le repos par roulement.
» Les ouvriers, boulangers engagent leuq
HUIT PAGES ;.;- Le Numéro quotidien (parrs et lMparfemcnts) CDTO CENTIMES
LUNDJ-TDCTOBRE 1906 -
FERNAJVD XAU, Fondateur
œDAGTIQN ET AJOSONISTRATION t Î00, RUE RICHELIEU, PARIS F..ERNANJ) XAU, FOflliatar
Prix des Abonnements
un au Six mois Trois mol»
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àdrewe tâégnphiqtie t JOURNAL - XUCHEUE0 - PARIS
£es manUlmt, non insérés ne sont pet rcntfto
LES ÉVÉNEMENTS DE RUSSIE
ENTRETIEN AVEC M. STOLYPINE
PRÉSIDENT DU CONSEIL DES MINISTRES
W. STOLYPINE, président du Conseil des ministres de Russie
(PAR LETTRE DE NOTRE ENVOYE SPECIAL)
Saint-Péetrebourg, 1 octobre.
L'officier de semeç me fit un signe.
Un huissier poussa une porte. Devant
moi flamboyèrent soudaines, les splen..
deurs d'un salon du palais impérial.
Dans la majesté de ce décor, tout fait
de pourpre et de vermeil, parmi ces ors
trop vifs et ces opulences trop rutilantes,
et où l'on se fût attendu à voir errer quel-
que paladin antique, quelque prince
charmant, quelque jeune tsar capricieux
et magnifique, un homme noir était as-
sis. Et il captiva tellement mon atten-
tkHl, • cet.bonwïï*.Tînir, vêtu .1,.. noir, quei
le ne saurais décrire maintenant, avec
là moindre précision, rien de ce qui l'en-
tourait; je me souviens seulement d'avoir.
longuement conversé avec lui, parmi des
choses éblouissantes, des meubles bril-
lante, des moulures, des astragales do-
y$es, où s'avivait la pâle lumière de l'au-
tomme. I/hcntlmé noir me parut tout
d'abord glacial et rigide; je voulus lui
trouver fair ©ombre, desséché et funè-
bre d'un inquisiteur espagnol. C'était
;M. Stolypine.
Il me fit un geste avenant ; il m'adres-
sa, en français, quelques paroles cour-
toises, ni apprêtées ni guindées, et mes
imaginations romantiques s'évanoui-
rent. J'avais rêvé. Je n'avais pas devant
jTioi le personnage ténébreux et vrai-
ment extraordinaire que le journaliste
espère toujours rencontrer. Je me trou-
vais en présence d'un homme comme
yous et comme moi, un homme aux rai-
sonnements très positifs et sans rien qui
pût, à aucun instant, paraître diaboli-
que. Le plus haut des fonctionnaires
fusses, oui, sans doute, mais un fonc-
jiîonnaire sans morgue, sans pose théâ-
trale, et en cela bien semblable à la plu-
part des Russes éminents que j'ai con-
nus, M. Stolypine irii parut simple d'al-
Llures, bon enfant et dénué d'aucune
moi^Tàç. Pour trouver des politiciens
roguei. des parvenus hautains et des cé-
lébrités planant dans leur empyrée, ce
est pas en Russie qu'il faut venir.
f La conversation qui s'engageait entre
mous, je ne savais comment la dégager
Lde ces préliminaires confus et tout faits
tie remplissages par quoi prennent 1
jBontact des interlocuteurs qui n'ont
jamais eu de relations personnelles.
Llè sentais la nécessité de parler tout
ij'abord de l'attentat de l'île des Apo-
thicaires et de ses conséquences la-,
Xnentables. Mais je compris très vite
jque ce sujet douloureux c'était préc-
isément celui que M. Stolypine ne vou-
lait pas que j'abordasse. Dans sa, fierté
ide rude lutteur, il lui déplaisait sans
coûte de dire des mots qu'il n'eût peut-
Jétre point pu prononcer sans émotion.
résolu à se montrer impassible et inac-
cessible à nos faiblesses, il se plut à ne
Une parler jamais qu'en homme d'Etat.
jtOccupé uniquement de la chose publi-
que, je le vis s'obstiner à ne point mêler
aux soucis du gouvernement les dou-
leurs qu'il peut éprouver quand il rede-
Ment père.
