Titre : Floréal : l'hebdomadaire illustré du monde du travail / directeur Paul-Boncour ; éditeur-fondateur Aristide Quillet
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1920-07-24
Contributeur : Quillet, Aristide (1880-1955). Éditeur scientifique
Contributeur : Jean-Lorris (1879-1932). Éditeur scientifique
Contributeur : Paul-Boncour, Joseph (1873-1972). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32776014f
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 24 juillet 1920 24 juillet 1920
Description : 1920/07/24 (N25,T2). 1920/07/24 (N25,T2).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6281119n
Source : CODHOS / OURS, 2012-81221
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
« Les femmes sont à l'homme ce que la
fleur est au jardin, une parure, un par-
fum, une joie des yeux et du cœur. »
C'est en ces termes que le plus distingué et le plus
spirituel des Musulmans, Si Kadour Ben Ghabrit (1),
consul de France honoraire, directeur du Protocole
du Gouvernement chérifien, définit les femmes, non
seulement celles de son pays, mais toutes nos gracieu-
ses abonnées de Floréal, car Ben Ghabrit est actuel-
lement retenu au Maroc, auprès de Sa Majesté le
Sultan Moulay Youssef, par les devoirs de sa charge,
mais il a, suivant ses propres expressions, « beaucoup
voyagé, beaucoup vu, et par conséq i nt beaucoup
comparé ». C'est donc un plaisir pour nous que de
rapporter les observations d'un tel connaisseur ; nul
n'est, en effet, plus qualifié que ce grand seigneur
marocain pour soulever légèrement un coin ru voile
de ses compatriotes, pour entr'ouvrir — oh 1 sans
bruit et pour un instant — la porte du harem et nul
n'est peut-être plus désireux que notre ami lecteur
d'y risquer un coup d'œil ; chemin faisant, notre guide
se livrera à certaines appréciations, formulera quel-
ques comparaisons dont nous sommes, à notre très
grand regrét, et faute
d'une expérience aussi
complète que la sienne,
obligé de lui laisser toute
la paternité.
Tout d'abord, débar-
rassons-nous de certains
préjugés sur la préten-
due séquestration de la
Musulmane ; nous nous
la représentons comme
enfermée entre de hautes
murailles, nous l'imagi-
nons volontiers captive
nonchalante, étendue sur
de moelleux tapis, res-
pirant l'air parfumé du
patio où l'on n'entend
que le murmure des
tuux Pures coulant dans les vasques de marbre,
bel oiseau dont la cage dorée ne s'ouvre que pour
laisser passage à l'ennuque grotesque ou au maître
redouté. Il convient de distinguer : à la campagne,
« femme est libre, autant que l'homme, libre, hélas !
de mener au grand jour sa vie de misère, sur le bled,
B (l) Cet article s'inspire d'une très brillante causerie que Si Kadour
en Ghabrit flt à Casablanca, lors de l'Exposition de 1895
où, le plus souvent, à côté de l'âne, elle tire la charrue ;
il faut dire que le maître qui guide. l'attelage est
un pauvre hère, aussi dur pour lui-même que pour
les siens. Ce servage de la femme est-il spécial aux
campagnes africaines ? Que les paysannes de tel de nos
pays de l'Europe civilisée répondent 1 Quant aux es-
claves des rizières chinoises, aux ouvrières des filatures
japonaises, elles n'ont pas même la parole !
D'ailleurs, les Bédouines rachètent cet asservisse-
ment à la terre par l'autorité même qu'elles prennent
au sein de la famille, pas toujours cependant; il est
un proverbe arabe qui s'est étrangement propagé en
pays chrétien et qui dit : « Consulte ta femme. et
fais à ta tête. » Hâtons-nous d'ajouter que le mode
même d'habitation est en faveur de la liberté de
notre Bédouine : « Des murs de toile et des maisons de
paille, avec, pour plafond, le ciel, et pour lumière, les
étoiles, ne feront jamais une prison. » Aussi cette
paysanne s'en va-t-elle par les champs alerte et dé-
voilée; « elle abandonne à la caresse du soleil sa poi-
trine et ses jambes ». 0 Ben Ghabrit, cette coutume
charmante ne tend-elle pas à s'implanter sous d'autres
cieux où. le soleil est cependant moins caressant ?
Dévoilée ! n'est-ce pas là un rare privilège en faveur
de la Bédouine ? Qui donc a imposé aux femmes de
l'Islam cette obligation singulièrement cruelle, à moins
qu'elle ne soit bienveillante. quelquefois ? Au début
de l'Islam, le voile n'existait pas, mais, un jour, le
khalife Omar se plaignit à Mahomet que les femmes
fussent souvent interpellées par des gens sans retenue
et le prophète, ayant consulté le Très-Haut, ordonna
(Coran, chap. 33, verset 59) de prescrire aux épouses,
aux filles et aux femmes des croyants de laisser tom-
ber leur voile jusqu'en bas, afin qu'elles ne soient
méconnues ni calomniées, et le Coran ajoute : « Dieu
est indulgent et miséricordieux », en quoi le Coran a
beaucoup de sagesse ou beaucoup d'esprit.
Toujours est-il que la condition des citadines dif-
fère en cela de celle des paysannes. La femme, à la ville,
ne peut sortir que voilée, mais n'allons pas cependant
nous attendrir trop sur le supplice du voile auquel nous
venons de reconnaître quelque avantage : les rues
arabes sont étroites, tout étroites, une forme blanche
enveloppée du haïk léger s'avance à votre rencontre,
une écharpe de soie que deux jolies mains tiennent
tendue devant le visage se soulève, oh ! si peu ! et
c'est, un instant, l'éclair de deux yeux noirs que le
khol fait si grands, si profonds et qui donnent leur
lumière comme le diamant son éclat !