Impassible ? M. Stolypine l'est-il vrai-
ment ? Qui sait ? Est-ce par hasard que,
pendant toute la durée de notre entre-
tien, il est resté obstinément assis, le
dos tourné aux fenêtres ? Entre les deux
jappes de clarté qu'elles répandaient ré-
gnait une zone assombrie. Moi, il m'a-
vait fait prendre place face à la lumière,
et amsi je n'apercevais son visage que
idans une pénombre confuse. Il m'eût
été difficile d'en observer l'expression,
les creux et les replis. Simple hasard ?
Je n'en crois rien. Je no crois pas au
hasard, quand le hasard dépend d'un
homme comme M. Stolypine. Il est cal-
me, oui, sans doute, extraordinairement
calme. Son avant-bras droit et sa main
droite posés à plat sur un bureau n'ont
point un mouvement nerveux, point un
frémissement. Et comme il a passé le
bras gaucho par-dessus le dossier de son
fauteuil, de manière que ce dossier s'en-
fonce, semblable à une béquille, sous
son aisselle, sa main, au bout d'un long
bras pendant, touche presque le par-
quet. Et, cette main-là, qu'il croit invisi-
je m'aaer&ûis sm% cha~ejas~j
elle a des trépidations rapides et con-
vulsives comme les battements d'aile
d'un oiseau qui va mourir.
- Une maladie mortelle ? Non, dit M.
Stolypine. Non, ce n'est pas une mala-
die mortelle ! La Russie ne mourra pas
de cette crise redoutable. La. situation
actuelle considérée dans son ensemble ?
Une maladie chronique, mais qui n'em-
pire pas !. Et, puisqu'elle n'empire pas,
elle est guérissable. Une révolution ?
Ndn, ce n'est plus une révolution. Ah l
l'an dernier à la même époque, oui, on
pouvait sans lR.vi*isëmbîance. parler do
révolution. Tous les fondements de l'au-
torité, tous les principes sur lesquels
reposait l'ordre ancien avaient été en
même temps détruits sans que rien eût
encore été institué pour les remplacer.
Dans les campagnes, à la faveur de ce
désarroi une effrayante jacquerie sévjs-
saik Oui, dans ce temps-la, on pouvait
redouter des catastrophes irréparables.
Aujourd'hui, employer ces grands mots
d'anarchie, de jacquerie, de révolution,
c'est, semble-t-il, exagérer l'état des cho-
ses.
— L'opposition, dis-je, vous reproche
surtout maintenant d'avoir institué les
cours martiales avec leurs juigemente
sommaires et leurs exécutions immédia-
tes.On s'effraie vraiment de ce que peut,
parfois, devenir la justice, exerdëe dans
de semblables conditions ?
— Que voulez-vous ! le gouvernement
n'est pas un but, c'est un moyen. Quel
est le but ? Le but, c'est l'ordre. Un gou-
vernement qui renonce à défendre l'or-
dre n'a qu'à s'en aller. La justice normar
le n'a pas été instituée en vue des pério-
des révolutionnaires : elle est faite pour
punir les forfaits ordinaires, les crimes
de droit commun. Il faut aux situations
exceptionnelles des remèdes exception-
nels. Dans l'état actuel des choses, la
création des cours martiales est non seu-
lement compréhensible, elle est obliga-
toire. Dans n'importe quel pays, tout
gouvernement qui n'eût point voulu l'ef-
fondrement de la société eût agi comme
nous.
— Encore, dis-je, ne conviendrait-il
pas que tous les actes de violence, tous
les coups de force fussent punis avec la
même sévérité ? En France même, des
journaux reprochent à vos cours mar-
tiales d'être implacables envers les ré-
volutionnaires, mais singulièrement in-
dulgentes pour les membres des bandes
réactionnaires. Le meurtre est toujours
le meurtre. Les assassins du député Her-
zenstein ne sont-ils pas aussi coupables
que la femme sous les coups de laquelle
tomba le général Minn.
- Les cours martiales ne connaissent
que des cas de flagrant délit, dit M. Sto-
lypine ; elles jugent les émeutiers pris
les armes à la main. Etablir le flagrant
délit peut être plus difficile dans cer-
tains cas que dans d'autres. Mais, d'une
manière générale, je déclare que tous
les crimes seront réprimés également,
sans que les auteurs d'une certaine caté-
gorie d'attentats puissent espérer trou-
ver dans le nom d'un parti quelconque
une protection qui les mette à l'abri du
châtiment.
Il y eut, dans le salon, un silence. Au
dehors, des fanfares retentissaient; des
fifres sifflaient; midi sonnait; sur l'im-
mense place du palais, la garde mon-
tante venait, avec l'ordinaire parade,
remplacer la garde descendante. On en-
tendait les fantassins marquer le pas sur
les pavés sonores. Des fenêtres du pa-
lais, j'apercevais ces lieux où, le 22 jan-
vier les feux v roulants de l'Infanterie
avaient creusé dans les profondeurs de
la foule russe de grands trous sanglants.
Au milieu de la place, au sommet du mo-
nolithe de porphyre rose érigé à la mé-
moire d'Alexandre Ier un ange de bronze
élevait sa croix miséricordieuse vers un
ciel chargé de brumes et d'où tombaient
toutes les mélancolies d'un automne
septentrional.
- Il est tout de même triste de songer,
aventurai-je, que. les journalistes russes
soient traqués, persécutés, emprison
~SegaMo~
Autres, les plus heureux, se voient à tout
moment menacés d'apprendre que leur
feuille a été supprimée.
— Conséquence de l'état dé siège !
Mais qui a rendu l'état de siège néces-
saire ? Les journaux ne peuvent "hve
supprimes par mesure administrative
que dans les villes soumises à l'état de
siège. Partout ailleurs, la loi ordinaire
æst respectée. Or, notre loi sur la presse
est l'une des plus libérales de l'Europe.
Les infractions à cette loi ne sont jugées
que par les -tribunaux, et c'est seulement
par ordre de ces tribunaux que les délia.
quarts peuvent être emprisonnés. Ain-
si, tenez, dans nos provinces centrales.,
là où l'état de siège n'existe pas, le ton
-de la presse est excessivement agressif.
Les attaques personnelles contre tel ou
¡¡tel membre du gouvernement ou de l'ad-
ministration sont d'une virulente ironie.
Ces pamphlets font une grande impres-
sion parmi les classes ignorantes, qui
tiennent pour article de foi tout mot. im,.
primé. Néanmoins, ils circulent libre-
ment, conformément à la loi. Ah ! je
voudrais bien qu'on se rendît compte,
en France et ailleurs, de ce qu'est cette
littérature révolutionnaire qu'on propa-
ge partout. Voyez tout cela, étudiez tout
cela ; si vous êtes de bonne foi, vous se-
rez édifié. Mais même actuellement, et
dans les endroits soumis à l'état de siè-
ge, nous n'interdisons que les journaux
révolutionnaires, ceux qui excitent le
peuple à la violence ou ceux qui mettent
en cause la personne du souverain. Les
journaux qui se bornent à nous faire une
opposition d'idées sont parfaitement li-
bres. On peut même me vilipender per-
sonnellement ; cela m'esit égal ; dans des
cas de ce genre-là, je préfère qu'il n'y ait
point de vindicte. Ainsi, tenez, je reçois
du fond du Turkestan un petit journal
dans lequel je suis traité de « Klecta-
koff ! » (héros burlesque d'un des romans
de Gogol, et correspondant plus ou
jTOiins au Tartan n de Daudet). On peut
me gronder (sic) tant qu'on voudra,
qu'est-ce que cela peut faire ! Le grand
malheur, c'est qu'on ne se borne pas à
discuter, à argumenter, voire même à
insulter des personines, non ; on prê-
che l'insurrection. Y a-Ml un seul gou-
vernement en Europe qui laisserait prê-
cher l'insurrection ?
— Mais enfin, dis-je, si le pays était,
pacifié, le gouvernement adopterait-il
une ligne de conduite franchement libé-
rale ?