— 567 -
fleur est au jardin, une parure, un par-
fum, une joie des yeux et du cœur. »
C'est en ces termes que le plus distingué et le plus
spirituel des Musulmans, Si Kadour Ben Ghabrit (1),
consul de France honoraire, directeur du Protocole
du Gouvernement chérifien, définit les femmes, non
seulement celles de son pays, mais toutes nos gracieu-
ses abonnées de Floréal, car Ben Ghabrit est actuel-
lement retenu au Maroc, auprès de Sa Majesté le
Sultan Moulay Youssef, par les devoirs de sa charge,
mais il a, suivant ses propres expressions, « beaucoup
voyagé, beaucoup vu, et par conséq i nt beaucoup
comparé ». C'est donc un plaisir pour nous que de
rapporter les observations d'un tel connaisseur ; nul
n'est, en effet, plus qualifié que ce grand seigneur
marocain pour soulever légèrement un coin ru voile
de ses compatriotes, pour entr'ouvrir — oh 1 sans
bruit et pour un instant — la porte du harem et nul
n'est peut-être plus désireux que notre ami lecteur
d'y risquer un coup d'œil ; chemin faisant, notre guide
se livrera à certaines appréciations, formulera quel-
ques comparaisons dont nous sommes, à notre très
grand regrét, et faute
d'une expérience aussi
complète que la sienne,
obligé de lui laisser toute
la paternité.
Tout d'abord, débar-
rassons-nous de certains
préjugés sur la préten-
due séquestration de la
Musulmane ; nous nous
la représentons comme
enfermée entre de hautes
murailles, nous l'imagi-
nons volontiers captive
nonchalante, étendue sur
de moelleux tapis, res-
pirant l'air parfumé du
patio où l'on n'entend
que le murmure des
tuux Pures coulant dans les vasques de marbre,
bel oiseau dont la cage dorée ne s'ouvre que pour
laisser passage à l'ennuque grotesque ou au maître
redouté. Il convient de distinguer : à la campagne,
« femme est libre, autant que l'homme, libre, hélas !
de mener au grand jour sa vie de misère, sur le bled,
B (l) Cet article s'inspire d'une très brillante causerie que Si Kadour
en Ghabrit flt à Casablanca, lors de l'Exposition de 1895
où, le plus souvent, à côté de l'âne, elle tire la charrue ;
il faut dire que le maître qui guide. l'attelage est
un pauvre hère, aussi dur pour lui-même que pour
les siens. Ce servage de la femme est-il spécial aux
campagnes africaines ? Que les paysannes de tel de nos
pays de l'Europe civilisée répondent 1 Quant aux es-
claves des rizières chinoises, aux ouvrières des filatures
japonaises, elles n'ont pas même la parole !
D'ailleurs, les Bédouines rachètent cet asservisse-
ment à la terre par l'autorité même qu'elles prennent
au sein de la famille, pas toujours cependant; il est
un proverbe arabe qui s'est étrangement propagé en
pays chrétien et qui dit : « Consulte ta femme. et
fais à ta tête. » Hâtons-nous d'ajouter que le mode
même d'habitation est en faveur de la liberté de
notre Bédouine : « Des murs de toile et des maisons de
paille, avec, pour plafond, le ciel, et pour lumière, les
étoiles, ne feront jamais une prison. » Aussi cette
paysanne s'en va-t-elle par les champs alerte et dé-
voilée; « elle abandonne à la caresse du soleil sa poi-
trine et ses jambes ». 0 Ben Ghabrit, cette coutume
charmante ne tend-elle pas à s'implanter sous d'autres
cieux où. le soleil est cependant moins caressant ?
Dévoilée ! n'est-ce pas là un rare privilège en faveur
de la Bédouine ? Qui donc a imposé aux femmes de
l'Islam cette obligation singulièrement cruelle, à moins
qu'elle ne soit bienveillante. quelquefois ? Au début
de l'Islam, le voile n'existait pas, mais, un jour, le
khalife Omar se plaignit à Mahomet que les femmes
fussent souvent interpellées par des gens sans retenue
et le prophète, ayant consulté le Très-Haut, ordonna
(Coran, chap. 33, verset 59) de prescrire aux épouses,
aux filles et aux femmes des croyants de laisser tom-
ber leur voile jusqu'en bas, afin qu'elles ne soient
méconnues ni calomniées, et le Coran ajoute : « Dieu
est indulgent et miséricordieux », en quoi le Coran a
beaucoup de sagesse ou beaucoup d'esprit.
Toujours est-il que la condition des citadines dif-
fère en cela de celle des paysannes. La femme, à la ville,
ne peut sortir que voilée, mais n'allons pas cependant
nous attendrir trop sur le supplice du voile auquel nous
venons de reconnaître quelque avantage : les rues
arabes sont étroites, tout étroites, une forme blanche
enveloppée du haïk léger s'avance à votre rencontre,
une écharpe de soie que deux jolies mains tiennent
tendue devant le visage se soulève, oh ! si peu ! et
c'est, un instant, l'éclair de deux yeux noirs que le
khol fait si grands, si profonds et qui donnent leur
lumière comme le diamant son éclat !
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