—r La tactique de l'opposition, c'est de
vouloir faire croire à tous que le gou-
vernement est obstinément opposé aux
réformes et désire revenir à l'époque de
l'absolutisme bureaucratique. Mais per-
sonne ne se laissera prendre à ces allé.
gâtions. Le ministère actuel restera
fidèle à son i)lan de réformes progres-
sives ; plan qu'il a développé dans sa réy.
cente déclaration : Réioraies graduelles
d'une part, et, d'autre part, répression de
la propagande et des actes anarchistes,
voilà les deux opérations que nous
comptons mener à bien, simultanément.
Ce faisant, nous n'obtiendrons pas seu-
lement l'approbation de politiciens émi-
nents comme M. GOutchkoff, mais celle
d'une grande partie d& la société qui as-
pire- à l'ordre, à la sécurité, à l'apaise-
ment et qui veut que le gouvernement
soit fort, précisément parce que des ré-
formes durables ne peuvent être effec-
tuées que par un gouvernement fort.
— On reproche au cabinet de tarder
beaucoup à faire connaître la date des
élections. Je dois ajouter qu'à l'étranger
on partage un peu cette manière de
voir. Si le gouvernement est sincère
dans son désir de former une nouvelle
Chambre, qu'il en avise d'une manière
précise, le corps électoral !
— Nous avons dit que la Douma se-
rait convoquée le 20 février ; elle le sera.
Les partis peuvent, si bon leur semble,
préparer dès maintenant leur propa-
gande. Quant à la date des élections, elle
dépendra des circonstances qui sont,
dans diverses provinces, différentes les
unes des autres. Le gouvernement,
croyez-le bien, n'a pas de plus cher dé-
sir que de mener à bien un travail pro-
ductif, une œuvre de réformes fécondes,
en bonne harmonie avec la Douma.
LUDOVIC NAUDEAU.
(A suivre.)
ECHOS .1
L
e Président de la République, venu, hier,
à Paris, en automobile, est allé saluer la
reine Marguerite d'Italie.
M.
Gouyec, fils du maire de Carnoët, près
Morlaix, vient de partir au régiment
laissapt dans sa bourgade quatre enfants dont
il est le père. Marié à une veuve qui lui a
apporté comme supplément de dot un enfant,
celle-ci, depuis trois ans qu'ils sont ensemble,
lui a encore donné deux fois un enfant et
une fois deux jumeaux, ce qui fait que le
conscrit Gouyec, à son arrivée sous les d» a-
peaux, est père de quatre enfants bien à lui,
beau-père d'un cinquième. Il y a, certes, peu
de conscrits en France qui aient une si nom-
breuse famille.
c
'est par une température idéale, et sous
un ciel d'une orientale pureté, que s'est
déroulée, avec un éclat sans précédent, la sai-
son de Biarritz. Depuis trois mois, les hôtels,
les pensions, les villas sont occupés par une
foule élégante où l'on, rencontre, à côté des
personnalités les plus marquantes de tous
nos mondes, l'élite de l'aristocratie et de la
noblesse espagnoles. Une grande partie de
cette clientèle de choix se compose des fidèles
de l'Etablissement Thermal, des justiciables
de la cure saline, de tous ceux qui viennent
demander à l'eau minérale de Briscous le
sommeil, l'énergie cérébrale, les forces phy-
siques, l'appétit, la gaieté; en un mot, la
santé. Dès le mois de juillet, on faisait queue
aux guichets des Thermes Salins, et il faut
croire que les cures s'y sont accomplies avec
succès, car on n'en voit plus sortir maintenant
que des visages aimables et heureux. De tels
résultats ne sont point faits pour étonner,
d'ailleurs, car les eaux de Briscous, bien qu'el-
les soient fort jeunes encore de réputation,
font chaque année un pas de plus dans la
voie d'une renommée universelle, et il arri-
vera fatalement que tous ceux qui recherchent
la santé par le sel, tous les justiciables du
^itemeat ^oOTé-wdigu^i^earnt j?as 4
leur accorder une préférence que tout justifie.
Elles ont, en effet, sur leurs congénères, outre
une supériorité de minéralisation que l'ana-
lyse démontre avec toute la brutalité de ses
chiffres, l'immense avantage d'être employées
dans une station oir tout concourt à seconder
leur puissance curative : un climat des plus
tempérés et agréable en toutes saisons, l'ait
marin dont l'inhalation permanente assure
dans le traitement une heureuse continuité,
les avantages indispensables d'un confortable
sans reproches, et enfin ce cadre merveilleux
dont la souriante harmonie attendrit les yeux
les plus blasés, relève les coeurs les plus dé
s espérés et guérit l'âme avec le corps.
L
ongchamps fut, hier, ébloui par l'éclat tles
« Tout-Reflets » Léon, et le chapelier si
parisien de la rue Daunou gagna une fois de
plus, aux applaudissements discrets de nos
sportsmen, le grand prix du chic et de l'élé-
gance.
E
nfin, on y revient. Il s'agit clé la finesse
des tours de taille dont toutes les coquet-
tes souhaitaient ardemment le retour. Cest
chose faite. Toutes les élégantes avaient, hier,
au Grand Prix d'Automne, la taille fine et
arrondie de leurs rêves, grâce aux nouveaux
corsets cambrés de la reine du corset, Mme
Guillot. Il appartenait à l'aimable artiste de
rendre aux femmes la finesse de leur tour
de taille; elle l'a fait avec son joli talent ha-
bituel, et toutes les femmes en sont ravies.
p
our installer : serres, jardins d'hiver, jar-
dinières, etc., voir les meubles en rotin
souple très riches en bambou naturel, les siè-
ges confortables et originaux créés par Per-
npt-Vibert, 33, rue du 4-Septembre. (Maison
des Bambous. Société anonyme.)
L
avantage d acheter directement dans les
pays d'origine, et aux meilleures condi-
tions, les pelleteries brutes : zibeline, chin-
chilla, loutre, hermine, etc., constituait jus-
qu'à présent le privilège et la. raison d'être
du fourreur.
Pour être à même de vendre aux mêmes
conditions, le couturier-fourreur achète aujour-
d'hui aux mêmes sources. Ceci explique la
grande vogue du rayon de fourrures chez
Béchoff-David, où, pour le prix de la valeur
intrinsèque des peaux, l'on obtient des vête-
ments d'un chic suprême, spécialement tra-
vaillés et essayés par les mêmes faiseurs que
ceux qui exécutent les admirables manteaux
de drap souple ayant fait la grande réputa-
tion de la maison.
G
rande sensation, hier, à Longchamps, au
Prix d'Automne, causée par l'innovation
de Lewis, fixant audacieusement à droite les
plumes et Jes panaches de ses chapeaux
Louis XVI. et Directoire sans barrette; la
beauté charmeresse de ses jolies clientes en
parut comme redoublée.
JOINVILLE.
SORCIERE ET VAMPIRE
En Algérie, une femme déterrait des cada.
vres d'enfants et se servait de leurs
os pour confectionner des philtres
ALGER, 7 octobre. (Par dépêche de notre
correspondant particulier.) — La justice
procède, en ce momeartt. à une.-enquête scr.
rée, sur une irès grave affaire? qUi vient de
se produire dans le village de-ChelLala, au,
Sud du département d'Alger:
Ces jours derniers, deux jeunes enfants,,
respectivement âgés de huit et de cinq ans,
mouraient, à quelques jours d'intervalle, à
Chellala, et, peu après, leurs cadavres
étaient exhumés et disparaissaient.
On crut tout d'abord qu'ils avaient été dé-
terrés par les bêtes fauves. Mais bientôt, le
juge de paix suivant certaines traces,acquit
La conviction que ces tombes avaient été
profanées par des misérables. Des gens qui
s'étaient tus jusque-là parlèrent.
On, apprit alors que les petits caaavres
avaient été enlevés par des sorcières ara-
bes et juives, qui recherchaient les os des
morts, particulièrement ceux des enfants,
pour les broyer et les faire entrer dans la
composition de certains mets, destinés à
être présentés à ceux ou celles à qui une
personne voulait jeter un sort.
Une de ces sorcières, sur qui pèsent de
très graves présomptions, a été arrêtée.
Carnet d'un Sauvage
Lorsque furent créées les palmes acadé-
miques, la plus grande pensée du règne,
on ne songea pas à les canaliser, autrement
dit, à fixer leur répartition. La distribution
fut laissée au bon plaisir du distributeur.
Depuis, le distributeur, débordé par les de-
mandes (on en compte de vingt à trente
mille par semestre), crut devoir se régle-
menter lui-même, ce qui est toujours amu-
sant, et il décida qu'il serait donné tant de
palmes par département, selon le chiffre de
la population.
C'est pourquoi, aujourd'hui, il est répon-
du à un solliciteur :
— Pardon ! Votre département n'a droit
qu'à dix-sept hommes distingués.
- Mais, monsieur, deux parfaits igno-
rants ont fait partie de la dernière promo-
tion.
— C'est qu'ils appartenaient à un dépar-
tement qui n'avait pas son contingent, et
on a pris ce qu'on a trouvé.
Voilà sage administration. C'est un sys-
tème analogue que nous voyons appliqué
dans les divers cahiers des charges des
théâtres subventionnés, et particulièrement
dans celui de l'Opéra, où je lis que la di-
rection est obligée de représenter chaque
année huit actes nouveaux de compositeurs
français.
Ne me dites pas qu'il pourrait se trouver
qu'en telle année il se présentât une quan-
tité considérable de belles œuvres, et qu'en
telle autre il ne se présentât rien du tout.
Ceci est contraire au bon ordre des affaires.
La qualité importe peu. Il faut huit actes,
arrive qu'arrive. Je pense, qu'on a dû cal-
culer cela également selon le chiffre de
la population ; et, si M. Piot réussit aans
son entreprise, et que le nombre des nais.
sances s'élève, j'espère que nous aurons
droit à un acte de plus.
On parle de nommer une commission
spéciale, qui établira la quantité d'hommes
de génie et de talent que pourra se permet-
tre la France, relativement à son étendue.
On jpourra en ajouter un dans les années
bissextiles.
Henry Maret.
EN TROISIEME PAGE : GRANDES ET
PETITES PERSONNES, par CHABLES-HENRY
~=~RSO~ ,
lté plus grand Cuirassé da monde
Le Dreaânought •' vient de commencer ses essais, qui emp1.-,¡n-
tent un très grand intérêt aux innovations essentielles
introduites sur ce navire. -
LE « DREADNOUGHT »
A gauche, une vue d'arrière faisant ressortir la largeur du cuirassé; à droite. Une vm
de face montrant d'une manière saisissante la hauteur du franc-bord.
Le fameux Dreadnought vient D0 com-
mencer ses essais à Portsmouth.
Les expériences vont se poursuivre
dans le mystère qui a entouré toutes
les phases de la construction de ce
navire-type. L'amirauté anglaise en attend
les résultats pour fixer les caractéristiques
des trois cuirassés du programme de 1906.
Rien n'a été négligé pour gagner du temps.
Le Dreadnought a été construit avec une ra-
pidité qui fait honneur aux chantiers britan-
niques, mais grâce à des moyens dont i em-
ploi ne saurait se généraliser. L'achèvement
d'un cuirassé de 19,000 tonnes -en douze mois
est un tour dé force, même en Angleterre.
Mais l'essentiel était de faire vite, pour fixer
la valeur de certaines innovations qui ont
été très discutées.
Le Dreadnought déplace 19,700 tonnes. Il
coûtera la jolie somme de 41 millions, sans
son artillerie, qui reviendra à elle seule à
près de 3 millions. C'est pour rien. En Fran-
ce, un bateau semblable coûterait plus de
50 millions. Trois caractéristiques tout à fèIJt
nouvelles donnent à ce navire un intérêt
particulier.
Tout d'abord, c'est le premier oà'iment
sur lequel on -ait -organisé, en Àngutenre,
un système de défense contre ies effets des
torpilles. Nous disons en Angleterre, car la
France a fait des essais du nône gt'.nre sur
le Henri-IV et la Russie sur le Cesarevitch..
Les Anglais font grand mystère du procédé
adopté. Il est évidemment basé sur une,dou-
ble coque renforcée avec un compartimen-
tage développé.
L'emploi exclusif de machines à turbine^
est la seconde innovation importante.
La marine anglaise tient en grande faveur
ces nouveaux organes de propulsion d'im
vention britannique. Cependant, elle ne Ief
avait encore expérimentés que sur fies des.
troyers ou des éclaireurs dont le iléplarc,
ment n'est guère supérieur à 3,000 tonnes.
La tentative actuelle est audacieuse. Les pre«
miers résultats paraissent d'ailleurs favofBt
blés.-Le nouveau cuirassé a atteint paraij,"
il, dans les essais préliminaires, une, vite^q
de 21,5 nœuds, dépassant sensiblement tes
prévisions.
L'armement du Dreadnought est rifuior
vation qui a été la plus discutée. Le nou.
veau cuirassé ne porte que dix gros cawona
de 305 millimètres et une nombreuse balte.
rie^d'artillerie légère, contre les torpilleurs.
La suppression complète de l'artillerie
moyenne a soulevé de vives critiques de la
part de personnalités dbrit l'autorité e,,*, in-
contestable. M. White, le fameux ingénie m
naval, le père de la flotte anglaise mo/jernes
le capitaine Mahan, le célèbre critiquel naval
américain, ont blâmé l'emploi eiclug/if de la
grosse artillerie en prenant texte des le-
vons de la bataille de Tsoushima.. Ils ont
trouvé des contradicteurs non mc/ins aulo-
risés*.
Ajoutons, pour conclure, que Fétat-majot
et l'amiral seront logés 3» l'avant, sur le
Dreadnought, et non plus à l'arrière, coin.
me l'exigeait un usage séculaire. Enfin, lé
franc-bord du nouveau navire est très élevé
afin d'augmenter le champ de tir de l'ar/.
tillerïes — Sl-B. 1
L'AGITATION CHEZ LES BOULANGERS
Paris aura du pain frais aujourd'hui
On a Il doublé hier un peu partout
Grâce aux mesures d'ordre prises par M. Lèpine, les ménagèret.
ont pu faire d'amples provisions, et aucun incident
grave ne s'est produit.
Ainsi qu'il était facile de le prévoir, dès
l'aube, les boulangeries parisiennes ont été
envahies par une foule de ménagères redou-
tant d'être privées de pain aujourd'hui, tou-
tes les boutiques, on le sait, devant être fer-
mées.
Et, & qui rendait l'animation plus pitto-
resque encore, c'était l'arrivée successive
des gardiens de la paix et des municipaux
chargés par M. Lépme de protéger les com-
merçants, le cas échéant.
Voici de braves mères de famille suivies
de deux ou trois enfants ; tout ce petit monde
est empressé, babille, piaille.
— Rassurez-vous, dit* la boulangère. Il y
aura du pain aujourd'hui et demain.
En quelques instants, les étagères so»t dé-
garnies ; il reste bien des petits pains.M.fles
croissants, mais ce n'est pas suffisant,
Des clientes en retard se présentent vers
dix heures et se demandent si elles vont être
réduites au jeûne ou aux pommes de terre ;
les patrons les rassurent à nouveau.
On avait dit et répété que les ouvriers ne
« doubleraient » pas ; cependant, dans la plu-
part des maisons de la périphérie, on a cuit
jusqu'à midi. Certains ont même fait la der-
nière fournée beaucoup plus tard.
Une ménagère, rue des Pyrénées, qui re-
vient avec deux pains « polka » sur les bras,
apprend que la Doulangerie communiste de
la rue Boyer et quelques patrons du quar-
tier qui n'ont pas accepté 1 affiche jaune an-
nonçant la fermeture du lundi fourniront du
pain comme à l'ordinaire.
-.:.. Si j'avais su, dit-elle, cela m'eût évité
bien de l'embarras ; demain ce pain sera ras-
sis, j'aurai beau le mettre dans une ser-
viette 1 Et puis, ce n'est pas agréable.
» Ma résolution est prise : dimanche pro-
chain, je ne m'affolerai pas, je laisserai venir
les événements. »
Cette opinion est générale. Ceux qui ont ac-
cumulé lee miches ou les boules dans les
boîtes à pain regretteront leur empresse-
ment
Certains patrons des dix-neuvieme et ving-
tième arrondissements — ils sont rares —
ayant épuisé leur stock à midi, ont tout sim-
plement fermé leurs boutiques.
Un petit patron du quartier du Père-La-
chaise nous a ainsi défini la situation :
— La loi sur le repos hebdomadaire nous
coûtera cher à tous, mais elle rendra heu-
reux les marchands de vins. Ce matin, trois
débitants qui, d'habitude, prennent chacun
de 15 à 20 kilos de pain, ont triplé leurs
achats aujourd'hui. La raison en est fort
simple : Demain lundi, ils auront soin de
laisser les miches en vue dans leur étalage,
et ceux qui ne se sont pas approvisionnés
et qui ignorent où se trouvent les rares mai-
sons qui consentent au roulement seront bien
forcés de demander au marchand de vins de
leur céder quelques livres de pain. Vous pen-
sez bien que le commerçant n'y consentira
qu'en haussant notablement le prix habituel
de vingt centimes.
» Le malheur des uns fait quelquefois le
bonheur des autres. »
Une agression a été commise, 44, boule-
vard Rochechouart, contre une boulangerie
dont les ouvriers étaient soupçonnés de vou-
loir doubler : un sac de sable a été versé
par le soupirail dans le fournil.
M. Lépine, prévenu de cet incident, a im.
^éfliateme&t pris les mesures nécessaires
pour protéger efficacement la liberté du t
vail. "'1,
D'après le pointage établi au cours de ta
nuit, 1,983 boulangeries sur 2,090 ont « doui
blé » les cuissons.
M. Lépine a visité, entre trois et six heu^
res, les différents postes, pour s'assurer de
l'exécution des mesures prises et rectifier leq
consignes selon les circonstances. -;
Nulle part., l'ordre n'a été troublé ; aucune
agression n'a été commise. ]
Il résulte de l'ensemble des renseigne,
ments recueillis que la majorité des patrons
ont fait tous leurs efforts pour satisfaire leur*
clientèle. -<4
L'un nous dit :
— J'ai trouvé trois hommes qui ont bien
voulu « marcher » et j'ai du pain plus qu'il
ne m'en faut.
Un autre nous explique qu'up ouvrier de
bonne volonté lui a suffi.. j
— J'ai bien mis un peu la main à la pâtqi
ajoute-t-il, mais n'était-ce point de circonsl
tance 1
Un troisième, énigmatique, nous affirmer
avec un fin sourire : ,
— J'ai trouvé une « combinaison n, et vous
voyez que mes rayons ne sont pas vides.
Et, en effet, partout le pain abonde. Tous
les boulangers se sont arrangés pour le plU;
grand bien de la population parisienne..
A LA BOURSE DU TRAVAIL
Pendant ce temps, un meeting des oo
vriers boulangers se tenait à la Bourse de
Travail. Les assistants y étaient moins nonu
breux que les jours précédents.
Après avoir compté, parmi les assistants
ceux qui avaient été congédiés par les p
trous, pour avoir refusé de « doubler », M
Bousquet, secrétaire de la Féuération oui
vrière de l'alimentation, a fait cette décla.
ration :
— Camarades, je vous conseîlle de re»
ter caimes et de n'user d'anoure vi lenc^
pour le moment. Vous allez réclamer, de
vant les prud'hommes, une inuem ité df
cent francs au minimum, pour brusque rem
voi. Nous irons en masse devant le conseil
des prud'hommes. Nous l'impressionnerons
par notre nombre.
» Si justice ne vous est pas rendue, nous
verrons alors si la boulange ne doit pal
descendre dans la rue. J'ai personnellement
une revanche à prendre sur le pair, nat ;
comptez sur moi pour trouver les moyen!
qui pourront vous faire sûr emcut Irioia
pher.
» Encore quelques jours d'énergie. Au
rions-nous tant, combattu, afin d'obtenir
cette loi humanitaire, pour finalement ei
être réduits à un état pire ? »
Quelques orateurs ont proféré de violen
tes menaces contre les « renégats », lei "'i
« fainéants » qui ont « doublé ».
La réunion s'est terminée par le ~?& Si
l'ordre du jour suivant :
« La majorité des m ma rades présents ort
été renvoyés sans hésitation de la part da
patrons pour avoir refusé de douuler^ a
renvoi prouve que les pat ons pe:lven
changer d'ouvriers, et ai- si t -mbe le prin
cipal argument qu'ils four; issaient poqi
combattre le repos par roulement.
» Les ouvriers, boulangers engagent leuq
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